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Lettre mensuelle. La mort de la mort. N° 151. Octobre 2021. Théorie de la gestion de la terreur.

Nous avons depuis longtemps (…) touché Mars, la Lune, exploité l’énergie nucléaire, reproduit artificiellement l’ADN, et nous avons maintenant les moyens biochimiques de contrôler les naissances ; pourquoi la mort elle-même, « le dernier ennemi », devrait-elle être considérée comme sacrée et au-delà de toute conquête ? Alan Harrington, romancier, 1977 (traduction de The immortalist).


Thème du mois : Théorie de la gestion de la terreur


Introduction

La Terror Management Theory (TMT) a été élaborée dans les années 1980 par Jeff Greenberg, Tom Pyszczynski et Sheldon Solomon.

Selon ces auteurs, tous les êtres humains sont confrontés à deux réalités.

D’une part, l’humain, comme tous les animaux, possède un instinct qui le pousse à se protéger et à chercher à survivre. Et d’autre part, il est doté d’un niveau supérieur de conscience de soi qui lui permet de comprendre, contrairement aux autres animaux, qu’il est en vie et qu’il finira par mourir un jour.

Cela implique indéniablement la frustration du désir de rester en vie. C’est à la fois effrayant et motivant, et représente un conflit  psychologique central et unique chez l’être humain.

Mais cette théorie, déjà abordée dans une lettre La mort de la mort de mai 2010, nous apprend également que l’homme, pour faire face à la peur de la mort, a su développer des mécanismes de défense. Sachant que nous n’allons pas subsister en tant qu’individu, nous nous identifions à la collectivité, nos buts de survie deviennent des buts collectifs. Dans une vision globalisante, nous pourrions dire que toute forme d’art, de culture, de tradition, de construction collective à long terme participe de ce mécanisme. Il s’agit de valoriser sa culture d’appartenance qui permet de renforcer l’estime de soi dans la conviction qu’en tant qu’individu nous contribuons à construire ce sens.

Ce mécanisme a malheureusement aussi des aspects négatifs. En renforçant les valeurs de groupe, il incite au rejet de ceux qui sont différents. Ici, comme dans d’autres domaines, la peur est donc mauvaise conseillère, conseillère de repli non pas sur soi, mais sur son groupe.

Comment le Covid-19 a-t-il influencé notre réaction face à la mort ?

La pandémie de coronavirus nous a rappelé à quel point nous sommes vulnérables, particulièrement en avançant en âge. Un fait que nous chassons de notre esprit quand les temps sont moins menaçants.

À travers le monde, nous avons observé des comportements de solidarité, mais aussi des comportements de repli : certains se sont mobilisés pour aider les autres (par exemple fabriquant des équipements de protection pour les soignants ou organisant des collectes de fonds), d’autres ont stocké des boîtes de conserve et du papier toilette.

Certaines études récentes montrent que la perception de la menace (Covid-19) est liée aux décisions gouvernementales comme le confinement (si le gouvernement confine, la maladie doit être très grave) et au nombre de cas rapportés. L’augmentation du nombre de cas dans certains pays serait corrélé à l’augmentation du conservatisme et de l’autoritarisme.

Seuls les humains sont touchés

Comme déjà écrit, la prise de conscience de l’inéluctabilité est propre à l’humain. Il se peut que certains animaux soient conscients de ce qu’est la mort de leurs congénères et du risque pour eux-mêmes. D’ailleurs, cette prise de conscience ne concerne même pas tous les humains. Les jeunes enfants  vivent le plus souvent avec joie et sans ennui une vie qui leur apparaît sans limite.

Le propre de l’humain serait-il d’apprendre à mourir…

Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder fixement écrit La Rochefoucauld. Philosopher, c’est apprendre à mourir ont exprimé au moins Socrate et Montaigne. Aucun humain adulte conscient n’est indifférent à l’inéluctabilité de sa fin. Devant le temps qui passe, nous ressentons, comme au bord d’un précipice, de la peur, mais également de la fascination. Aucune civilisation ne traite le décès de nos semblables sans une approche spécifique.

Ou bien le propre de l’homme serait-il de lutter toujours pour vaincre la mort ?

Presque toutes les civilisations, presque toutes les religions expliquent que la mort n’est pas la fin du voyage.  Dans une perspective agnostique, la principale raison d’être des croyances en l’au-delà est bien sûr la gestion de la peur de mourir.  La recherche de l’immortalité se trouve dans les croyances, les pratiques et les rites. Parfois, il s’agit d’affirmations, d’incantations.  Parfois, il s’agit de méthodes que l’on pourrait qualifier de « pré-scientifiques », de modes d’emploi pour éviter la mort ou pour que la mort ne soit qu’un phénomène temporaire. 

Chez les taoïstes, il s’agissait d’apprendre à vivre selon des méthodes très ascétiques. Dans l’Égypte ancienne et le christianisme tel qu’il était enseigné jusqu’à il y a peu, il s’agit de conserver le corps, par embaumement ou enterrement pour permettre le retour, la réincarnation (retour dans la chair). L’Église catholique refusait la crémation (incinération) jusqu’il y a peu.

Un mécanisme inconscient 

C’est un aspect fondamental de la gestion de la terreur. Nos moyens de défense sont constitués par ce qui avait été nommé par Ernest Becker, The Denial of Death, le déni de la mort. Devant ce qui est à la fois insoutenable et inévitable, nous élaborons des processus inconscients. Si ces processus étaient conscients, ils perdraient largement de leur efficacité.

Et pour demain, dans un monde où l’amortalité devient envisageable ?

Vivre sans ressentir de peur insoutenable est, bien sûr, un mécanisme souhaitable. Mais cela peut être aussi un obstacle à la lutte pour les recherches de longévité en santé, lorsque des mécanismes inconscients nous poussent à ne pas lutter contre, voire à « aimer » la mort (de vieillesse).

Les idéaux collectifs sont issus des sentiments d’appartenance de groupes au départ opposés les uns aux autres. Aujourd’hui, ils nous permettent de nous comporter dans une collectivité de plus en plus mondiale pour vivre de manière plus pacifique, plus solidaire et plus durable, notamment dans la lutte contre le réchauffement climatique. De même demain, une meilleure « gestion de la peur de la mort » pourrait nous permettre de mieux progresser pour une vie en bonne santé beaucoup plus longue, voire un jour sans limitation de durée.


Bonne nouvelle du mois


  • Même si c’est une évolution fragile, la mortalité liée à l’épidémie de Covid-19 ralentit. Alors que le nombre de personnes atteintes continue à augmenter, le nombre de décès tant en Belgique que dans le monde diminue, montrant l’efficacité croissante des vaccins préventifs et des traitements thérapeutiques.
  • Parmi les traitements les plus prometteurs contre le coronavirus, le molnupiravir ravive l’espoir :  le comprimé réduirait de moitié le risque d’hospitalisation ou de mort du Covid-19.

Pour en savoir plus :

Lettre mensuelle. La mort de la mort. N° 150 Septembre 2021. Microbiome et longévité

« Mais tout porte à croire que l’ajout de Triphala et de ces probiotiques au régime alimentaire est un gage de longévité et de santé. »

Satya Prakash (Laboratoire de recherche en biomédecine et thérapie cellulaire, Département de génie biomédical, Université McGill, Canada) (remarque: il s’agit cependant seulement d’améliorations modérées de la durée de vie en bonne santé grâce à une meilleure nutrition)  


Thème du mois : Microbiome et longévité en bonne santé


Introduction

Notre corps est notamment constitué de systèmes complexes, fascinants, interdépendants et changeants.

