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La mesure de la sénescence. La mort de la mort. Décembre 2017. N° 105.

Ma grande crainte est de mourir à la veille des plus grandes découvertes, ce serait vraiment con. Interview de Frédéric Beigbeder (52 ans) auteur du livre « Une vie sans fin », dans le magazine Tecnikart, décembre 2017.


Thème du mois: Y-a-t-il un thermomètre pour mesurer l’âge biologique ?


En un certain sens, le vieillissement commence dès avant la naissance. Autrefois, les chinois comptaient d’ailleurs l’âge, non depuis la naissance, mais depuis la conception. Quelques jours après la fécondation, les premières cellules commencent à se différencier et ne sont déjà plus « totipotentes » (capables de se transformer en n’importe quelle cellule).

Le premier indicateur du vieillissement, c’est donc bien évidemment l’âge. Omnes vulnerant, ultima necat (Toutes blessent, la dernière tue) était-il autrefois inscrit sur les horloges à propos des heures qui passent. Cependant, le vieillissement se déroule à un rythme fort différent selon les individus.

Dans le sens de diminution de capacités, le vieillissement commence bien tôt également. Un athlète atteint ses pleines capacités à un âge qui varie selon le sport, généralement inférieur à 25 ans. C’est plus jeune encore que le risque de décès est le plus faible. En France, seule 1 sur 10.000 des adolescentes et préadolescentes de 10 à 14 ans mourront au cours d’une année, alors que c’est « déjà » 2 sur 10.000 pour les jeunes femmes de 20 à 24 ans.

Cependant, le vieillissement responsable de la plupart des décès, lui, commence bien plus tard, à partir d’environ 50 ans. Il est marqué par des modifications physiologiques innombrables et parfois encore mal connues. Si nous pouvions suivre tous les biomarqueurs, tous les signaux physiologiques du vieillissement, il serait plus facile d’étudier la sénescence sur une courte période et donc l’analyse de résultats d’essais thérapeutiques pourrait être également se faire plus rapidement.

Marqueurs de capacité

L’avancée en âge de manière générale, c’est une diminution des capacités, une faiblesse de plus en plus importante, notamment pour :

  • la capacité pulmonaire – un centenaire qui souffle toutes ses bougies est en meilleure santé qu’un nonagénaire qui en est incapable;
  • la force de la poigne – un fort bon indicateur de l’espérance de vie restante chez les personnes âgées;
  • la capacité musculaire globale – la sarcopénie est une maladie courante chez les personnes âgées;
  • la masse osseuse et sa solidité – l’ostéoporose est également une maladie fréquente chez les personnes âgées;
  • la pression sanguine – l’augmentation de la pression sanguine systolique (lors de la contraction cardiaque) est un indice de mauvaise santé (« on a l’âge de ses artères”, disait-on autrefois);
  • la capacité d’équilibre moteur –  sa diminution peut indiquer que les capacités neuronales diminuent;
  • les acuités visuelle, auditive et gustative.

Apparence physique

Si l’habit ne fait pas le moine, l’apparence physique générale donne quand même des informations utiles. D’ailleurs, des applications logicielles sont déjà capables aujourd’hui de déterminer avec une certaine précision l’âge d’une personne à partir de photos. L’apparence physique comprend :

  • une moindre élasticité de la peau (dont les rides);
  • la décoloration et la diminution du système pileux (dont la calvitie);
  • la diminution de la taille qui est généralement de plusieurs centimètres;
  • l’augmentation de l’indice de masse corporelle.

Marqueurs non génétiques

Notre corps est en renouvellement constant. Les cellules meurent et sont remplacées, nos ongles et nos cheveux poussent, notre peau se renouvelle constamment, chaque jour, nous absorbons des milliers de litres d’air, plusieurs kilos de solides et de liquides et nous rejetons à très peu de choses près la même quantité de matière. Mais ce recommencement sur des décennies se produit avec des changements progressifs de notre composition :

Marqueurs génétiques

Tout au long de la vie, la plupart de nos cellules se divisent. A chaque division, il se produit quelques modifications de l’ADN. L’ADN d’un individu âgé n’est donc plus celui de quand il était jeune. Ceci concerne :

  • la longueur des télomères;
  • des mutations dans les mitochondries;
  • d’autres mutations dans les cellules;
  • des mécanismes épigénétiques.

Autres marqueurs

En fait, quasiment tout ce qui est mesurable chez un être humain va se modifier au cours de l’existence et donc il ne peut être question de tout décrire ici. Des scientifiques cherchent à établir des listes de biomarqueurs portant sur certaines substances souvent très spécifiques qui ne seront pas abordées ici. Mais voici quelques autres indicateurs importants.

