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LETTRE MENSUELLE DE HEALES. LA MORT DE LA MORT. N°163. Octobre 2022. le vieillissement dans La Classification Internationale des Maladies (CIM)

J’ai grandi en Nouvelle-Zélande et j’y ai vécu jusqu’à l’âge de 12 ans. Je me souviens qu’une fois, ma grand-mère est venue nous rendre visite et je n’avais jamais traîné avec quelqu’un de plus de 60 ans auparavant. Quand elle est arrivée, je me souviens avoir réalisé pour la première fois que lorsque je jouais avec mon frère, je pouvais courir partout et faire des cabrioles, mais que pour ma grand-mère, le simple fait de se lever d’une chaise était vraiment douloureux pour elle et cela m’a fait comprendre qu’elle avait une maladie et que nous devrions essayer de trouver un moyen de la guérir pour qu’elle puisse venir jouer avec nous, « Ils m’ont répondu « tu ne comprends pas que c’est un processus naturel » et quand j’étais enfant, j’ai pensé que c’était stupide. Pourquoi est-ce un processus naturel que nous devions tous avoir cette maladie? Laura Deming, chercheuse en biologie, Sommet HT 2017 (traduction).


Le thème du mois : Le vieillissement dans la Classification Internationale des Maladies (CIM)


Qu’est-ce qu’une maladie et qu’est-ce que la classification internationale des maladies ?

On appelle maladie un effet négatif sur le fonctionnement du corps d’un organisme et sur sa structure pendant une période prolongée. Les maladies s’accompagnent d’un ensemble de signes et de symptômes et peuvent avoir une cause externe (due à un agent pathogène) ou interne (dysfonctionnement du système immunitaire). Ce qui est considéré comme une maladie change avec les connaissances médicales, mais aussi avec les évolutions sociales et culturelles. Historiquement, certaines régions pauvres considéraient l’obésité comme un signe de richesse mais, dans le monde d’aujourd’hui, nous la considérons comme une maladie complexe. Dans un contexte similaire, l’homosexualité était également considérée comme une « maladie mentale ». Mais, en 1973, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) a supprimé « l’homosexualité égo-syntonique ».

En 1893, la classification de Bertillon des causes de décès a été présentée au congrès de l’Institut international de statistique à Chicago par le médecin français Jacques Bertillon, puis adoptée par plusieurs autres pays. Ce système reposait sur le principe de la « distinction entre les maladies générales et celles localisées à un organe ou à un site anatomique particulier ». La première édition a été publiée en 1900 et, jusqu’à la sixième version, très peu de changements ont été apportés. Dans la 6e édition, qui est parue en 1949, le titre a été modifié pour refléter les changements : Classification statistique internationale des maladies, traumatismes et causes de décès (CIM, en anglais ICD). À partir de ce moment, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a commencé à préparer et à publier les versions révisées de la CIM tous les 10 à 15 ans.

Le vieillissement est-il une maladie pour la CIM ?

La question de savoir si le vieillissement est une maladie ou non est controversée.

Le vieillissement tue lentement tous les humains du monde (qui ne meurent pas d’autres causes). Savoir si c’est une maladie ou non est en fait une question sémantique. Ce qui est sûr, c’est qu’il est la cause commune de toutes les maladies liées à l’âge et un facteur aggravant de presque toutes les maladies.

La CIM-10 (en 1990) comprenait déjà le code R54 pour la débilité physique liée à l’âge, R41.81 pour le déclin cognitif lié à l’âge et F03 pour la psychose sénile.

Dans la onzième et dernière version de la CIM, des codes ont été introduits pour une meilleure compréhension des maladies. Dans ce cadre, le code XT9T se référait à « lié à l’âge » et le code MG2A, au « Vieillissement », qui a ensuite été remplacé par « Déclin des capacités intrinsèques lié à l’âge » après avoir été critiqué.

Un groupe de scientifiques d’Amérique latine s’est en effet opposé à l’idée d’inclure le terme général de « vieillesse » en tant que maladie, craignant de renforcer les croyances « âgistes » largement répandues dans la société ainsi que chez les professionnels de la santé mentale et de la médecine. Ils soutiennent que le vieillissement peut conduire à certaines affections médicales ou mentales chroniques, mais que d’autres facteurs jouent un rôle beaucoup plus important dans la causalité de la maladie que l’âge lui-même. Selon eux, la fragilité est une entité clinique beaucoup plus homogène et mieux définie.

L’âgisme peut effectivement être un problème dans de nombreuses sociétés, mais l’immense majorité des souffrances dues au vieillissement proviennent de maladies et d’infirmités dues à la sénescence auxquelles nous ne pouvons pas encore échapper.

D’un autre côté, un grand groupe de scientifiques a ainsi fait valoir que le fait de classer le vieillissement comme une maladie avec un ensemble de codes « sans déchets » donnera lieu à de nouvelles approches et à de nouveaux modèles commerciaux pour aborder le vieillissement comme une condition traitable, ce qui entraînera des avantages à la fois économiques et sanitaires pour tous. Cela facilitera également la réalisation d’essais cliniques pour les chercheurs, car de nombreux pays suivent strictement la liste de la CIM pour les autorisations. Une fois qu’une maladie est reconnue dans cette classification, il est plus facile pour les scientifiques de faire financer leurs recherches. 

Le terme « vieillesse » peut être un terme âgiste, mais les processus pathologiques du vieillissement sont un facteur de risque majeur. Il est donc important de travailler sur le développement de thérapies nouvelles et améliorées, dans le but de ralentir et d’inverser les dommages causés par le vieillissement.