Tous varient au cours des âges de la vie et, malheureusement, se dégradent progressivement. 

Celui de ces systèmes qui affronte le plus directement le monde extérieur, l’environnement le plus changeant, le plus hostile et le plus dangereux, c’est le système digestif.

Chaque année près d’une tonne d’aliments et de boissons, mais aussi des kilos de médicaments, de substances non nutritives et des millions de milliards de bactéries, de virus et de parasites y transitent et parfois s’y installent. L’humain étant omnivore, la diversité est particulièrement grande. C’est une des raisons pour lesquelles les approches de recherches pour la longévité sont également diversifiées.

L’importance du microbiote intestinal

Notre organisme héberge de très nombreuses espèces bactériennes. Ces communautés de micro-organismes, appelées « microbiotes » élisent domicile à différents endroits de notre corps : la bouche, la peau, le vagin…Mais surtout l’intestin ! Cet organe qui mesure environ 8 mètres de long héberge jusqu’à 100 000 milliards de bactéries, principalement localisées dans l’intestin grêle et le côlon. Les scientifiques estiment ainsi que près de 90 % des matières fécales seraient constituées de bactéries !

Ces bactéries, associées à d’autres micro-organismes tels que les virus et levures, forment la flore intestinale désormais rebaptisée « microbiote intestinal » par la communauté scientifique.

In utero, le tube digestif du fœtus demeure un milieu stérile. Lors de la naissance, l’allaitement, la diversification alimentaire, le microbiote intestinal d’un individu se constitue au fil des années, jusqu’à contenir près de 1 000 espèces bactériennes différentes chez un adulte en bonne santé. Un monde bactérien qui pèse près de 2 kilos.

Les 200 millions de neurones du tube digestif

Les mêmes neurones que ceux qui se logent dans notre cerveau tapissent notre tube digestif, certains parlent de « deuxième cerveau » ! 

Assurer la motricité intestinale est la première fonction de ce système nerveux dit « entérique« . Les cellules nerveuses sont également chargées de transmettre des informations depuis notre intestin jusque dans notre cerveau. De plus, comme le cerveau, les neurones de l’intestin sont capables de produire des hormones et des neurotransmetteurs. 

Nos émotions se logent bel et bien aussi dans notre intestin. Avoir « la peur au ventre » ou « l’estomac noué », « digérer une information » sont des expressions illustrant des réalités.

Des liens entre la maladie d’Alzheimer et le microbiome ont été établis par des études. Par contre, il ne semble pas que les neurones du « second cerveau » souffrent d’une maladie d’Alzheimer ou neurodégénérative spécifique, même si le contrôle nerveux se dégrade avec l’âge (une des causes de l’incontinence des personnes âgées).  

Une amélioration de la longévité passerait-elle par le microbiote et les intestins?

Récemment, des variations dans le microbiote intestinal ont été associées à des phénotypes liés à l’âge et les probiotiques se sont révélés prometteurs dans la gestion de la progression des maladies chroniques. 

Dans un article scientifique publié dans Nature en mai 2018, des chercheurs mettent en évidence une extension de la longévité chez la drosophile. En ajoutant une association de probiotiques et d’un complément à base de plantes à l’alimentation des mouches drosophiles, des scientifiques de l’Université McGill ont réussi à prolonger de 60 % leur durée de vie et à les mettre à l’abri de maladies chroniques habituellement liées au vieillissement.

Dans cette étude, il a été démontré que de nouvelles formulations probiotiques et symbiotiques prolongent de manière combinatoire la longévité chez le mâle Drosophila melanogaster par des mécanismes de communication intestin-cerveau avec des implications dans la gestion des maladies chroniques.

Longévité chez les souris

Des chercheurs découvrent le potentiel des microbes pour ralentir le vieillissement du cerveau

Les recherches du centre de recherche SFI d’APC Microbiome Ireland (APC)  de l’University College Cork (UCC) publiées dans Nature Aging  présentent une nouvelle approche pour ralentir les aspects de la détérioration du cerveau et des fonctions cognitives liées au vieillissement via les microbes de l’intestin. Cette recherche ouvre des voies thérapeutiques potentiellement nouvelles sous la forme d’interventions microbiennes pour ralentir le vieillissement cérébral et les problèmes cognitifs associés.

Il y a une appréciation croissante de l’importance des microbes dans l’intestin sur tous les aspects de la physiologie et de la médecine. Dans une étude très récente sur la souris, les auteurs montrent qu’en transplantant des microbes de jeunes animaux dans des animaux plus âgés, ils pourraient rajeunir certains aspects du cerveau et de la fonction immunitaire.

Les chercheurs ont expliqué dans la revue Nature Aging : « Le microbiote intestinal est de plus en plus reconnu comme un régulateur important de l’immunité de l’hôte et de la santé du cerveau. Le processus de vieillissement entraîne des altérations dramatiques du microbiote, qui sont liées à une moins bonne santé et à la fragilité des populations âgées. La greffe d’un microbiote provenant de jeunes donneurs a inversé les différences associées au vieillissement dans l’immunité périphérique et cérébrale, ainsi que le métabolome hippocampique et le transcriptome du vieillissement des souris receveuses. »

Longévité chez les humains

Une étude récente de l’Institute for Systems Biology (ISB) montre que selon le type de microbiote intestinal (la composition de la flore microbienne qui habite en permanence nos intestins), le vieillissement se fait en plus ou moins bonne santé. Cela jouerait par conséquent sur la longévité.

Le microbiote se modifie après 50 ans

Les chercheurs ont analysé le microbiote intestinal et l’état de santé de plus de 9000 personnes âgées de 18 à 101 ans, et en particulier, le groupe des plus de 78 ans. Chez ces derniers, ils constatent que le microbiote se modifie dans sa composition en vieillissant, et devient de plus en plus « unique » mais que les différents microbiotes des personnes en bonne santé assurent tous des fonctions métaboliques similaires.

Nos bactéries produisent des substances anti-âge

De façon corrélée, il a été mesuré dans le sang des sujets des concentrations plus élevées en certains métabolites produits par les microbes dans les intestins. Ainsi, il semble que les modifications de flore intestinale dans un vieillissement en bonne santé, soient liées à la production de certains métabolites dont on connaît d’ailleurs l’effet sur la longévité, comme l’indole par exemple.

On sait que certains types de bactéries intestinales transforment le tryptophane (un acide aminé essentiel) en indole qui passe dans la circulation sanguine. Or il a été montré que l’indole prolonge la durée de vie chez la souris, et réduit les processus inflammatoires intestinaux.

Un autre métabolite microbien, la phenylacetyl glutamine, est retrouvé en grande quantité dans le sang des centenaires.

Pour conclure, il est constaté que les flores microbiennes, continuant à évoluer à un âge avancé, permettraient de mieux conserver la santé et d’améliorer la longévité, c’est en relation avec la production commune de certains métabolites (comme les 2 exemples cités précédemment). Ces modifications se feraient surtout après la cinquantaine.

Modifications du microbiote avec l’âge

Alors que la composition de notre microbiote reste relativement stable pendant l’âge adulte, les modifications de l’alimentation, voire les médications (antibiotiques, anti acides, …), le ralentissement du transit gastro-intestinal et de la digestion… mènent à un déséquilibre de la flore digestive en vieillissant.