  • diminution du nombre de neurones et de la masse totale du cerveau;
  • augmentation de la quantité de collagène et détérioration de sa qualité;
  • moindres capacités digestives;
  • diminution (chez les hommes) ou disparition (chez les femmes) de la fertilité;
  • diminution de la capacité de cicatriser;
  • déficience de l’efficacité des cellules produisant les anticorps et tendance croissante de ces anticorps à s’attaquer non plus seulement aux agents pathogènes, mais aussi aux cellules propres de l’organisme.

Que faire de toutes ces informations mesurables ?

Il est utile de rappeler, même au personnel médical et même aux chercheurs, que le vieillissement est la première cause de mortalité humaine et qu’il touche l’ensemble de notre métabolisme, de manière irrémédiable mais à des rythmes variables.

Grâce aux moyens technologiques contemporains, réaliser des indices composites issus de ces marqueurs est un des moyens de mieux comprendre la sénescence. Utiliser des indicateurs multiples permet également de constater rapidement si des thérapies nouvelles ont un effet global positif (agissant sur toutes les dimensions métaboliques) ou seulement localisé.

La mauvaise nouvelle du mois: pour la deuxième année consécutive, l’espérance de vie décroît (légèrement) aux Etats-Unis

En 2016, pour la deuxième année consécutive, l’espérance de vie a diminué aux Etats-Unis. Il ne s’agit pas d’une diminution importante et elle serait due principalement à une cause spécifique, à savoir l’augmentation des décès par consommation de drogues. C’est néanmoins une mauvaise nouvelle.

Les Etats-Unis sont un des pays :

  • les plus riches du monde;
  • avec le plus de scientifiques au monde;
  • ayant les dépenses médicales les plus élevées;
  • et avec une espérance de vie déjà relativement peu élevée.

Malgré cela, les extraordinaires progrès technologiques de ces dernières années ne compensent plus les reculs suite aux comportements des citoyens de ce pays (obésité, prise de risques), particulièrement chez les hommes (l’espérance de vie des femmes a stagné à 81,1 ans, celle des hommes a diminué de 76.3 à 76.1 ans).

Pour l’Europe, les statistiques de 2016 ne sont pas encore toutes connues mais les statistiques de 2015 montraient également un déclin.

Le progrès de la longévité n’est pas plus une certitude que le progrès technologique ou que le  progrès social. Il dépendra de nos priorités, de nos investissements, de l’importance que nous donnons à la vie humaine et bien sûr de l’application aux citoyens des résultats des recherches médicales.


Pour en savoir plus :

 

 

Le test de l’inversion. La mort de la mort. Novembre 2017. N° 104. 

Bien sûr que les gens veulent vivre pour toujours. Est-ce que tu  plaisantes ? La vie est géniale ! Je vois des gens parler de «s’ennuyer» ou ne pas avoir de motivation pour accomplir quoi que ce soit, et je me gratte la tête. Ennuyé ? Vraiment ? Au cours des 100 dernières années, nous sommes passés des avions primitifs des frères Wright à la (…) lune. Au cours des 2000 dernières années, nous sommes passés de la superstition biblique (… aux) réseaux mondiaux instantanés qui nous ont permis de poser des questions aux étrangers du monde entier.

Ennuyé ? Mec, tu dois te promener comme un somnambule dans la vie pour t’ennuyer ! (…)  Mon dieu, mec ! Ennuyé ? Tu te fous de moi ? (…) Je n’accomplis pas les choses parce que je meurs, j’accomplis des choses parce que je vis! J’accomplis des choses parce que le fait de les faire m’apporte de la joie, pas parce que je manque de temps pour faire des choses ! (…)

Je suis limité dans ce que je peux accomplir parce que la durée de vie humaine est si courte. La mortalité serait ce qui nous fait accomplir les choses? Quelle charge fétide de belette puante ! La mortalité limite ce que nous accomplissons et fait en sorte qu’à tout moment, un pourcentage considérable de la population humaine totale apprend ce que nous savons déjà plutôt que d’étendre les connaissances humaines.

La vie est géniale. Je ne peux pas comprendre comment tant de gens sont si contents de la jeter dans le tas de ferraille, quand il y a tant de crainte et d’émerveillement et de beauté et de trucs frais qui nous entourent chaque jour.

Franklin Veaux, internaute, 2015 (traduction, source).


Thème du mois: Et si nous vivions moins longtemps?


Depuis des décennies, bon an, mal an, la durée de vie moyenne croît de deux à trois mois par année. Mais la poursuite de cette évolution n’est pas certaine. Logiquement, ceux qui prétendent que des années de vie en plus contribuent à la surpopulation, rendent moins heureux, … devraient espérer que nous vivions moins longtemps. Cette lettre examinera cette situation.