Ce qui est maintenant reconnu

La liste suivante des codes relatifs au vieillissement qui sont inclus dans la CIM-11 a été réalisée par Daria Khaltourina. XT9T est codé pour le vieillissement et est en combinaison avec les codes d’autres maladies. Cette longue liste peut être utile aux chercheurs qui souhaitent lancer des essais cliniques dans un domaine spécifique du vieillissement.

  • 3C0Y/Z&XT9T- Autres maladies spécifiées/non spécifiées du sang ou des organes hématopoïétiques liées au vieillissement
  • 4A20.Y/Z&XT9T- Autres immunodéficiences acquises spécifiées/non spécifiées liées au vieillissement (probablement le plus utile pour les essais cliniques)
  • 9E1Y/Z&XT9T- Autres maladies du système visuel spécifiées/non spécifiées liées au vieillissement
  • AC0Y/Z&XT9T- Autres maladies précisées/non précisées de l’oreille ou de l’apophyse mastoïde liées au vieillissement
  • BA00&XT9T- Hypertension essentielle liée au vieillissement
  • BA01&XT9T- Cardiopathie hypertensive liée au vieillissement
  • BA02&XT9T- Maladie rénale hypertensive liée au vieillissement
  • DE2Y/Z&XT9T- Autres maladies spécifiées/non spécifiées de l’appareil digestif liées au vieillissement
  • CB7Z&XT9T- Maladies du système respiratoire liées au vieillissement
  • BA80&XT9T- Athérosclérose coronaire liée au vieillissement
  • GA31.1&XT9T- Infertilité féminine secondaire liée au vieillissement
  • 8A00.2&XT9T- Syndrome de type parkinsonien lié au vieillissement/parkinsonisme secondaire
  • 8A03.3&XT9T- Ataxie acquise liée au vieillissement, non spécifiée
  • FA01&XT9T- Arthrose du genou liée au vieillissement
  • 2F34&XT9T- Tumeur bénigne des organes génitaux masculins liée au vieillissement
  • GB04.Z&XT9T- Infertilité masculine liée au vieillissement, non spécifiée.
  • EE40.31- Fragilité de la peau liée à l’âge 
  • EJ20-  Photovieillissement de la peau
  • MB21.0- Déclin cognitif associé à l’âge
  • EE40.Y- Autre atrophie ou dégénérescence spécifiée du tissu conjonctif dermique ou sous-cutané
  • 9B10.0- ataracte liée à l’âge
  • 9B75.0- Dégénérescence maculaire liée à l’âge
  • MG2A- Vieillissement – Diminution de la capacité intrinsèque liée au vieillissement

Conclusion

La CIM est importante car elle fournit un cadre commun pour l’enregistrement et le suivi des maladies de manière universelle entre différents pays, régions et hôpitaux. Cela facilite le partage et l’analyse de ces données à l’échelle mondiale.

L’OMS a estimé que « le dialogue a permis de trouver une voie à suivre dans ce domaine » et a affecté un processus spécifique à l’examen du terme « vieillesse ». Cet examen a conduit au retrait du terme « vieillesse » en tant que titre de catégorie et liste d’index de la CIM-11. Il a été remplacé par « déclin des capacités intrinsèques associé au vieillissement ». De plus, l’utilisation du terme « pathologique » comme code d’extension (XT9T) pour décrire le processus normal du « vieillissement » a été remplacé par le terme « biologique », beaucoup plus approprié.

Cette inclusion a été réalisée dans une large mesure grâce à la défense de la longévité, en particulier grâce à l’action menée depuis des années par l’International Longevity Alliance et ses principaux militants.

Ainsi, le vieillissement fait désormais partie de la CIM et peut être traité officiellement comme une condition médicale.


La bonne nouvelle du mois: Aubrey de Grey annonce  des « essais de rajeunissement » sur des souris


Le célèbre biogérontologue Aubrey de Grey’s a été interviewé par Phil Newman, rédacteur en chef de Longevity.Technology. Il a annoncé sa nouvelle fondation qui va commencer des « essais de rajeunissement » sur des rats.

Des interventions combinées et innovantes sur des souris âgées de 18 mois devraient être lancées. L’objectif est de doubler la durée de vie restante.

C’est une excellente nouvelle. En cas de succès, ce type d’expérimentation offre la preuve parfaite de l’efficacité d’une thérapie de longévité sur un modèle animal.


Pour plus d’informations

LETTRE MENSUELLE DE HEALES. LA MORT DE LA MORT. N°162. Septembre 2022. Les jumeaux numériques pour la résilience et la longévité.

Il est tout à fait envisageable que certaines personnes vivant aujourd’hui ne voient aucune limite supérieure (de durée de vie). Et il est tout à fait possible que certains d’entre nous dans cette conversation aujourd’hui voient 150, 200 ans. Et à ce moment-là (…) notre technologie sera si avancée qu’elle continuera simplement à progresser. George Church. Généticien. Longevity Mindset: Proof of Age Reversal (Traduction). Octobre 2020.


Thème du mois:  Les jumeaux numériques pour la résilience et la longévité.


Un jumeau numérique est défini comme un ensemble de constructions d’informations virtuelles qui imitent la structure, le contexte et le comportement d’un actif physique individuel ou unique, qui est dynamiquement mis à jour avec les données de son jumeau physique tout au long de son cycle de vie, et qui, en fin de compte, informe pour les décisions. C’est une représentation virtuelle d’un bien physique connecté et englobe l’ensemble du cycle de vie du produit.

Sa valeur découle de la capacité à déplacer le travail d’un environnement physique vers un environnement virtuel ou numérique et de la possibilité de prévoir l’état à l’avenir, ou lorsque cela n’est pas souhaitable physiquement, en exploitant le modèle numérique.