La diversification des espèces bactériennes a tendance à diminuer avec l’âge. On observe, entre autres, une augmentation d’entérobactéries et de germes pouvant alors devenir pathogènes par leur nombre, comme les streptocoques, staphylocoques… Ceux-ci se développent d’ailleurs plus facilement sur un terrain inflammatoire, et vont eux-mêmes entretenir une inflammation locale, ainsi qu’une trop grande perméabilité de la muqueuse intestinale.

Il a été observé chez des plus de 105 ans, une présence accrue de certaines familles bactériennes (akkermansia, bifidobactéries et christensenellaceae). Ceci laisse penser que cette présence favoriserait le contrôle de l’inflammation et un meilleur maintien de l’immunité, malgré les stress répétés et le travail de défense constant de toute une vie, contre des éléments microbiens étrangers.

Par exemple, les bifidobactéries représentent près de 90% des bactéries du nourrisson au sein, et plus que 5% en fin de vie. Leur apport paraît bénéfique à plusieurs titres chez le sujet âgé, selon les études.

Il serait possible de définir l’âge d’une personne en étudiant la composition de son microbiote

Le chercheur en longévité Alex Zhavoronkov, et ses collègues, issus de la startup InSilico Medicine spécialisée en intelligence artificielle, ont analysé l’ADN du microbiote intestinal de personnes en bonne santé provenant de différents pays. Au total, 1165 personnes âgées entre 20 et 90 ans ont été enrôlées dans l’étude et plus de 3600 échantillons de selles ont été prélevés afin d’étudier les données sur le microbiote intestinal et permettre l’entraînement de l’outil.  La machine a réussi à donner l’âge des individus avec une marge d’erreur de seulement 4 ans !

De plus, sur les 95 espèces bactériennes étudiées, 39 d’entre elles pourraient permettre de prédire l’âge. Les chercheurs ont également pu mettre en évidence que certaines espèces de bactéries étaient plus abondantes en vieillissant comme Eubacterium hallii, associée au bon équilibre du métabolisme intestinal ; et d’autres, au contraire, étaient en moins grande quantité comme Bacteroides vulgatus, corrélée à la colite ulcéreuse.

Et demain?

Jusqu’ici, des alimentations (sans excès) et des microbiotes très différents mènent à des durées de vie maximales relativement similaires. Un Japonais et un Français ont une alimentation fort différente, mais une longévité similaire.

Cependant, la poursuite des recherches, notamment l’analyse des données génétiques des innombrables organismes qui peuplent nos organes digestifs, ouvrent des perspectives de longévité non négligeables. Parmi les pistes, celles influençant le système nerveux sont parmi les plus importantes.


Nouvelles du mois


Aubrey de Grey, le biogérontologue mondialement le plus connu, a permis à l’organisation SENS de récolter 28 millions de dollars. Juste après cela, sur la base d’accusations de harcèlement, il a été exclu notamment de SENS. Cependant, au jour où sont écrites ces lignes, aucun.e des milliers de femmes et d’hommes, mineur.e.s ou majeur.e.s ayant été en contact public ou privé avec l’intéressé depuis des décennies n’a, à notre connaissance, intenté d’action en justice. Quelle que soit la tentation médiatique et les pressions pour condamner sans procédure et tout en respectant les droits et opinions de chacun.e, dont les victimes alléguées, nous nous en tiendrons ici aux droits humains fondamentaux: Toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées.

Iouri Milner, milliardaire et philanthrope américain a annoncé la création d’Altos Labs, une entreprise qui a pour but des progrès radicaux pour la longévité humaine avec un financement se comptant en centaines de millions de dollars. Jeff Bezos est aussi largement cité comme cofondateur. Des scientifiques renommés, spécialisés en recherche concernant le vieillissement, ont été recrutés ou associés, parmi lesquels le spécialiste des horloges épigénétiques Steve Horvath, le prix Nobel Shinya Yamanaka et les chercheurs en réjuvénation espagnols Juan Carlos Izpisúa Belmonte et Manuel Serrano


Pour davantage d’informations:

La mort de la mort N° 149. Août 2021. Longévité et altruismes.

“Ainsi, pendant des millénaires, la tâche des hommes du peuple et des philosophes rêveurs a été de se demander : « Que se passe-t-il si nous mourons ? ». “Aujourd’hui, nous sommes chargés d’un objectif bien plus ambitieux : celui d’examiner ce qui se passe si nous vivons. […] Et si, pour la première fois dans l’histoire, nous construisions une civilisation dont l’amélioration repose non pas sur la mort, mais sur le déploiement de technologies éthiques ?” Raiany Romanni, chercheuse en bioéthique, Harvard Medical School (traduction). Source.


Thème du mois : Longévité et altruismes


Introduction


L’importance de vouloir le bien des autres, pour les autres (et non pour une raison religieuse ou une obligation morale) est un concept qui a bien plus d’importance aujourd’hui qu’hier. Le mot altruisme lui-même a moins de deux siècles. Il fut créé par Auguste Comte, comme antonyme du mot égoïsme, en 1850. Nous n’aborderons pas dans cette lettre les questions d’ordre philosophique sur les raisons profondes de l’altruisme. L’important dans le cadre de cette lettre est que les solidarités conscientes sont une des raisons des gigantesques progrès sociaux et de longévité. Ainsi, jamais dans l’histoire de l’humanité, nous ne nous sommes plus préoccupés des autres à commencer par les plus âgés, donc les plus faibles, que durant l’épidémie de Covid actuelle.

L’altruisme chez les animaux

L’altruisme ne désigne pas seulement la mobilisation consciente humaine pour autrui. En biologie, l’altruisme fait référence au comportement d’un individu qui augmente la valeur sélective d’un autre individu tout en diminuant ses propres capacités reproductives (fitness). Les comportements altruistes en biologie apparaissent le plus manifestement dans les relations de parenté, comme la sélection de parentèle. Ils peuvent également être observés dans des groupes sociaux plus larges, comme chez les insectes sociaux.

Ils permettent à un individu d’augmenter le succès de transmission de ses gènes en aidant les individus apparentés qui partagent ces mêmes gènes.

L’altruisme dit obligatoire est la perte permanente de capacité directe (avec un potentiel de gain indirect). Par exemple, les abeilles ouvrières peuvent chercher de la nourriture pour la colonie (coût individuel, mais gain collectif).

L’altruisme facultatif est une perte temporaire de capacité directe (avec un potentiel de gain indirect d’une reproduction personnelle). Par exemple, un geai des broussailles de Floride peut aider au nid, puis gagner un territoire parental.

Exemples :

  • Les loups et les chiens sauvages apportent de la viande aux membres de la meute non présents lors de la mise à mort. 
  • Les mangoustes soutiennent les animaux âgés, malades ou blessés.
  • Les suricates ont souvent un garde pour avertir en cas d’attaque de prédateurs pendant que les autres se nourrissent.
  • Les babouins mâles menacent les prédateurs et couvrent l’arrière pendant que la troupe se retire.
  • Des bonobos ont été observés en train d’aider des congénères blessés ou handicapés.
  • Les chauves-souris vampires régurgitent généralement le sang à partager avec des compagnons de gîte malchanceux ou malades qui n’ont pas pu trouver de repas, formant souvent un système de “copinage ».
  • Les lémuriens de tous âges et des deux sexes prendront soin des nourrissons qui ne leur sont pas apparentés.
  • Les dauphins soutiennent les animaux malades ou blessés, nageant sous eux pendant des heures et les poussant à la surface pour qu’ils puissent respirer.
  • Chez de nombreuses espèces d’oiseaux, un couple reproducteur reçoit un soutien pour élever ses petits de la part d’autres oiseaux « aidants », y compris une aide pour nourrir ses oisillons. Certains iront même jusqu’à protéger des prédateurs les petits d’un oiseau non apparenté.