Inversion possible de la durée de vie en Europe et aux Etats-Unis : les faits

Selon les statistiques de l’OCDE, pour la première fois depuis une vingtaine d’années, en 2015 (les statistiques de 2016 ne sont pas encore connues), dans les grands pays de l’Union européenne, la durée de vie a légèrement décru. Cela a été notamment le cas en Allemagne, en France, au Royaume-Uni, en Espagne, en Italie et aux Pays-Bas.

Par ailleurs, aux Etats-Unis depuis quelques années, la durée de vie ne progresse presque plus et elle est même en décroissance pour certaines populations.

Les causes de la stagnation actuelle ne sont pas connues. Il peut s’agir d’une évolution temporaire ou qui s’inscrira dans la durée. En l’absence de progrès médicaux importants, il se peut que l’impact de l’obésité, de certaines pollutions notamment atmosphériques, d’habitudes culturelles trop sédentaires impacte durablement et négativement la durée de vie.

Il se peut que cela ne dure pas. Lorsque l’on regarde le passé récent, c’est dans les années 60 du siècle passé, années de grande croissance économique et de progrès scientifiques que la durée de vie moyenne a le plus stagné dans un pays comme les Etats-Unis avant de repartir à la hausse.

Pour la majorité des citoyens, un recul prononcé de la durée de vie serait une mauvaise nouvelle, mais certains pourraient s’en réjouir.

Inversion possible de la durée de vie : un peu de politique-fiction

Le philosophe et théoricien des risques Nick Bostrom s’est intéressé aux citoyens qui affirment que des améliorations humaines ne sont pas souhaitables. Il a développé ce qu’il a appelé le test de l’inversion. Si certains affirment que des améliorations humaines sont mauvaises pour les citoyens, logiquement une évolution inverse devrait être souhaitée par ces personnes.  Pour la longévité, ceux qui trouvent que vivre plus longtemps est une mauvaise chose, devraient alors souhaiter vivre moins longtemps.

Certains pourraient par exemple prétendre que si demain les citoyens en France vivaient 10 ans de moins, cela serait une bonne chose. Nous aurions une population moins nombreuse, une population plus jeune, une vie plus intense.

Confrontés à cette argumentation, ceux qui refusent les progrès de longévité affirmeront peut-être qu’ils ne souhaitent pas non plus une diminution parce que la durée de vie actuelle est « idéale ». Ils diront que les progrès de la médecine jusqu’à aujourd’hui sont suffisants et qu’il ne faut pas aller plus loin que ce qui est naturel. Mais la durée de vie « naturelle », c’est une vie excédant rarement une cinquantaine d’année et non la durée de vie moyenne au 20è ou au 21è siècle. Et d’ailleurs, ceux qui s’opposent aujourd’hui à une vie dépassant 80 ans en moyenne ressemblent beaucoup à ceux qui s’opposaient hier à une vie de plus de 70 ans en moyenne.

A noter que, si nous vivions 10 ans de moins, les coûts de soins de santé ne diminueraient pas. Si la durée de vie était réduite, l’essentiel des maladies se déclencherait plus tôt. En effet, ces sont les dernières années de vie qui sont les plus coûteuses pour la sécurité sociale, que le décès se passe à 60, 70 ou 80 ans.

En fait, si nous imaginons sérieusement que demain, nous ne vivions plus les 10 dernières années, pensez-vous réellement que les citoyens « bioconservateurs » seraient enthousiastes ? Probablement que cela serait vu par eux aussi comme une catastrophe. La souffrance des familles perdant leurs proches plus rapidement, la peur plus forte de mourir et le sentiment déprimant d’un monde se dégradant se combineraient.

Par souci d’objectivité, il faut remarquer que des circonstances très défavorables, comme une guerre, une catastrophe naturelle ou des morts nombreuses, peuvent avoir pour effet que des personnes deviennent plus solidaires ou s’entraident plus. Mais lorsque le désastre s’éloigne, presque personne ne veut y revenir.

En réalité, presque personne ne refuse les progrès de longévité une fois qu’ils sont là et le test de l’inversion permet de rendre cela plus visible.


Les bonnes nouvelles du mois: Bill Gates investit dans la lutte contre la maladie d’Alzheimer et Google Calico s’intéresse à la jeunesse des cellules germinales


L’homme le plus riche du monde participe depuis de longues années à la lutte contre la malaria dans le monde et a effectué des dons considérables.

Il vient d’annoncer un investissement de 100 millions de dollars pour lutter contre la maladie d’Alzheimer. Sa démarche est d’autant plus intéressante qu’il a annoncé que le financement explorera de nouvelles idées de recherche (notamment concernant le rôle des cellules gliales).

Calicolabs créé par Google dispose d’un capital énorme d’1,5 milliards de dollars pour des recherches pour la longévité humaine. Cependant, les résultats des recherches sont tenus secrets depuis des années. Cynthia Kenyon, la chercheuse la plus réputée de Google Calico vient enfin de communiquer dans le prestigieux journal Nature.