Dans les recherches de santé, pour qu’un double virtuel soit utile, il est nécessaire que suffisamment de données de la personne physique soient disponibles. Outre tous les marqueurs changeant peu ou pas (taille, poids, groupe sanguin…) ainsi que tous les indicateurs sociaux et de comportement (travail, alimentation,…), des dispositifs portables (« wearables« ) sont extrêmement utiles. À moyen terme, des capteurs nouveaux peu invasifs, internes et externes, pourraient être envisagés pour mesurer par exemple la digestion, la respiration, les excrétions…

Une modélisation tridimensionnelle peut être utilisée pour visualiser les compagnons numériques. Lorsque le système a été vérifié, des simulations informatiques de situation de santé et des comparaisons sont possibles.

Applications envisageables pour les personnes elles-mêmes

  • Aide à la décision en matière de diagnostic et de traitement
  • Surveillance des patients par les dispositifs portables avec « projection » des conséquences futures, par exemple, des battements de coeur anormaux prédicteurs d’un arrêt cardiaque.
  • Simulation de chirurgie – évaluation du risque chirurgical
  • Simulation des effets de modification de prise médicamenteuse, d’exercice, …

Application envisageables dans les domaines de la recherche

Une des raisons majeures pour lesquelles nous ne comprenons que très imparfaitement les mécanismes biologiques humains, dont ceux de la sénescence, c’est le manque de données accessibles aux chercheurs. Attention, ce n’est pas le manque de données lui-même qui rend l’observation difficile, c’est le manque de données partagées.

L’analyse comparative des données issues de jumeaux numériques permettrait de sauver de nombreux patients. Cependant, cette amélioration ne pourrait se faire sans changement d’attitude en matière de partage de données.

Le premier défi est celui de la vie privée. En théorie, les réglementations et les principes généraux du droit dans l’Union européenne et dans bien d’autres pays, permettent l’utilisation de données de santé des individus pour des motifs de santé publique. En pratique, ce n’est que rarement le cas. Il est aberrant et contraire au droit fondamental à une vie en bonne santé que l’accès aux données de santé soit, en droit ou en fait, impossible. À noter d’ailleurs que presque personne ne conteste que les données permettant l’établissement de ressources fiscales doivent être accessibles aux agents des administrations fiscales.

Les conditions « idéales » pour rendre utiles les données des jumeaux numériques seraient :

  1. Un enregistrement des données selon des méthodes qui autorisent la comparaison. Idéalement, au moins une partie des paramètres devraient être mesurés partout selon des méthodes donnant des résultats rigoureusement identiques.

  2. Une bonne « curation des données ». Il s’agit du « nettoyage » ou de la correction des données incorrectes. C’est un mécanisme complexe, car tant les « signaux faibles » que les « signaux anormaux » peuvent résulter d’une erreur de mesure ou annoncer un phénomène de santé imprévu.

  3. Les données des jumeaux numériques sont juridiquement un bien commun. Elles ne peuvent être consultées que  par des personnes accréditées et uniquement dans un but médical et de recherche. L’utilisation à des fins autres que scientifiques pourrait être réprimée pénalement.

  4. Pour les recherches scientifiques, un système de sécurisation, d’anonymisation ou de pseudonymisation serait institué chaque fois que c’est techniquement possible. Par exemple, les données pourraient n’être accessibles que pour des scientifiques garantissant de manière stricte que les résultats des recherches seront publiés et ne feront pas l’objet de brevets. Il est à noter que, par certains côtés, un système où l’accès aux données se fait presque exclusivement via votre jumeau numérique est plus sécurisé contre des usages illégitimes qu’un dossier chez un médecin. En effet, toute « entrée » dans le système pourra être retrouvée sans possibilité de « regarder discrètement en cachette ».

  5. Évidemment, la protection contre la cybercriminalité est un problème fondamental. Même s’il est un petit peu moins sensible que celui de la protection bancaire (moins de gens s’intéressent à votre diabète qu’à votre portefeuille!), votre santé est plus précieuse que votre portefeuille.

L’étude des jumeaux numériques permettrait de :

  1. Choisir des traitements plus adéquats en fonction de situations spécifiques, c’est-à-dire en tenant compte de « jumeaux numériques » ayant des conditions similaires pour de nombreux paramètres âge, sexe, passé et présent médical, alimentation, exercice, environnement géographique, social, exposition à des substances toxiques,…

  2. Déterminer avec plus de finesse les tests cliniques qui devraient être démarrés prioritairement et vers quels publics.

  3. Déterminer à partir de signaux faibles et d’éléments « surprenants » (sérendipité), des pistes de recherche pas suffisamment explorées.

  4. Effectuer les premiers tests sur des modèles informatiques (des « jumeaux numériques » de personnes existantes) remplaçant en grande partie tant les tests animaux que les tests cliniques.

Conclusion

A ce jour, sauf lors de graves détériorations de l’état de santé, peu de citoyens sont suivis constamment pour leur santé. Alors que, de plus en plus systématiquement, nous sommes suivis par de nombreux dispositifs électroniques, un jumeau numérique pourrait devenir à la fois un ange gardien pour chacun d’entre nous et une contribution aux progrès de santé de tous.


La bonne nouvelle du mois : objectif de 5 ans de vie en bonne santé de plus à Singapour


C’est un des États du monde où l’espérance de vie est la plus élevée. Les autorités publiques y sont attentives aux améliorations possibles  Le  NUHS Centre for Healthy Longevity singapourien où travaillent notamment deux brillants chercheurs Andrea Maier et Brian Kennedy a pour objectif de permettre une augmentation de cinq années de la durée de vie en bonne santé, les premières améliorations apparaissant dans 3 à cinq ans.