Être altruiste, c’est peut-être bon pour la santé !

Et si aider les autres n’était pas qu’un geste altruiste ? Une étude parue en 2006 dans Evolution and Human Behavior suggère que les comportements d’aide envers les enfants, petits-enfants, ou l’entourage plus lointain donneraient un coup de pouce à la longévité.

Les scientifiques de l’université de Bâle en Suisse ont étudié 500 personnes âgées de 73 à 103 ans. Ils ont remarqué que ceux qui prennent soin de leurs petits-enfants vivent plus longtemps que les autres : la moitié des aidants sont encore en vie dix ans après le début de l’étude, tandis que la moitié des grands-parents moins dévoués décèdent dans les cinq ans.

En l’absence de petits-enfants, l’aide apportée directement aux enfants, comme les tâches ménagères, a les mêmes effets sur la longévité. Un comportement pro-social des grands-parents envers les enfants et petits-enfants permettrait de montrer l’exemple de l’altruisme pour les générations futures et d’inscrire ce modèle dans leur système nerveux et hormonal.

Attention, cependant, il se peut aussi que les différences s’expliquent parce que seuls les grands-parents en bonne santé peuvent s’occuper de leurs petits-enfants, parce que les personnes en mauvaise santé ont moins d’enfants et donc de petits-enfants, moins de contacts, moins d’activités …

Selon des chercheurs américains, le sentiment de bien-être agit sur nos gènes et booste notre système immunitaire. Mais le bonheur se différencie en deux types différents et seul l’altruisme serait capable d’influencer l’épigénome humain.

Le système immunitaire des personnes altruistes se révèle plus développé que celui de personnes ressentant un bien-être hédonique (c’est-à-dire qui consiste à cultiver ses propres émotions afin de se sentir heureux), révèlent les chercheurs dans leur étude publiée par la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences (Pnas).

Concrètement, après avoir effectué des prélèvements sanguins sur 80 volontaires en bonne santé, les chercheurs ont observé que le génome humain semble répondre à un état psychologique positif. En cas d’altruisme, les gènes inflammatoires baissent et les gènes antiviraux augmentent, afin de protéger le corps.

Altruisme efficace


La phrase « C’est l’intention qui compte » paraît sympathique, mais elle est en fait moralement peu défendable. Nos actions altruistes doivent être mesurées à l’aune de leur efficacité. Les altruistes efficaces défendent l’idée qu’il faut estimer le rapport « coût – bénéfice » de nos actions pour les autres. Ainsi apporter de la nourriture valant une certaine somme peut être moins altruiste que d’investir la même somme pour une meilleure production agricole par des paysans.

Dans le domaine de la santé, le financement de soins et de médicaments pour diminuer les effets de maladies liées au vieillissement est un acte utile, mais moins que le financement de recherches permettant de mettre fin à ces maladies.

Évidemment, le résultat de ces investissements n’est pas certain et l’avantage est à plus long terme. Le plus souvent, les altruistes efficaces investissent dans des projets assez facilement mesurables et donc pas pour des efforts globaux comme ceux de la recherche. Pourtant les avantages d’avancées globales sont considérables. Un euro pour des soins dans une maison de retraite bénéficiera à quelques personnes. Un euro pour une thérapie pour une vie en bonne santé peut bénéficier à tous.

Le devoir d’altruisme

Aider son prochain dans certaines circonstances est un devoir pour la plupart des courants philosophiques et religieux. C’est aussi une obligation légale chaque fois qu’une personne est en danger dans certains pays comme la France ou l’Allemagne. Cela s’appelle le devoir d’assistance à personne en danger.

Il est arrivé que des personnes soient poursuivies pour ce type de délit parce qu’elles n’avaient pas agi correctement compte tenu des progrès scientifiques. Si la demande et la pression sociale devenaient suffisamment fortes, nous pourrions de même considérer que ne pas investir pour des recherches pour la longévité en bonne santé est un délit. L’État, au moins, pourrait être sommé, juridiquement, voire constitutionnellement, de faire ces investissements (de la même manière qu’il est aujourd’hui sommé de garantir la santé des citoyens).

À noter que le fait que le résultat de l’assistance est incertain n’exonère pas du devoir. Une personne qui refuse d’aider un blessé ne pourra pas se justifier en disant qu’il serait de toute façon probablement mort. Donc le fait que le résultat de recherches soit incertain, ne signifie pas l’absence d’obligation.

La jurisprudence considère généralement que seul l’effet nécessitant une action immédiate doit être considéré. Mais cela pourrait changer.

Altruisme à long terme

Beaucoup de citoyens, notamment écologistes, insistent à raison sur le souci des générations futures. En fait, il s’agit aussi des générations actuelles, car les changements climatiques et les pollutions auront déjà des impacts  de notre vivant. Ils en ont même déjà aujourd’hui. Mais la préoccupation, l’altruisme pour le futur, c’est aussi offrir une vie en meilleure santé et beaucoup plus longue aux enfants qui naîtront demain. 

Enfin, nous pourrions dire qu’il y a même une forme d’altruisme vis-à-vis de cet autrui qui est soi-même à long terme. Beaucoup de nos comportements sont un choix entre intérêt à court terme (« mal » manger, fumer, se distraire…) et intérêt à long terme (faire de l’exercice, étudier,…). Le choix de travailler pour une vie plus longue en meilleure santé est à mon sens un altruisme pour son moi futur.


Bonne nouvelle du mois. Potentialités des thérapies géniques.


C’est le patrimoine génétique qui détermine assez précisément la durée maximale de vie d’un humain, de tout autre mammifère et de la plupart des animaux. Les potentialités des thérapies géniques pour la longévité s’étendent et se précisent. Le célèbre scientifique Georges Church a donné une interview à ce sujet pour l’organisation Lifespan.io.

Pour en savoir plus :

La mort de la mort N° 148. Juillet 2021. Les Biomarqueurs et Longévité

“Les biomarqueurs profonds du vieillissement mis au point à partir de divers types de données sur le vieillissement font progresser rapidement l’industrie des biotechnologies de la longévité. L’utilisation de biomarqueurs du vieillissement pour améliorer la santé humaine, prévenir les maladies liées à l’âge et prolonger la durée de vie en bonne santé est désormais facilitée par la capacité d’acquisition de données qui s’accroît rapidement et par les progrès récents de l’IA. Elles offrent un grand potentiel pour changer non seulement la recherche sur le vieillissement, mais aussi les soins de santé en général », a déclaré Polina Mamoshina, scientifique chez Insilico Medicine.

Thème du mois : Les biomarqueurs et la longévité

Un biomarqueur est une caractéristique biologique mesurable liée à un processus normal ou non.

Dans le domaine médical, un marqueur biologique peut être n’importe quel indicateur biologique mesurable. Ils peuvent être quantitatifs ou qualitatifs. Les biomarqueurs qualitatifs pourraient être impliqués dans la détection d’un processus pathogène dans le cadre d’une analyse oui/non, tandis que les biomarqueurs quantitatifs sont impliqués dans la détection d’un processus pathogène avec un effet de seuil. La plupart des diagnostics sont basés sur des marqueurs biologiques.