Son travail permet de mieux comprendre l’un des mystères de la transmission de la vie. Qu’est ce qui fait que la première cellule qui deviendra un ver est totalement « jeune » alors qu’elle est issue de cellules « vieilles ». Ceci donne des pistes de réflexion pour le rajeunissement de tout animal multicellulaire puisque chaque ver, chaque, souris, chaque être humain provient d’une seule cellule parfaitement jeune et que ces êtres en grandissant pourront donner naissance à des êtres parfaitement jeunes.


Pour en savoir plus de manière générale, voir notamment: heales.orgsens.orglongevityalliance.org et longecity.org

 

 

Le point sur les expérimentations humaines. La mort de la mort. Octobre 2017. N° 103.

Il est en fait impossible de donner un consentement éclairé dans le cas d’une recherche jugée intrinsèquement très risquée, même si vous voulez le faire et que vous savez ce qui est en jeu et quelles sont les chances que vous souffriez d’une hémorragie cérébrale ou quoi que ce soit d’autre. Professeur Steve Fuller, philosophe et sociologue britannique. (vidéo de Virtual Future 2017, traduction)


Thème du mois: Recherche expérimentales de longévité de femmes et d’hommes (âgés)


La liste est longue des produits, méthodes et traitements pour lesquels il a été affirmé qu’il était possible de vivre (beaucoup) plus longtemps. Aujourd’hui, les recherches avec des applications à court ou moyen terme envisageables pour les humains concernent notamment les thérapies géniques, les cellules-souches, des produits (metformine, rapamycine, statines, sénolytiques…), les nanotechnologies, l’alimentation, l’exposition aux substances toxiques et le mode de vie.

Les efforts pour la longévité semblent parfois désordonnés, vains, ridicules et anti-naturels, tout comme semblaient désordonnés, vains, ridicules et antinaturels, les essais pour faire voler des plus lourds que l’air à la fin du 19è siècle.

Comme pour l’aviation, le chemin du succès passera par des essais difficiles. Mais nous avons aujourd’hui bien plus de moyens qu’au tournant du 20è siècle et l’enjeu potentiel ne concerne pas les touristes aériens du siècle à venir mais des milliards de femmes et d’hommes avançant en âge aujourd’hui.

Garanties à apporter

Études en double aveugle

Pour qu’une étude thérapeutique démontre son efficacité de manière indiscutable, il est en règle nécessaire qu’elle se déroule en « double aveugle ». Généralement, cela se fait de la manière suivante:

  • Un groupe de sujets d’expérience est constitué puis divisé en deux parties égales de manière aléatoire (par tirage au sort)
  • Chaque groupe est traité d’une manière qui apparaît comme identique tant pour les sujets de l’expérience que pour ceux qui administrent le traitement. Cependant, seule une moitié des personnes reçoivent un vrai traitement, les autres reçoivent un simulacre de traitement.

Ceci est nécessaire pour diminuer le risque de fraude mais aussi pour contrer les effets placebo et nocebo. Par exemple, les personnes recevant un traitement peuvent se sentir mieux (l’effet placebo) alors que les personnes ne recevant rien pourraient se sentir exclues et donc mal (effet nocebo). Il ne suffit pas que les patients ne sachent pas ce qu’ils reçoivent. Ainsi, un infirmier pensant donner un produit « miracle » sera plus attentif, souvent de manière inconsciente, pour le patient porteur d’espoir que pour le patient « contrôle ».

Réaliser une expérience en réel double-aveugle est souvent complexe (et même parfois impossible). Par exemple une pilule placebo n’a pas la même consistance et le même goût qu’une pilule avec des produits actifs. Il peut également se poser des problèmes éthiques, si la thérapie envisagée est lourde. Ainsi, faire une intervention simulée similaire à une opération thérapeutique lourde, n’est pas admissible aujourd’hui.

Il faut préciser que, pour  des tests en double aveugle portant sur des personnes souffrant de maladies, le groupe « placebo » n’est pas laissé sans soin. Deux cas sont envisageables :

  • un groupe reçoit la thérapie traditionnelle et un autre groupe reçoit la thérapie nouvelle
  • un groupe reçoit la thérapie traditionnelle et un autre groupe reçoit la thérapie traditionnelle et la thérapie nouvelle

Tout ce qui précède concerne des thérapies avec des effets relativement limités. Si les résultats sont très nets et rapides, des tests peuvent être utiles même s’ils ne sont pas en double aveugle et s’ils se font seulement sur quelques personnes.

Garanties du point de vue du coût de l’expérimentation pour les patients

Il est souhaitable que les personnes de l’expérience soient bénévoles : payer des personnes, au-delà d’une indemnisation des frais, pour effectuer des essais, pourrait avoir pour conséquence que des personnes accepteraient de prendre des risques non pas par « consentement éclairé » mais plutôt pour gagner de l’argent. Les garde-fous mis en place pour éviter des expériences trop dangereuses seraient donc diminués.