Pour plus d’information

Lettre mensuelle de Heales. La mort de la mort. N°161. Août 2022. Les effets du vieillissement sur le système osseux

J’ai décidé très tôt que le vieillissement était mauvais pour vous. Il rendait les gens malades et ensuite ils mouraient ». Cela semble si simple et si vrai. Pourquoi pensez-vous que beaucoup de gens ne prennent toujours pas au sérieux l’idée que le vieillissement peut et doit être combattu ?

Les gens se laissent facilement intimider par les informations scientifiques. Ils en reçoivent beaucoup, et la plupart de ces informations proviennent de personnes qui pensent au vieillissement d’une manière qui fait appel à la fantaisie et à la réalisation des souhaits. Les personnalités publiques qui parlent du vieillissement inventent généralement des choses et en font grand cas, sans que leurs propos soient étayés par des preuves détaillées. Cela rend les personnes intelligentes sceptiques, et il est plus difficile pour les personnes qui disposent réellement d’informations de s’élever au-dessus de cela en termes de clarté. Richard Miller, gérontologue. Mai 2022 (traduction).


Thème du mois: Les effets du vieillissement sur le système osseux


Introduction

Les os formant le squelette, surtout le crâne,  sont un symbole de mort dans de nombreuses cultures. Ce sont également les dernières parties de nous-mêmes qui subsistent, en cas d’enterrement, pendant des décennies, des siècles, des millénaires… Enfin, la dégradation de nos os est aussi une des nombreuses causes de mortalité suite au vieillissement.

Définition

Le système osseux assure la protection des organes internes ainsi que leur maintien. Il sert aussi de levier aux muscles pour permettre de nombreux mouvements.

Le squelette humain est composé de 206 os à l’âge adulte. Le système squelettique est constitué, outre les os, de cartilage, d’articulations et de ligaments. Il représente en moyenne 20 % de la masse corporelle. Les os sont rigides, mais le squelette, lui, est d’une grande flexibilité.

L’os est principalement constitué de fibres de collagène et d’un minéral osseux inorganique sous forme de petits cristaux et entre 10% et 20% d’eau.

Changements avec l’âge

Le vieillissement de l’appareil locomoteur est important car il touche l’un des facteurs majeurs de l’indépendance fonctionnelle. Il représente 75 % des problèmes de santé majeurs des plus de 75 ans.

Avec l’âge, la densité minérale des os commence à diminuer, c’est l’’ostéoporose. Les os perdent du calcium et d’autres minéraux. Cette perte de densité osseuse s’accélère avec l’âge, principalement chez la femme après la ménopause.

La colonne vertébrale se raccourcit à mesure que les disques vertébraux perdent progressivement du liquide et s’amincissent. Elle devient incurvée et comprimée.

Les os longs des bras et des jambes sont plus fragiles à cause de la perte minérale, mais ils ne changent pas de longueur. Cela rend les bras et les jambes plus longs par rapport au tronc raccourci.

De plus, lors du vieillissement, le cartilage à l’intérieur des articulations s’affine et les constituants s’altèrent, rendant celles-ci moins résistantes et plus vulnérables aux lésions. Le vieillissement du cartilage articulaire est dépendant de multiples facteurs morpho-génétiques, mais aussi de l’obésité et des microtraumatismes répétés engendrés par le travail ou le sport. Malheureusement, le cartilage articulaire ne se régénère pas et c’est pourquoi la chirurgie de remplacement articulaire prothétique est devenue si fréquente aussi bien au niveau de la hanche que du genou.

Le vieillissement touche également les muscles. On observe une perte musculaire, appelée sarcopénie (sujet de notre lettre mensuelle du mois de janvier 2022). Au cours de ce processus, la masse de tissu musculaire ainsi que le nombre et la taille des fibres musculaires diminuent progressivement.

Les effets de ces changements

Les os deviennent plus fragiles, plus petits et plus cassants.

La dégradation des articulations peut entraîner des inflammations, des douleurs, des raideurs, voire des déformations. Les changements articulaires affectent presque toutes les personnes âgées.

Le résultat de la sarcopénie est une perte progressive de la masse et de la force musculaires. Les mouvements ralentissent et peuvent devenir limités. Cette perte de force musculaire augmente la contrainte sur certaines articulations (comme par exemple les genoux) et peut prédisposer la personne à l’arthrite ou à une chute.

Pathologies fréquentes

L’ostéoporose est un problème courant, en particulier chez les femmes âgées. Les os se cassent plus facilement. Les fractures par compression des vertèbres peuvent provoquer des douleurs et réduire la mobilité.

La faiblesse musculaire contribue à la fatigue, au manque de dynamisme et à une tolérance réduite à l’activité. Les problèmes articulaires, allant d’une légère raideur à une arthrite débilitante (arthrose), sont très fréquents.

Le risque de blessure augmente car les changements de démarche, l’instabilité et la perte d’équilibre peuvent entraîner des chutes. Les chutes entraînent souvent des fractures et la probabilité de décès des personnes âgées. La fracture du col du fémur est particulièrement fréquente comme cause de décès.

Les mouvements involontaires (tremblements musculaires et mouvements fins appelés fasciculations) sont plus fréquents chez les personnes âgées. Les personnes âgées qui ne sont pas actives peuvent avoir des sensations anormales (paresthésies).

Les solutions pour prévenir les conséquences du vieillissement osseux
L’exercice physique est l’une des meilleures solutions pour freiner ou pour prévenir les problèmes musculaires, articulaires et osseux. L’exercice aide les os à rester solides.

Une alimentation équilibrée joue également un rôle important. Notamment pour les femmes qui doivent tout spécialement veiller à consommer suffisamment de calcium et de vitamine D à mesure qu’elles vieillissent.