Les biomarqueurs et le vieillissement

Les biomarqueurs suscitent un intérêt croissant, ils permettent la mesure du vieillissement, non pas ponctuellement (comme c’est le cas avec l’âge biologique), mais de manière suivie donnant lieu à une mesure nouvelle: le rythme du vieillissement. Les chercheurs ont résumé les biomarqueurs du vieillissement, en différentes sous-catégories :

Les biomarqueurs dit “critères génétiques

L’apparition de mutations somatiques d’ADN au cours du vieillissement laisse supposer que la mesure de l’instabilité génomique (la perte de la possibilité de réparation de l’ADN au cours des divisions cellulaires) pourrait être un biomarqueur du vieillissement.

Concernant la longueur des télomères, celle-ci est diminuée avec le vieillissement. Le raccourcissement des télomères s’explique par une diminution de l’activité de la télomérase. La mesure de l’activité enzymatique de la télomérase dans les cellules humaines pourrait être informative pour évaluer le vieillissement.

La sénescence cellulaire, c’est-à-dire la « mise en pause » de certaines cellules en réponse à un dommage cellulaire, un mécanisme de protection qui, tout au long du vieillissement, est de plus en plus utilisé. La mesure de la sénescence cellulaire est fiable et informative pour évaluer le vieillissement biologique.

L’augmentation du nombre de modifications épigénétiques telles que la méthylation de l’ADN, la modification des histones, la présence d’ARN non codant, apparaissent au cours du vieillissement. Ces mesures, appelées « horloges épigénétiques » ont notamment été étudiées par Steve Horvath.

La réparation des dommages cellulaires (macromolécules endommagées, organites) est un processus clé dans le maintien de l’intégrité cellulaire et les fonctions cellulaires. La capacité d’autophagie diminue avec l’âge, ce qui entraîne l’accumulation de protéines endommagées non fonctionnelles. Évaluer les mécanismes de réparation, de recyclage, et d’élimination de macromolécules endommagées, pourrait permettre de mesurer le vieillissement biologique.

La dysfonction mitochondriale, c’est-à-dire un affaiblissement des mécanismes de production d’énergie dans nos cellules et de la capacité à gérer le stress oxydant par les mitochondries sont d’autres marqueurs intéressants.

Enfin, l’évaluation de l’épuisement des cellules souches, du dérèglement de détection des nutriments, et de l’altération de la communication intercellulaire, pourraient également être des biomarqueurs utiles pour évaluer le vieillissement d’un individu.

Les biomarqueurs dit « critères biologiques

Des niveaux anormaux de ces « marqueurs » indiquent un vieillissement accentué de l’organisme et ils sont, pour la plupart, liés à une moins grande longévité et à un risque de maladie plus élevé.

Grâce à un bilan anti-âge, il est possible d’évaluer le stade de son vieillissement. Ces biomarqueurs sont classés selon les fonctions les plus souvent altérées dans le vieillissement :

Glycémie et insulino-résistance

Le vieillissement est associé à un dérèglement du métabolisme du glucose. Des troubles de régulation de la glycémie (taux de sucre sanguin) et des pics d’insuline sont souvent présents dans les phénomènes liés au vieillissement.

Les biomarqueurs comme l’hémoglobine glyquée (HbA1c), le taux d’insuline à jeun, l’index HOMA (= insuline*glucose / 22.5)… sont des indicateurs reflétant l’état général de glycation des tissus, phénomène majeur du vieillissement.

Adiponectine : cette hormone découverte récemment est corrélée avec les mécanismes de l’inflammation. Les études ont montré qu’elle baissait régulièrement avec l’avancée en âge et a des liens étroits avec l’apparition du syndrome métabolique, du diabète, de l’athérosclérose et de la stéatose hépatique non alcoolique.

– Vitamines et minéraux

Vitamine D : une étude faite sur 10 populations différentes a montré que des niveaux de vitamine D plutôt élevés étaient liés à une diminution du risque de mortalité toutes causes confondues. Les maladies liées au vieillissement et à la vitamine D incluent ostéoporose et Alzheimer.

Vitamine B12 : les niveaux de vitamine B12 baissent souvent après 50 ans. Un taux bas est corrélé dans les diverses études à un risque plus élevé de dysfonction cognitive, de démence et de maladie des artères coronaires.

Calcium : il est démontré que l’avancée en âge est souvent liée à un déficit calcique (menant entre autres à l’ostéoporose). Ce déficit serait dû aux carences en vitamine D et aussi à une diminution de l’absorption intestinale du calcium.

Zinc : la déficience en zinc est fréquente chez le sujet âgé, due à des carences alimentaires et/ou à une moins bonne absorption intestinale. Elle conduit à des phénomènes similaires à ceux observés avec l’inflammation oxydative de l’âge et de l’immuno-sénescence (dégradation des défenses).

Sélénium : Un taux sanguin de sélénium élevé est corrélé généralement dans les études avec des diminutions de risque de cancer.

Albumine : plus connue comme marqueur biologique de dénutrition protéino-énergétique, c’est aussi un marqueur du vieillissement qui a tendance à baisser avec l’âge.

Créatinine et urée : elles permettent d’évaluer un affaiblissement de la fonction rénale.

L’inflammation chronique, qui augmente généralement avec l’âge, est le champ le mieux étudié dans l’immuno-sénescence. Des taux plasmatiques élevés de leucocytes, l’interleukine 6 (IL-6) et TNF-α (Facteur de nécrose tumorale) sont corrélés à une perte de force de préhension.

La protéine C réactive (CRP) ultra-sensible : ce marqueur de l’inflammation est corrélé à la durée de vie selon une étude sur 90000 personnes. Des niveaux plus bas de CRP sont associés à une meilleure longévité.

– Hormones

Testostérone : les niveaux de testostérone baissent régulièrement en vieillissant.

IGf-1 (facteur de croissance 1 ressemblant à l’insuline) : le marqueur de l’hormone de croissance. Sa baisse est associée au vieillissement, appelée la « somatopause ».

La globuline liant les hormones sexuelles (SHBG, pour Sex Hormone-Binding Globulin) : en vieillissant, le taux de SHBG augmente d’environ 1% par an. La baisse des androgènes et l’excès d’oestrogènes augmentent la production de SHBG par le foie.

Cortisol : le taux de cortisol, l’hormone du stress produite par les glandes surrénales, est corrélé aux maladies liées à l’âge. Plus sa sécrétion est anormale et plus le métabolisme du glucose est perturbé.

La déhydroépiandrostérone (DHEA) : le sulfate de DHEA est bien connu pour la diminution de son taux sanguin avec l’âge dans les deux sexes à partir de la trentaine. Une étude a rapporté une baisse moyenne de 5,2% par an.

Prégnénolone : elle baisse généralement avec l’âge, surtout entre 35 et 50 ans où son taux chute fréquemment de 60% ou plus. La prégnénolone permet une meilleure résistance au stress et est très impliquée dans les fonctions cognitives et la mémoire.

– Lipides et acides gras

Les perturbations dans les lipides sanguins sont parmi les marqueurs les plus fiables des risques cardiovasculaires et de mortalité. Les triglycérides et le cholestérol seront donc des marqueurs classiques dans le suivi du vieillissement.

Les radicaux libres peuvent créer des dommages sur notre ADN par oxydation des bases nucléiques. Ces réactions laissent des traces : un fragment de base oxydée appelée 8-hydroxy-2-deoxy-guanosine (8-OHdG).