Certains souhaitent faire payer des personnes pour tester. Accepter cela a pour conséquence que des thérapies innovantes sont réservées à ceux qui en ont les moyens. Les partisans de ce paiement insistent cependant sur le fait que les riches testant ces produits seraient des « cobayes » utiles à la collectivité et particulièrement bien informés.

Garanties juridiques

Dans l’Union européenne, aux Etats-Unis et dans les pays socio-économiquement similaires, les législations sont de plus en plus exigeantes sur le plan de la santé, ce qui est positif. Elles sont aussi de plus en plus complexes, abondantes et exigeantes techniquement notamment pour les expérimentations. Ceci mène à rendre (quasiment) impossible qu’un volontaire informé puisse tester certaines thérapies même si

  • il souhaite le faire par intérêt personnel;
  • il souhaite le faire par désir de faire avancer « la science » pour une vie en bonne santé;
  • il est très âgé et sait qu’en l’absence de thérapie efficace nouvelle, il ne lui reste probablement que quelques années à vivre;
  • il pourrait parfaitement et en toute légalité en dehors du laboratoire prendre des risques pour sa santé infiniment plus importants; rien ne lui interdit de se remettre à fumer, de boire cinq cognacs par jour et d’avaler tout ce qui se vend sans ordonnance en pharmacie sans se soucier des effets nocifs et sans personne pour l’avertir des risques.

Permettre à des volontaires informés de participer plus aisément à des recherches est donc souhaitable pour le bien des volontaires et pour le bien des frères humains qui après nous vivez.

Devoir d’information, même en cas d’échec

Le but des recherches est une vie meilleure pour tous. Il va de soi que l’effet n’est pas atteint si une découverte positive reste secrète. Dans ce cadre, il y a la question des brevets et des droits de propriété qui a été notamment abordée dans la lettre de mars 2017.

Mais il est également utile que les recherches sans amélioration soient connues. Il est même extrêmement important que les pratiques scientifiques et les législations prévoient leur communication parce que :

  • il est tentant pour des raisons psychologiques, sociales, économiques, … de dissimuler des échecs
  • et ce alors que la collectivité a tout intérêt à connaître ce qui ne « fonctionne » pas (pour ne pas reproduire inutilement des expérimentations) ainsi que les erreurs d’expérimentation commises (pour ne pas les renouveler).

Qui pourrait tester ?

À quel âge tester des thérapies nouvelles ?

La plupart des expérimentations médicales se font aujourd’hui chez des personnes relativement jeunes. La raison de ce choix est éthique, pratique et économique :

  • il s’agit de prendre des individus « solides » qui risquent moins en cas d’accident (raison éthique);
  • Il faut éviter que les sujets d’expériences aient des problèmes de santé autres que ceux pour lesquels le test est fait sinon il serait difficile de distinguer effet négatif éventuel d’une thérapie et autres problèmes de santé, en tout cas si le groupe test est de petite taille (raison pratique et économique).

Or, de plus en plus, et surtout dans les pays les plus riches, nous ne mourrons plus que de maladies liées au vieillissement. Nous vivons généralement en bonne santé de plus en plus longtemps au moins jusqu’à 65 ans, et souvent jusqu’à 75 ou même 80 ans. De plus en plus, les décès avant 75 ans sont qualifiés de décès « prématurés ». Par contre la limite supérieure de la durée de vie progresse beaucoup moins rapidement et même stagne.

Autrement dit, aujourd’hui :

  • l’essentiel des conséquences mortelles du vieillissement se passe en 15 à 20 ans d’un peu moins de 80 ans à environ 95 ans pour les hommes et d’un peu plus de 80 ans à un peu moins de 100 ans pour les femmes ;
  • alors que l’essentiel des essais thérapeutiques se fait chez des sujets jeunes c’est-à-dire qui n’ont pas besoin de thérapie.

Tester des thérapies nouvelles sur des personnes âgées de moins de 75 ou 80 ans ne permettrait donc pas de faire des constatations importantes en termes de mortalité avant une décennie, surtout si le groupe de personnes testées est réduit. Bien sûr, il y a des marqueurs biologiques qui permettent de donner des indications relatives au rythme de vieillissement, mais aucun de ces marqueurs n’est actuellement considéré comme le mesurant clairement.

Il serait même plus souhaitable encore de réaliser des tests en double aveugle sur des femmes et des hommes très âgés (hommes de plus de 90 ans, femmes de plus de 95 ans), en bonne santé pour leur âge et ayant donné un consentement informé. Attention, il ne s’agirait pas de tester une thérapie pour un groupe et de laisser l’autre groupe sans rien mais d’avoir deux groupes (voire plusieurs groupes) bénéficiant tous de soins élevés dont certains recevraient en plus une thérapie nouvelle (et d’autres un placebo).