Les solutions curatives

Les thérapies nouvelles visant une plus grande longévité du système osseux sont peu nombreuses. Des traitements médicaux existent néanmoins. Ils agissent sur les cellules osseuses en stimulant leur reconstruction par les ostéoblastes. Une alternative pourrait être l’emploi de cellules-souches.

Ces questions sont cependant rarement abordées, même dans la communauté longévitiste. Nous avons encore bien des possibilités de recherche et de réjuvénation dans ce domaine.


La bonne nouvelle du mois : La mort des mammifères est un phénomène partiellement réversible


Des scientifiques de l’université allemande de Bochum ont constaté que des marqueurs sanguins de la maladie d’Alzheimer étaient visibles jusque 17 années avant le déclenchement de la maladie. Il s’agit de biomarqueurs de la protéine  amyloïde-bêta indiquant un mauvais repliement.

Si cette étude est confirmée, elle est doublement positive. Cela signifie que la période disponible pour contrer ce qui déclenche la maladie, avant qu’elle ne soit invalidante, est longue. Cela confirme aussi l’hypothèse traditionnelle de l’origine de la maladie. 

Dans ce cas, il restera bien sûr à établir la thérapie qui parviendra à stopper le développement de protéines « nuisibles » et, par réaction en cascade, à arrêter la maladie.


Pour plus d’information

Lettre mensuelle de Heales. La mort de la mort. N°160. Juillet 2022. La nanomédecine et la longévité

Voyez-vous la longévité en médecine comme une question bipartisane et pensez-vous donc qu’elle puisse rester ainsi ? (…)

(…) Oui, malgré l’opposition entre la législation sur les soins de santé et l’assurance maladie en général, qui tend à être, je dirais, une question politiquement neutre. Personne n’est à l’abri du vieillissement et des maladies chroniques qui se développent, donc ces questions ont un impact sur tout le monde, il y a là un certain ordre d’équité et parfois une équité malvenue.

Il existe un large soutien pour des avancées dans ce domaine. Les sondages que vous avez réalisés plus tôt cette année le montrent. Je pense que 73 % des personnes interrogées estiment que la durée de vie humaine devrait continuer à augmenter si les progrès de la médecine et de la technologie le permettent. Une forte majorité approuve également la recherche sur les causes du vieillissement cellulaire afin de mieux traiter les maladies chroniques.

Paul Tonko, membre du Congrès du 20e district de New York, A4LI Policy Discussion, 29 juin 2022.


Thème du mois : La nanomédecine et la longévité


Les nanosciences et les nanotechnologies (NST) peuvent être décrites comme l’ensemble des recherches et des procédures de fabrication et de manipulation de structures physiques, chimiques ou biologiques, de dispositifs matériels et de systèmes à l’échelle nanométrique.

L’initiative nationale sur les nanotechnologies la définit comme la manipulation de la matière avec au moins une dimension de 1 à 100 nanomètres.

Nanomédecine

La nanomédecine est l’application des nanotechnologies dans le domaine de la médecine. Le terme est apparu en 1999 avec une première mention par le scientifique américain Robert A. Freitas Jr. dans son livre Nanomedicine : basic capabilities.

Bien que la nanomédecine en soit encore à son stade de base, certaines applications ont été réalisées dans la pratique médicale, parmi lesquelles on peut citer : les biocapteurs, des médicaments, des outils de diagnostic, la thérapie génique, le développement de nanocapsules pour aider au traitement du cancer, les nanorobots

Applications et utilisations de la nanomédecine dans le domaine médical et la recherche sur le vieillissement

Nano-biocapteurs

Notre corps est une somme de processus biologiques et biochimiques. Le processus de vieillissement est fait d’une détérioration et d’un dé réglage de ces mécanismes. Cependant, il est difficile d’analyser les données biologiques comme un signal électrique.

Les progrès récents de la technologie de biofabrication pourraient permettre aux capteurs d’atteindre la haute sensibilité spatiale requise et nous rapprocher de la réalisation de dispositifs dotés d’un tel potentiel, ce qui serait réellement bénéfique pour le diagnostic médical. Les nanobio capteurs pourraient donc atteindre une telle capacité.

Un biocapteur est un dispositif d’analyse qui incorpore un élément biologiquement actif avec un transducteur physique approprié pour générer un signal mesurable proportionnel à la concentration d’espèces chimiques dans un échantillon. Un tel dispositif est idéalement capable d’une réponse continue et réversible et ne doit pas être nocif pour l’échantillon utilisé. Le terme « nanocapteur » désigne un système dans lequel au moins une des nanostructures est utilisée pour détecter des gaz, des produits chimiques, des agents biologiques, des champs électriques, de la lumière, de la chaleur, etc. Les nanobio capteurs sont des capteurs dans lesquels les détecteurs sont des éléments biologiques...

Les nanobio capteurs sont des dispositifs conçus pour détecter un analyte biologique spécifique en convertissant une entité biologique (protéine, ADN, ARN) en un signal électrique qui peut être détecté et analysé.

Les nanocapteurs peuvent être considérés comme des machines de laboratoire sophistiquées capables de mesurer rapidement, précisément et facilement des interactions biologiques complexes.

Leur potentiel a été utilisé pour la détection rapide des maladies auto-immunes, ce qui pourrait prévenir de manière significative les dommages tissulaires irréversibles et améliorer la qualité de vie de ces patients. Comme on le sait également, la biologie de la sénescence cellulaire est l’un des thèmes importants de la recherche sur le vieillissement. L’utilisation de biocapteurs pour mesurer et surveiller les cellules vivantes individuelles pourrait simplifier l’étude de ces dernières et être utile pour la recherche sur la sénescence cellulaire.