Les biomarqueurs dit “critères physiques

On ne se réveille pas un matin avec les cheveux gris et une canne. La vieillesse est un long processus fait de changements biologiques.

– Les sens

La perte de l’autonomie survient généralement après 70 ans. Elle s’explique par des changements cognitifs, physiologiques, musculaires et articulaires et dont les premiers symptômes apparaissent entre 40 et 50 ans.

Le premier signe est la presbytie. À 44 ans en moyenne, la vue est affectée par une perte de l’accommodation entre la vision de loin et la vision de près. Vers 60 ans, c’est l’audition qui est touchée : la presbyacousie. 34% des plus de 60 ans ont des difficultés à entendre. Ce sont les trois autres sens qui sont ensuite altérés : le toucher, le goût et l’odorat.

– Le physique et le psychique

Avec la vieillesse, la structure du cerveau et du système nerveux change. Avec l’âge, ces changements cognitifs entraînent des ralentissements psychomoteurs, une altération de l’attention ou encore de la mémoire à court terme.

La diminution des capacités physiques (force de préhension, rapidité de déplacement, …) sont des indicateurs simples et assez fiables du vieillissement.

La vieillesse entraîne encore d’autres changements physiologiques comme la prise de poids, les modifications du système pilaire (cheveux gris et calvitie), le dessèchement et la dégradation de la peau (les rides), une baisse de la résistance immunitaire ou encore la perte des dents. Même le pourcentage d’eau de notre corps diminue.

Améliorer les indicateurs est-il utile ?

De nombreuses thérapies ont pour objectif d’améliorer certains biomarqueurs. Par exemple les thérapies géniques pour la télomérase ou la prise de cocktails d’hormones pour combler la diminution de celles-ci liée à l’âge.

Il n’est cependant pas nécessairement établi que les indicateurs du vieillissement en soient également des influenceurs. Dans certains cas, il est très probable qu’ils en sont principalement un effet (les cheveux gris par exemple). Dans de nombreux autres cas, les thérapies visant à influencer l’indicateur devraient avoir des effets thérapeutiques. Si un indicateur se modifie favorablement, l’impact sera dans une certaine mesure favorable à la longévité en bonne santé.

Nous avons de plus en plus d’informations concernant les biomarqueurs et la manière dont nos actions, thérapies, … les influencent. Des expérimentations nouvelles ne sont pas toujours nécessaires pour mieux les comprendre. Nous pouvons utiliser les immenses ressources de mesures de santé déjà disponibles par des études rétrospectives et par le suivi des thérapies en cours. Plus nous les utiliserons rigoureusement, plus les progrès vers la longévité seront aisés à évaluer et à réaliser.

Nombreuses bonnes nouvelles du mois.

Aubrey de Grey, le dirigeant emblématique de SENS, l’organisation la plus renommée et probablement la plus efficace dans le domaine de la lutte contre le vieillissement, a annoncé la réception de dons pour un montant total d’environ 20 millions de dollars, plusieurs fois le budget annuel de l’organisation.

Laurent Simons, surdoué belge qui vient d’obtenir son diplôme universitaire à 11 ans a comme but ultime: permettre l' »immortalité » notamment de ses grands-parents ». Et c’est pour cela qu’il étudie! 

Vitalik Buterin, développeur de la crypto-monnaie Ethereum et jeune milliardaire surdoué, annonce publiquement sa passion et ses investissements pour la longévité.

L’organisation BioViva présentée par Elisabeth Parrish, annonce une expérience de thérapie génique donnant d’excellents résultats pour la longévité de souris.

Le Royaume-Uni annonce dans un document officiel intitulé « Life Science Vision » : <<[…] il existe désormais une abondante littérature sur les voies et cibles potentielles qui pourraient être utilisées pour s’attaquer à la cause la plus inévitable de maladie dans les populations humaines.>> (traduction) ».

Les États-Unis précisent l’objectif déclaré par Joe Biden de développer un organisme qui s’attaquera aux maladies de manière innovante. Le nom de ce futur organisme est ARPA-H (Advanced Research Projects Agency for Health).

Pour en savoir plus :

La mort de la mort. N° 147 Juin 2021. Records de longévité des organismes vivants

Le scientifique Shin Kubota exprime sa vision dans le New York Times: “l’application de Turritopsis pour les êtres humains est le rêve le plus merveilleux de l’humanité. Une fois que nous aurons déterminé comment la méduse se rajeunit, nous devrions réaliser de très grandes choses. Mon opinion est que nous allons évoluer et devenir nous-mêmes immortels.” (Traduction, 28 novembre, 2012)


Thème du mois : Records de longévité des organismes vivants


Tortue des Galapagos

Comment comprendre les durées de vie les plus longues ? Et pourquoi?

La durée de vie maximale des êtres vivants est extrêmement variable selon les espèces. Globalement, pour les animaux, la durée de vie maximale est plus longue avec un ou plusieurs des facteurs favorables suivants (par ordre d’importance) :

  • Les prédateurs sont rares 
  • Le métabolisme est lent 
  • La taille est grande

Les différences de durées de vie peuvent être énormes entre des espèces biologiquement assez proches. C’est une des raisons d’envisager un jour une thérapie génique ou un autre traitement médical pour augmenter considérablement la durée de vie maximale de l’humain.

Cette lettre reprend des cas connus de longévité extrêmes. Évidemment, dans ces cas de très longue durée, seules des mesures indirectes et parfois contestables sont envisageables.

Le rat-taupe nu et la chauve-souris, une longévité exceptionnelle et pas de cancer ! (35-40 ans)

La longévité des rats-taupes nus étonne surtout quand on la compare à celle d’autres rongeurs en captivité de taille équivalente. Les rats-taupes nus ne devraient pas vivre plus de six ans. Or, le plus vieux rat-taupe nu connu en laboratoire a… 35 ans ! Et, parmi certains de ses congénères qui ont plus de 30 ans, des femelles restent encore fertiles.

Des chercheurs ont découvert pourquoi le rat-taupe nu était à l’abri du cancer. C’est grâce à l’acide hyaluronique, une molécule qui empêcherait la formation de tumeurs dans l’organisme. Selon les chercheurs Vera Gorbunova et Andrei Seluanov, qui ont publié leurs résultats dans la revue Nature, la masse moléculaire de l’acide hyaluronique chez le rat-taupe nu est cinq fois supérieure à celle de la souris.

Le minuscule murin de Brand (espèce de chauve-souris), avec ses sept grammes, taquine les quarante printemps. Le grand murin (Myotis myotis), cinq fois plus lourd, en fait autant. Une équipe internationale s’est lancée dans une étude longitudinale de huit ans. Ses résultats, publiés dans la revue Nature Ecology & Evolution ouvrent des pistes prometteuses pour la recherche sur le vieillissement.

Insecte ayant la plus longue vie : la reine des termites (50 ans)

On pense normalement aux insectes comme vivant moins d’une année à l’état adulte. Cependant, les reines termites, protégées des prédateurs, peuvent atteindre 50 ans.

Oiseaux. L’albatros peut vivre jusqu’à 80 ans

Les albatros sont les oiseaux marins les plus grands du monde : l’albatros hurleur atteint ainsi les 3,50 mètres d’envergure ! Leur longévité est également remarquable, puisqu’ils peuvent vivre jusqu’à 80 ans. Wisdom, une albatros de 70 ans a encore pondu. Un perroquet (cacatoès) a également atteint un âge similaire (82 ans).