Dans ce cas de figure, du seul fait de l’expérimentation et de son but (recherche médicale pour vivre plus longtemps en bonne santé), la durée de vie moyenne et la durée de vie moyenne en bonne santé se trouverait presque certainement allongée même pour le groupe ne recevant pas de thérapie nouvelle (car ils bénéficieraient tous de soins adaptés, dans un environnement favorable, ….).

Ce qui se fait réellement aujourd’hui

Aujourd’hui, selon les informations disponibles dans la presse, seules trois expérimentations sont connues. Aucune n’est directement organisée par une institution publique.

Le projet TAME a pour objectif de tester sur des milliers de personnes âgées américaines en bonne santé l’effet positif pour la longévité de la metformine (un médicament utilisé notamment pour le traitement du diabète).

La société Ambrosia veut expérimenter l’utilisation chez des personnes âgées américaines les effets réjuvénateurs de l’injection de sang de personnes jeunes.

Liz Parrish de la société Bioviva se définit comme le « patient 0 » (la première patiente) pour des thérapies de réjuvénation. Elle a utilisé une thérapie génétique pour l’allongement des télomères de ses cellules et un inhibiteur de myostatine pour renforcer ses capacités musculaires.

Ce qui peut se faire demain

En octobre 2017, comme chaque mois, plus de 3 millions de personnes sont décédées des suites de maladies liées au vieillissement. Chaque jour, des milliards d’euros sont consacrés pour les soins de santé aux personnes âgées dans le monde et c’est très bien pour ceux qui en bénéficient (malheureusement beaucoup de personnes âgées ne bénéficient d’aucun soin). Durant la même période, les expérimentations humaines concernant l’amélioration de la longévité n’ont concerné que quelques personnes et les investissements sont dérisoires.

Des citoyens seraient certainement volontaires pour participer à des recherches et expérimentations. Le droit des citoyens à chercher comment gagner des années de vie en bonne santé pour les autres et pour eux-mêmes pourrait être développé plus rapidement si la mobilisation à ce sujet s’accroissait.


La bonne nouvelle du mois : avancées pour les recherches relatives aux cellules sénescentes


Les recherches sur les sénolytiques (produits détruisant les cellules sénescentes) sont de plus en plus nombreuses et prometteuses. Le prestigieux magazine Nature vient de publier un article consacrée à la réjuvénation grâce à la suppression des « cellules zombies » (To stay young, kill zombie cells). L’article annonce notamment que des essais sur des êtres humains sont très proches.

Pour en savoir plus:

De manière générale, voir notamment: heales.orgsens.orglongevityalliance.org et longecity.org

A propos d’expérimentation humaine (pas seulement médicale) : en.wikipedia.org/wiki/Human_subject_research

Photo

Longévité, y-a-t-il un vaccin pour cela ? La mort de la mort. Septembre 2017. N° 102. 

 

Les progrès dans la médecine et l’agriculture ont sauvé beaucoup plus de vies que toutes celles perdues dans toutes les guerres de l’histoire. Carl Sagan 1995 (traduction)


Thème du mois : Les vaccins, un des moyens pour les progrès de la longévité


La vaccination est une forme de médecine préventive qui modifie de manière positive le corps des femmes et des hommes dès leur plus jeune âge depuis déjà plus d’un siècle. Il s’agit donc d’une forme d’augmentation, d’un éloignement positif de l’état antérieur. La peste et la variole, tout comme les poux et les ténias, accompagnaient « fidèlement » l’humanité depuis des millénaires. Petit à petit, nous apprivoisons et comprenons mieux la nature et nous nous débarrassons de certains organismes sans trop de regrets ou de remords. Il faut cependant être attentif aux conséquences collatérales possibles de la disparition de ces organismes.

Si la vaccination n’était pas là depuis des décennies mais commençait à être utilisée aujourd’hui, elle serait très probablement vue comme une avancée énorme. L’opposition serait moindre que l’opposition actuelle aux vaccins. En effet, nous verrions mieux les innombrables vies sauvées et les effets secondaires apparaîtraient totalement négligeables.

Le nombre d’existences sauvées grâce aux vaccinations se compte en centaines de millions. Les années de vie en bonne santé gagnées se compte en milliards. La variole, dont certaines variantes provoquaient un taux de mortalité de 30 % est aujourd’hui éradiquée. La rougeole qui provoquait encore la mort d’environ 650.000 personnes en l’an 2000 a causé la mort de moins de 150.000 personnes en 2015.