D’autres caractéristiques des biocapteurs sont d’être capables de distinguer plusieurs analytes dans un seul échantillon et de détecter des analytes en solution à de très faibles concentrations.

Une autre utilisation des biocapteurs au niveau moléculaire est celle des nanocapteurs d’ADN qui fournissent des outils puissants pour la détermination rapide et sensible des agents pathogènes, des maladies, des troubles génétiques, du dépistage des médicaments et d’autres applications de diagnostic in vitro. Ils permettent un diagnostic précoce, avant même l’apparition de symptômes cliniques.

Nanotechnologie et thérapie génique dans la recherche sur le vieillissement

Diverses études anti-âge sur des modèles montrent que la thérapie génique a été utile pour prolonger la durée de vie d’un organisme. Diverses interventions génétiques, notamment la mutation, le knock-out et la surexpression, ont permis de prolonger la durée de vie de certains animaux. 

Mais parlons maintenant de la thérapie génique chez l’homme, de l’influence des nanotechnologies sur celle-ci et de la manière dont elle peut bénéficier à la recherche sur le vieillissement.

La thérapie génique consiste à modifier génétiquement des gènes à des fins thérapeutiques. Initialement, la thérapie génique était destinée à remplacer un gène pathogène dans les maladies monogéniques, c’est-à-dire celles liées au dysfonctionnement d’un seul gène. Elle consistait à délivrer aux cellules un gène sain capable de remplacer le gène malade. Avec les nouvelles avancées, d’autres applications sont apparues comme l’inactivation ou l’élimination ou la réparation d’un gène pathogène qui ne fonctionne pas correctement. Elle peut être réalisée directement dans le corps humain (in vivo) ou les cellules peuvent être génétiquement modifiées en laboratoire puis réinjectées au patient (ex-vivo).

Il existe différents types de produits de thérapie génique, notamment les suivants : ADN plasmidique ; vecteurs viraux ; vecteurs bactériens ; technologie d’édition du génome ; produits de thérapie génique cellulaire dérivés de patients.

La nanotechnologie a fait progresser la thérapie génique grâce au développement de nanoparticules comme vecteurs de thérapie génique. Des nanoparticules composées de polymères artificiels, de protéines, de polysaccharides et de lipides ont été développées pour l’administration de séquences thérapeutiques d’acide désoxyribonucléique (ADN) ou d’acide ribonucléique (ARN) pour cibler le cancer.

En principe, des nanoparticules biodégradables ont été utilisées comme capsules pour délivrer des gènes dans les cellules cancéreuses. Même avec ces nanoparticules, le déplacement de l’ADN de la membrane cytoplasmique des cellules vers le noyau reste l’un des principaux obstacles à la thérapie génique. Cependant, la mise en œuvre de nanoparticules comme vecteurs de thérapie génique est l’une des technologies les plus en vue dans la recherche biomédicale en raison de la facilité et de la simplicité de leur synthèse et de leur fonctionnalisation avec plusieurs composants, de leur faible immunogénicité et toxicité. Leur succès dans le traitement du cancer est bien connu. Ils devraient être développés et utilisés dans la recherche sur le vieillissement.

Les nanocapsules dans le traitement du cancer

Comme mentionné précédemment, l’utilisation de nanoparticules a été cruciale pour la thérapie génique, et encore plus utile pour la thérapie génique sur les cellules cancéreuses. Dans le domaine des nanotechnologies, les nanoparticules ne sont pas seulement utilisées pour modifier les gènes des cellules cancéreuses, mais aussi pour délivrer des médicaments dans ces cellules.

Techniquement, les nanoparticules sont équipées de nanocarriers qui guident les particules ultrafines vers les cellules tumorales. Les nanoparticules ciblant les cellules tumorales ne sont absorbées que par ces dernières, où elles libèrent leur effet médicinal pour les éliminer. Pour la qualité mentionnée dans le paragraphe précédent, les nanoparticules sont en fait bénéfiques aux cellules, car elles agissent précisément sur une cellule spécifique sans endommager les tissus environnants. La FDA a d’ailleurs approuvé l’utilisation de médicaments de thérapie génique et de thérapie cellulaire dans le traitement de certains cancers.

Nanorobots

Un nanorobot ou nanobot est un robot dont les composants sont à une échelle nanométrique (10-9 mètres). En général, la taille des nanorobots se situe entre 1 et 100 nm.

Les nanorobots peuvent être utilisés très activement en médecine pour le diagnostic préalable et l’administration ciblée de médicaments contre le cancer, la chirurgie, la pharmacocinétique, le suivi du diabète et l’instrumentation biomédicale.

Une autre application utile des nanorobots est de coopérer à la réparation des cellules des tissus après une blessure, en travaillant avec les globules blancs et les cellules inflammatoires.

D’autres fonctions des nanorobots sont :

  • Détection de bactéries
  • Détecter le cancer
  • Déterminer l’efficacité du médicament
  • Détecter des produits chimiques particuliers
  • Délivrer des médicaments anticancéreux
  • Dégager les vaisseaux sanguins obstrués
  • Servir d’anticorps
  • Nettoyer la pollution

L’administration précise de médicaments et les faibles effets secondaires sont quelques-uns des avantages des nanorobots. Le coût élevé de la production est l’un de ses inconvénients.

Conclusion

Nous vivons une époque COVID difficile. Nous n’utilisons pas suffisamment les nanotechnologies pour vaincre cette maladie et nous régressons dans certaines dimensions de la santé (voir ci-dessous).

Mais nous sommes dans une ère de nouvelles découvertes avec de nouvelles technologies. Des scientifiques comme Eric Drexler, Richard Feynman, Robert Freitas, ont cru aux progrès des nanotechnologies et aux bénéfices de ces avancées pour le monde. La recherche contre le vieillissement pourrait également bénéficier d’une avancée catapultée avec ces nouvelles technologies. 