Amphibien le plus ancien : la salamandre des cavernes (100 ans)

Les naturalistes attribuent la longévité de la salamandre aveugle Proteus. anguinus à son métabolisme inhabituellement lent, cette salamandre met 15 ans à mûrir, s’accouple et pond ses œufs seulement tous les 12 ans environ, et bouge à peine, sauf lorsqu’elle cherche de la nourriture. De plus, les grottes humides du sud de l’Europe où elle vit sont pratiquement dépourvues de prédateurs, permettant à P. anguinus de dépasser 100 ans à l’état sauvage.

Reptiles : Les célèbres tortues des Galápagos

En 2012, mourait «George le solitaire» à plus de 100 ans. Six ans après sa disparition, le centenaire a refait parler de lui grâce aux révélations des chercheurs de Yale étudiant son génome ! George était le dernier représentant d’une espèce endémique d’une île Galápagos. Il a toujours boudé tout accouplement en captivité. 

Les scientifiques de l’Université qui avaient séquencé son génome de son vivant ainsi que celui d’une autre espèce de tortue géante ont révélé les résultats dans la revue Nature. Les biologistes ont détaillé chez ces tortues 891 gènes, impliqués dans la fonction du système immunitaire. Ils montrent que ces animaux ont développé des copies supplémentaires de gènes qui leur permettent de mieux répondre au stress oxydant, connu pour être un facteur important du vieillissement. Ils ont aussi découvert un gène qui permet aux cellules de mieux se défendre contre des cellules étrangères, des gènes suppresseurs de tumeurs qui sont plus nombreux que chez la plupart des vertébrés et d’autres qui sont impliqués dans la réparation de l’ADN.

L’étude du vieillissement chez les animaux est une source de connaissance pour l’être humain. Les chercheurs ont trouvé quelques similitudes entre le génome des tortues et celui des centenaires.

Jeanne Calment avec ses 122 ans est la personne qui a vécu le plus longtemps dans l’histoire de l’humanité…, mais certes pas de quoi impressionner une vieille tortue. La tortue qui a vécu le plus longtemps semble avoir atteint 189 ans.

Les sphénodons sont d’autres reptiles qui peuvent dépasser le siècle.

Poissons : 150 ans pour l’hoplostèthe orange (Hoplostethus atlanticus)

Hoplostethus atlanticus est appelé « poisson-montre ». L’animal habite les océans du globe à des profondeurs comprises entre 900 et 1 800 mètres, notamment dans les canyons sous-marins.

L’espèce n’atteint sa maturité sexuelle qu’entre 20 et 30 ans, ce qui pourrait s’expliquer par un taux de prédation faible et la rareté des proies dans les abysses. Les adultes peuvent mesurer 75 cm de long pour un poids de 7 kg et l’âge du plus vieux spécimen connu, déterminé par radiation radiométrique des isotopes des concrétions minérales de ses oreilles internes, serait de 149 ans.

Échinodermes : 200 ans pour l’oursin rouge géant (Astropyga radiata)

Assez commun dans l’océan Indien et dans une partie de l’océan Pacifique, cet échinoderme doit son appellation à sa couleur et à sa taille pouvant atteindre près de 20 cm de diamètre, la plus grande connue parmi les espèces d’oursins. Certains individus ont atteint l’âge de 200 ans.

Mammifères : 200 ans pour la baleine boréale (Balaena mysticetus)

Vivant dans les eaux arctiques, la baleine boréale est un cétacé mesurant jusqu’à 20 mètres pour un poids d’une centaine de tonnes. Sa longévité a été estimée à plus de 200 ans grâce à des cicatrices laissées par d’anciennes blessures causées par des chasseurs de baleines. Cette longévité exceptionnelle pourrait s’expliquer par certains gènes. Par exemple, l’analyse du génome de la baleine montre des mutations uniques dans le gène ERCC1 impliqué dans la réparation de l’ADN endommagé. Un autre gène, appelé PCNA et associé à la croissance cellulaire et à la réparation de l’ADN, contient une section d’ADN dupliquée. Cette duplication pourrait ralentir le vieillissement du cétacé.

Requins : 400 ans pour le requin du Groenland (Somniosus microcephalus)

Ce requin gris, plutôt dodu, mesurant cinq mètres, vit dans les eaux de l’océan Arctique et serait le champion de la longévité chez les vertébrés. Sa croissance est estimée à environ 1 cm par an.

Dans un article paru dans Science, une équipe internationale de chercheurs décrit comment ils ont réussi à mesurer l’âge de 28 requins du Groenland. Les résultats ont révélé que le plus grand requin, une femelle de plus de cinq mètres de long, avait 392 ans, avec cependant une marge d’erreur importante de plus ou moins 120 ans. La maturité sexuelle des femelles serait atteinte à l’âge de 150 ans environ.

D’après cette recherche de Julius Nielsen à l’Université de Copenhague, parue en août 2016, le requin du Groenland serait donc le vertébré qui vivrait le plus longtemps.

Mollusque le plus ancien: The Ocean Quahog (500 ans)

Des scientifiques ont déterminé que le quahog de l’océan, Arctica islandica , peut littéralement survivre pendant des siècles, comme l’a démontré un individu, Ming, qui a dépassé la barre des 500 ans (vous pouvez déterminer l’âge d’un mollusque en comptant les anneaux de croissance dans sa coquille).

Arbres. Le Séquoia géant : plus de 3000 ans !

Certains arbres semblent n’avoir aucun mécanisme de sénescence. Ils restent aussi fertiles à l’âge de plusieurs siècles que dans leur jeunesse.

Le Séquoia géant se caractérise par sa longévité puisqu’il peut atteindre plus de 3 000 ans. 

De nombreuses autres espèces d’arbres peuvent vivre durant des siècles : les oliviers, les chênes. Le record absolu semble détenu par un pin de Bristlecone de 5 000 ans.

Enfin, les arbres comme d’autres végétaux peuvent se multiplier de façon clonale et former un organisme collectif. Dans ce sens, la colonie clonale de peupliers faux-trembles Pando est, à 80 000 ans, un des organismes les plus anciens de la planète.

Organismes microscopiques : endolithes (10 000 ans)

Déterminer la durée de vie d’un organisme microscopique est une question délicate : en un sens, toutes les bactéries sont immortelles, car elles propagent leur information génétique en se divisant constamment (plutôt que des relations sexuelles et des morts de vieillissement).

Le terme «endolithes» fait référence aux bactéries, champignons, amibes ou algues qui vivent profondément sous terre dans les fentes des roches. 

Des études ont montré que les individus de certaines de ces colonies ne subissent une division cellulaire qu’une fois tous les cent ans et peuvent avoir une durée de vie de l’ordre de 10 000 ans. 

Techniquement, cela diffère de la capacité de certains micro-organismes à se remettre de la stase ou de la congélation après des dizaines de milliers d’années; dans un sens significatif. Les endolithes sont continuellement «vivants», bien que peu actifs. Peut-être plus important encore, les endolithes sont autotrophes, ce qui signifie qu’ils alimentent leur métabolisme non pas avec l’oxygène ou la lumière du soleil, mais avec des produits chimiques inorganiques, qui sont pratiquement inépuisables dans leurs habitats souterrains.

L’immortalité biologique du homard, des hydres, des éponges et des coraux

Un petit nombre d’animaux multicellulaires semblent n’avoir aucun mécanisme de sénescence. Ils ne se dégradent pas en avançant en âge. Par exemple, leur fertilité reste constante, voire augmente.