Pour beaucoup de ces maladies, la petite phrase Ce qui ne te tue pas te rend plus fort est tout à fait incorrecte. La fièvre typhoïde, je l’ai eue. On en meurt ou on en reste idiot. aurait peut-être dit le maréchal Mac Mahon à la fin du 19ème siècle. Les survivants de la variole comme les personnes qui ne mouraient pas de la poliomyélite ne guérissaient que partiellement, restaient profondément marqués leur vie durant.

Demain

Les personnes âgées qui décèdent actuellement succombent principalement suite à des maladies cardiovasculaires, à des cancers et à des maladies neurodégénératives.

Mais ces personnes meurent également fréquemment en tant que victimes de maladies contagieuses. L’affaiblissement global suite à la sénescence et particulièrement la perte d’efficacité du système immunitaire les rend vulnérables à des maladies qui sont devenues bénignes pour presque tous les autres citoyens. En fait, de nombreuses maladies contagieuses, à commencer par la grippe et la tuberculose, ont presque cessé d’être des maladies mortelles lorsque des soins corrects sont prodigués, sauf pour les personnes âgées. Ainsi en France en 2013, environ 85 % des décès causés par les maladies infectieuses et parasitaires ont eu lieu chez des personnes de plus de 65 ans.

Pour ces personnes âgées, les progrès de la vaccination peuvent sauver bien des vies.

Le cas le plus connu est celui de la grippe. Nous savons que le virus mute chaque année et que le vaccin est plus ou moins efficace d’une année sur l’autre, mais un taux supérieur de vaccination est facteur de gain de vies.

L’efficacité des vaccins varie selon le type de maladie et aussi selon le pourcentage de la population couverte. En plus de la vaccination, les mesures d’hygiène et de prophylaxie ont également un impact positif considérable car elles contribuent largement à réduire la transmission des affections.

Au fur et à mesure de l’avancée en âge, nous sommes de plus en plus nombreux à être infectés, généralement sans le savoir par l’une ou l’autre variante du virus de l’herpès. Dans certaines régions, à partir d’un certain âge, la quasi-totalité de la population peut être atteinte. Les effets de ces virus sont bénins pour les personnes jeunes mais plus importants pour les personnes plus âgées. Une vaccination des citoyens pourrait diminuer la mortalité.

Après-demain

Dans un récit de science-fiction déjà ancien (le Grand Secret de René Barjavel), c’est un virus qui rend les humains (et d’autres animaux) immortels. Ce virus pouvait être injecté et c’était donc en quelque sorte un « vaccin » contre la mort. Dans ce récit, les grands de ce monde décidaient de garder la thérapie secrète avant de détruire les « immortels ».

Est-ce qu’un vaccin qui rendrait, non pas immortel mais « amortel », c’est-à-dire sans mort par vieillissement, est concevable ?

Au sens strict, un vaccin ne lutte que contre une maladie ou un ensemble de maladies. Donc un vaccin contre l’ensemble des mécanismes du vieillissement ne serait pas envisageable. Mais ce qui est envisageable, c’est qu’un jour, une simple injection ou absorption de substance puisse permettre une vie beaucoup plus longue, voire sans limitation de durée.

Nous savons que la durée de vie maximale des animaux est étroitement liée à leur patrimoine génétique avec des différences qui peuvent être très importantes pour des espèces biologiquement proches. Nous savons également comment réaliser une thérapie génique en injectant des virus qui introduisent des gènes utiles. Ceci n’est actuellement cependant possible que dans des cas très spécifiques à savoir certaines maladies génétiques rares. La société Bioviva a également réalisé une thérapie génique spécifiquement contre le vieillissement mais dans un cadre très spécifique.

Il est concevable qu’un jour lointain, nous ayons une injection qui ressemblerait à un « vaccin de la longévité ». Mais nous en sommes encore bien loin, notamment parce que, en ce qui concerne les êtres humains, nous n’avons pas (encore?) trouvé de gènes fortement associés à une vie en bonne santé beaucoup plus longue.

Plus hypothétique encore, nous pourrions un jour injecter dans nos corps des nanorobots capables de détruire nos cellules sénescentes et les substances et virus nocifs et aptes à renforcer des organes déficients. Ceci est bien sûr fort différent d’une vaccination. Mais, comme pour les thérapies géniques et comme pour les vaccinations, le concept est l’introduction d’une substance extérieure provoquant une sorte de réaction en chaîne bénéfique. Bien sûr, il faudra être attentif aux effets secondaires possibles de l’ingestion de corps étrangers. Ceci étant, au cours d’une existence ordinaire, un être humain absorbe en respirant des centaines de milliers de mètres cubes d’air contenant des kilos de poussière et des milliers de petits insectes. Il mangera des dizaines de mètres cubes d’aliments divers et variés involontairement accompagnés de bien des kilos de substances totalement indigestes.