Aujourd’hui, les nanoparticules font déjà l’objet de multiples utilisations dans différentes branches de la science médicale. Elles ont été analysées pour différentes applications cliniques, telles que les transporteurs de médicaments, la thérapie génique dans les tumeurs, les agents de contraste en imagerie et les dispositifs de diagnostic capables de transformer les données biologiques en données électriques mesurables. Les risques et les avantages doivent encore être étudiés, mais les avancées scientifiques des nanotechnologies pourraient être d’une aide cruciale dans le monde médical.


La mauvaise nouvelle du mois


La diminution désastreuse de l’espérance de vie au niveau mondial en 2020 et 2021 a été récemment confirmée par les Nations unies dans un document intitulé World Population Prospects 2022: 

L’espérance de vie mondiale à la naissance est tombée à 71,0 ans en 2021, contre 72,8 en 2019, en raison principalement de l’impact de la pandémie de coronavirus (COVID-19). (…) En Asie centrale et du Sud et en Amérique latine et dans les Caraïbes, l’espérance de vie à la naissance a diminué de près de trois ans entre 2019 et 2021. (…) Pour la Bolivie (…), le Botswana, le Liban, le Mexique, Oman et la Fédération de Russie, les estimations de l’espérance de vie à la naissance ont diminué de plus de 4 ans entre 2019 et 2021.

Les technologies de la santé progressent encore dans le monde entier. Cependant, nous avons besoin de toute urgence d’une plus grande utilisation de ces technologies de la santé, d’autorités sanitaires plus fiables, d’une plus grande utilisation du big data pour la longévité et la résilience afin que le progrès technologique en matière de santé crée à nouveau une augmentation mondiale de l’espérance de vie en bonne santé.

Autres nouvelles scientifiques en juin et juillet de Heales.


Pour plus d’informations

Lettre mensuelle de Heales. La mort de la mort. N°159. Juin 2022. Système immunitaire et longévité

Il est toujours bon d’avoir des rêves, même s’ils ne se réalisent jamais. Nous sommes à des années-lumière de parvenir à ce que le vieillissement ne soit plus une fatalité. Depuis peu, ce domaine reçoit des flots de capitaux privés. Pour moi, c’est une bonne chose, car tout le monde en profitera. Si ces entreprises effectuent réellement des découvertes clés, cela bénéficiera à l’ensemble de la société.

Pensez-vous que tout le monde en profitera de la même manière ? J’en suis convaincue. Vous ne pouvez pas limiter certaines avancées pour qu’elles ne profitent qu’à un cercle restreint de privilégiés. Elles finissent toujours par se démocratiser et profiter à tous. Il y a une limite, cependant. Si c’est une solution très chère, elle mettra davantage de temps à parvenir au commun des mortels. Mais il est possible de découvrir quelque chose de réellement efficace contre le vieillissement et d’accessible. Plus on consacre d’argent à la recherche dans ce domaine, mieux cela vaut pour tout le monde.

Vera Gorbunova, biologiste américaine, Le Soir (quotidien francophone belge), 29 mai 2022.


Thème du mois: Système immunitaire et longévité


Définition

Le système immunitaire d’un organisme est un système biologique responsable de mécanismes de défenses qui permettent de lutter contre les agressions.

Le système immunitaire est extraordinairement efficace, mais aussi extraordinairement complexe. Il est hérité à la naissance, dans un état de vigilance ou inactif, et évolue en fonction des contacts qu’il a avec des agents pathogènes (bactéries, virus, parasites…) ou des substances étrangères au corps (poison, greffe…).

Les organes du système immunitaire s’appellent des organes lymphoïdes, ils sont présents partout dans le corps et comprennent la moelle osseuse, les ganglions, la rate, les amygdales et le thymus.

Ils ont pour rôle de produire les cellules de l’immunité, mais aussi d’éduquer ces cellules à reconnaître des substances qui font partie de l’organisme (=le soi) et les substances étrangères (=le non-soi). Cette éducation commence dès le développement de l’embryon et décroît en intensité avec l’âge, laissant des cellules qui ont été moins bien éduquées (=l’immuno-sénescence). 

Les principaux mécanismes de défenses immunitaires: Comment cela fonctionne-t-il?

L’inflammation est la réaction du système immunitaire, face à une agression qui peut être externe (infection, brûlure, allergie, etc.) ou interne (cellules cancéreuses) des tissus. Face à ces agressions, le système immunitaire va être activé. On parle alors de réponse immunitaire. Cette activation est favorisée et amplifiée par la production de messagers (les interleukines ou les cytokines).

La réponse immunitaire est de deux types, l’immunité innée, médiée par les globules blancs (polynucléaires et macrophages), et l’immunité adaptative, médiée par les lymphocytes T et B.

Il s’agit d’un mécanisme permettant la défense de l’organisme contre des agents infectieux de façon immédiate car elle ne nécessite pas de division cellulaire. Ces cellules ont la capacité de reconnaître de manière non spécifique les intrus. Par exemple, certains globules blancs comme les granulocytes et les macrophages éliminent instantanément l’intrus en le digérant afin d’empêcher sa diffusion. Lorsque l’infection n’est pas contenue localement, des globules blancs spécialisés appelés lymphocytes vont venir digérer une seconde fois l’agent pathogène.

Il s’agit d’un mécanisme dans lequel des lymphocytes T et des lymphocytes B sont éduqués dès les premières années de la vie pour reconnaître les cellules du “soi” et du “non-soi”. Ils fonctionnent de 2 façons:

  • Soit par un contact cellulaire direct qui conduit à la destruction de la cellule du “non-soi” (= la cytotoxicité cellulaire) qui est réalisée par les lymphocytes T.
  • Soit par la production d’anticorps réalisés par les lymphocytes B  qui vont également reconnaître de façon spécifique les molécules étrangères du “non-soi”.