Les hydres, comme tous les cnidaires peuvent se régénérer, ce qui leur permet de se remettre d’une blessure et de se reproduire de manière asexuée. Toutes les cellules de l’hydre se divisent continuellement. Il a été suggéré que les hydres ne subissent pas de sénescence et, en tant que telles, sont biologiquement immortelles. Dans une étude de quatre ans, trois cohortes d’hydres n’ont pas montré d’augmentation de la mortalité avec l’âge.

Une espèce d’éponge peut vivre jusqu’à 11 000 ans, à savoir la Monorhaphis chuni, selon une étude américaine publiée dans la revue Aging Research Reviews en 2014.

Certains animaux coloniaux, comme les coraux, peuvent vivre plus de 4000 ans.

Les recherches suggèrent que les homards peuvent ne pas ralentir, s’affaiblir ou perdre leur fertilité avec l’âge, et que les homards plus âgés peuvent être plus fertiles que les homards plus jeunes. Cela ne les rend cependant pas immortels au sens de l’absence d’impact de la sénescence, car ils sont beaucoup plus susceptibles de mourir lors d’une mue de coquille en avançant en âge du fait de leur taille croissante. 

Leur longévité peut être due à la télomérase, une enzyme qui répare de longues sections répétitives de séquences d’ADN aux extrémités des chromosomes, appelées télomères. Contrairement aux vertébrés, les homards expriment la télomérase à l’âge adulte à travers la plupart des tissus, ce qui a été suggéré comme étant lié à leur longévité.

Il a été affirmé que certains poissons, notamment le big mouth buffalo, n’ont pas de sénescence mesurable. Cependant, à l’exception du requin du Groenland, aucun poisson capturé dont on a mesuré l’âge ne dépassait les 200 ans.

Pourquoi pas d’immortalité biologique chez les vertébrés, même ceux sans prédateurs ?

La sélection naturelle, au moins pour les vertébrés, aboutit toujours à des espèces dont les durées de vie restent limitées. Ceci peut être expliqué parce qu’une espèce animale qui serait sans vieillissement perdrait de sa diversité génétique et serait éliminée par tout changement environnemental. C’est aussi ce qui explique la reproduction sexuée : plus de mélanges génétiques, c’est plus d’adaptabilité à l’environnement. 

Mais en un certain sens, le vieillissement systématique reste quand même un mystère de l’évolution. En effet, même des salamandres ou poissons cavernicoles dans un environnement extrêmement stable (de centaines de milliers d’années) et sans prédateur ne semblent pas vivre bien au-delà du siècle.

Cnidaire : l’immortalité biologique et la réjuvénation pour la méduse Turritopsis nutricula

Petite en taille, mais longue en espérance de vie. La méduse Turritopsis nutricula ne mesure en effet que 5 mm de diamètre, mais pourrait vivre ad vitam æternam. Originaire de la mer des Caraïbes, l’espèce est de nos jours très répandue. Plusieurs spécialistes s’inquiètent de la voir proliférer sur l’ensemble du globe.

Grâce à un processus cellulaire particulier appelé transdifférenciation, l’animal est capable de stopper son vieillissement et même de rajeunir. Il est déjà connu que la meilleure façon de pousser une Turritopsis Nutricula à se régénérer est de la stresser. Par exemple, en cas de blessure, le processus s’enclenche aussitôt et en quelques jours à peine, la méduse retourne à son stade juvénile et commence une nouvelle vie.

Ce qui en fait un exceptionnel sujet d’études pour les biologistes et les généticiens et un sujet d’intérêt pour certains groupes pharmaceutiques qui envisagent déjà la production d’une crème rajeunissante contenant l’ADN de Turritopsis. « C’est comme si un papillon était capable de retourner en arrière au stade de chenille », explique Stefano Piraino, professeur à l’université du Salento, en Italie.

La dormance comme stratégie de longévité

La dormance est un terme qui regroupe toutes les formes de vie ralenties. 

Elle correspond à la période où, dans le cycle de vie d’un organisme, la croissance, le développement et/ou l’activité physique (chez les animaux) sont temporairement arrêtés. Cela réduit l’activité métabolique et aide donc l’organisme à conserver de l’énergie.

Surtout dans les milieux extrêmes, ou saisonnièrement très marqués, la dormance ne peut être une stratégie adaptative que si un stimulus permet à la graine de passer de l’état « dormant » à un état « non-dormant » est rendu possible à un « bon moment ». Et effectivement, souvent, la dormance cesse effectivement quand les conditions environnementales le permettent.

La longévité d’une graine (durée de la période pendant laquelle elle peut rester en état de vie ralentie sans perdre sa capacité à germer) est très variable. Chez les végétaux, tous les intermédiaires existent, entre la graine du lotus qui détient le record de la longévité (de l’ordre de 1000 ans) et les graines de cacaoyer, peu déshydratées, qui doivent, sous peine de mort, trouver, dans les quelques jours suivant leur maturation, les conditions permettant leur germination. Des scientifiques ont même réussi à faire germer des graines de silène (une plante à fleurs blanches) gelées depuis près de 32 000 ans dans le sous-sol sibérien ! 

Bien qu’étant coûteuse, la stratégie de dormance évite à tous les individus portant le même génotype de rencontrer simultanément un environnement peu propice à leur survie ou à leur reproduction.

Un rotifère a survécu à 24 000 ans de gel dans le permafrost arctique.

Les rotifères bdelloïdes vivent généralement dans des environnements aquatiques et ont une incroyable capacité de survie. Les scientifiques russes ont découvert ces créatures dans une carotte de sol gelée extraite du pergélisol sibérien à l’aide d’une foreuse.

Dans une étude publiée récemment dans la revue Current Biology, les chercheurs russes ont utilisé la datation au radiocarbone pour déterminer que les créatures qu’ils ont récupérées dans le pergélisol (un sol gelé toute l’année, à l’exception d’une fine couche près de la surface) avaient environ 24 000 ans.

Ce n’est pas la première fois qu’une vie ancienne est « ranimée » à partir d’un habitat gelé en permanence.

Des tiges de mousse antarctique ont été régénérées avec succès à partir d’un échantillon vieux de 1 000 ans et une fleur de campion vivante a été régénérée à partir de tissu de graine, probablement stocké par un écureuil arctique, qui avait été préservé dans un permafrost vieux de 32 000 ans. Des vers simples, appelés nématodes, ont été « ressuscités » du pergélisol en deux endroits du nord-est de la Sibérie, dans des sédiments vieux de plus de 30 000 ans.


Les bonnes nouvelles du mois : Des investissements privés pour la longévité. L’Union européenne annonce le partage généralisé des données de santé pour ses citoyens d’ici à 2025.


  • Vitalik Buterin fait un don de plus de 2 millions de dollars à la Fondation Methuselah.
  • Michael Greve, fondateur de Forever Healthy, s’engage à verser 300 millions d’euros pour faire progresser les start-ups spécialisées dans le rajeunissement.
  • Dans un document malheureusement peu diffusé, la Commission européenne annonce avoir pour objectif, d’ici à 2025, de faire en sorte que les citoyens de l’Union soient en mesure de partager leurs données de santé avec les prestataires de soins et les autorités de leur choix. Ceci signifierait si c’est suivi d’effet que les citoyens européens pourront partager aisément leurs données pour des recherches scientifiques, notamment de longévité en bonne santé.

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