Les pathologies du système immunitaire

Soit le système immunitaire est trop faible: on parle d’immunodéficience. Ce déficit peut être génétique, acquis par des maladies (ex: l’infection HIV) ou par des traitements (ex: les immunosuppresseurs) qui vont diminuer les défenses immunitaires.

Soit le système immunitaire est trop fort: on parle de maladies auto-immunes. Lors de celles-ci, le système immunitaire s’attaque aux cellules “du soi”. Parmi ces maladies il y a la sclérose en plaques, le diabète, la maladie de Crohn. Mais également l’inflammation chronique appelée l’inflammaging qui se développe avec l’âge et en absence d’infection. Il semblerait que l’inflammation est causée par une perte de contrôle de l’inflammation systémique entraînant une surstimulation chronique du système immunitaire inné.

Des affections qui s’aggravent considérablement avec le vieillissement

Il a souvent été expliqué dans les lettres mensuelles de Heales que les trois principales causes de morbidité et de mortalité sont les maladies cardio-vasculaires, les cancers et les maladies neurodégénératives. Mais les déficiences du système immunitaire jouent également un rôle majeur par l’augmentation des maladies infectieuses,  la progression des maladies auto-immunes et le phénomène appelé « l’inflammaging ».

La morbidité et la mortalité ne sont généralement pas dues à une seule cause. Les maladies, les défenses somatiques et les moyens thérapeutiques vont généralement affaiblir progressivement notre corps, particulièrement le système immunitaire. La petite phrase « Tout ce qui ne tue pas rend plus fort » est parfois vraie (par exemple, le système immunitaire peut ressortir renforcé), mais malheureusement souvent fausse (par exemple, le système immunitaire peut s’épuiser ou se dérégler).

Croissance des maladies infectieuses avec l’âge

Du fait de la diminution de l’efficacité du système immunitaire, la plupart des maladies infectieuses sont de plus en plus dangereuses au fil des ans. Ainsi, chaque année, les épidémies de grippe font de nombreuses victimes. Les personnes âgées sont également beaucoup plus sensibles aux maladies nosocomiales. De plus, particulièrement dans les pays riches, la résistance bactérienne aux antibiotiques concerne particulièrement les individus, ayant absorbé beaucoup de médicaments par le passé.

Enfin, le Covid touche bien sûr particulièrement les personnes âgées. Pour cette maladie comme pour les autres maladies infectieuses, la mortalité n’est pas causée principalement parce qu’elles sont plus touchées. La mortalité très supérieure est causée par des mécanismes immunitaires déficients, un état global affaibli et une réponse positive moindre aux thérapies.

Croissance des maladies auto-immunes avec l’âge

Les maladies auto-immunes ne sont pas toujours liées à l’âge. Mais la mortalité causée par ces maladies touche principalement des personnes qui ne sont plus jeunes.

Lors d’une maladie auto-immune, le système immunitaire s’attaque à l’organisme lui-même (le « soi », d’où la racine auto). Plus précisément, les maladies auto-immunes s’attaquent soit à un organe spécifique (par exemple les maladies auto-immunes de la thyroïde), soit à plusieurs organes (par exemple le lupus).

L’inflammaging

Comme son nom l’indique, il s’agit d’une inflammation excessive liée à l’âge. Comme déjà indiqué, l’inflammation à la base est un mécanisme normal et utile de réaction contre des agressions internes ou externes. Mais dans l’inflammaging, les mécanismes se produisent ou se poursuivent et deviennent nuisibles à l’organisme.

Le mécanisme d’emballement d’une réaction au départ utile a été particulièrement observé ces deux dernières années dans le cadre du Covid, avec notamment ce qui a été appelé les « tempêtes de cytokines« .

Perspectives thérapeutiques
En fait, toute recherche relative à la vaccination est une recherche relative au système immunitaire.

Les recherches pour la conservation et le rétablissement du système immunitaire sont nombreuses. Les plus intéressantes sont celles qui visent à « apprendre » au système immunitaire à s’attaquer mieux et plus à tout ce qui nuit à l’organisme, notamment limmunothérapie et plus particulièrement limmunothérapie contre certaines formes de cancer.

Une des expériences les plus prometteuses, mais jusqu’ici à petite échelle, a permis au scientifique Greg Fahy de renforcer le thymus, et par là le système immunitaire de volontaires sains âgés.


La bonne nouvelle du mois : Hevolution, un milliard de dollars par an contre les maladies liées au vieillissement


La presse mondiale s’est abondamment fait l’écho des projets d’Hevolution. 

Cette fondation a un objectif longévitiste et universaliste affirmé: « Nous pensons que chaque être humain a le droit de vivre plus longtemps et en meilleure santé » est mentionné en anglais sur la page d’accueil. Il semble que grâce à la fondation, le projet TAME qui a pour but de vérifier l’efficacité de la metformine sur des humains va (enfin) être lancé bientôt.

Ce n’est pas la première grande organisation à annoncer des recherches de longévité portant sur des centaines de millions de dollars ou d’euros (Google Calico et Altos Labs l’ont précédés). Mais c’est la première organisation de ce type avec des capitaux (semi) publics. C’est, en effet, un décret royal de l’Arabie Saoudite qui est à l’origine de cette organisation.

Bien sûr, l’Arabie Saoudite n’est pas le lieu que choisiraient prioritairement la plupart des chercheurs et décideurs longévitistes, mais des chercheurs renommés comme Nir Barzilai sont déjà impliqués.


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