Dans les deux cas envisagés pour des thérapies futures, comme dans les vaccinations contemporaines, ce qui fait du bien à l’intérieur et nous transforme positivement ne se voit pas à l’extérieur. Nous serons les mêmes d’apparence extérieure demain que nous sommes aujourd’hui. Tout comme nous sommes aujourd’hui physiquement peu différents de nos lointains parents du paléolithique. Mais ceux-ci, durant 98 % de l’histoire de l’humanité (jusqu’il y a moins de 10.000 ans), ne vécurent jamais plus de 50 ans.

Un jour pourrait venir où nous garderons et même améliorerons notre apparence extérieure ainsi que… notre capacité à nous aimer les uns les autres, bien plus longtemps qu’aujourd’hui.


La bonne nouvelle du mois : Plus de mobilisation pour tester des thérapies pour la longévité


Un intéressant article dans le presse belge était intitulé Ces métiers qui tuent la mort. Il détaillait (malgré des approximations) des pistes pour la longévité. Mais à côté des métiers utiles pour lutter contre la mort, il faut encore vérifier l’efficacité du travail pour les milliards de « bénéficiaires » potentiels (tous les humains).

Au moins deux initiatives privées sont en cours dans ce domaine:

  • L’organisation Better Humans annonce l’organisation de tests avec des “sénolytiques »
  • L’association Rescue our Elders rassemble des informations quant à de nombreuses recherches et encourage des citoyens à se porter volontaires pour leur bien et le bien collectif.

Pour en savoir plus :

 

Longévité, y-a-t-il une app pour cela ? La mort de la mort. Août 2017. N° 101. 

J’ignore si je veux l’immortalité, mais je suis raisonnablement certain que je ne souhaite pas mourir aussi longtemps que je ne veux pas mourir. Nikola Danaylov, futuriste auteur du blog Singularity, 2017 (traduction).


Thème du mois: Smartphones, autres technologies portables de santé  et longévité


La science-fiction de Star Trek, nous l’avons dépassée

En un peu plus de 25 ans, nous avons connu dans le domaine technologique, deux bouleversements majeurs et qui se combinent tellement bien que nous n’en voyons plus qu’un.

Le 1er bouleversement est celui d’internet. A partir des années 90, pour les scientifiques d’abord puis pour le public large, l’information est devenue de plus en plus accessible virtuellement.

Le second bouleversement est celui de la téléphonie mobile. Il débute également dans les années 90 d’abord pour les citoyens aisés et puis rapidement pour la majorité des habitants de la planète, y compris les plus pauvres.

C’est depuis à peine 10 ans que les deux technologies se fondent pour permettre des instruments dépassant les rêves les plus fous des auteurs de science-fiction du passé.

Beam me up, Scotty disait le capitaine Kirk dans Star Trek. Aujourd’hui la téléportation n’est plus nécessaire pour communiquer puisque quasiment tout ce qui est information est dématérialisable, accessible à presque tous et presque partout et ceci dans un instrument d’une centaine de grammes et pouvant coûter moins de 100 euros. Se déplacer n’est plus nécessaire pour parler à un ami, connaître la température à Honolulu, voir la terre depuis l’espace ou lire les déclarations publiques, les communications et les décisions de milliards de personnes, organisations, administrations et entreprises. Il en va de même pour prendre connaissance des communications médicales depuis celles de l’Organisation mondiale de la Santé jusqu’aux informations de tout petits groupes de patients rassemblés par-delà les frontières.

L’être humain a des capacités extraordinaires qui ont rendu cela possible. Il a aussi la capacité de s’habituer tellement vite à ces progrès qu’il s’en servira plus pour partager des vidéos de chats et enfants charmants et pour se plaindre de lendemains qui ne chantent pas assez que pour améliorer sa santé.

C’est probablement notamment pour cela que le tricorder médical qui dans Star Trek était utilisé par les médecins pour aider à diagnostiquer les maladies et recueillir des informations corporelles sur un patient reste, lui, en 2017, de la science-fiction.

Les applications de santé dans les téléphones intelligents

Des dizaines de milliers d’applications de santé sont disponibles aujourd’hui dans les environnements Apple et Google. Il y a notamment des applications :

– servant les professions médicales
– servant les patients dans le cadre de traitements
– effectuant des mesures de santé (les plus utilisées).

Alors que le domaine médical est généralement fortement réglementé, un processus de certification n’a été que rarement appliqué en la matière. La grande facilité pour réaliser ces applications, le nombre considérable de groupes tentant de vendre leur produit et l’absence de contrôle systématique limitent l’utilisation médicale. En réalité, les produits les plus connus comme l’application Santé d’Apple ou les bracelets Fitbit sont surtout utilisés pour la mesure de l’exercice de personnes en bonne santé, mesurant bien plus le fitness que la santé.

Les capteurs connectés

De très nombreuses solutions existent, notamment pour tout ce qui est de la surveillance des personnes malades. Des systèmes de surveillance à distance existaient d’ailleurs déjà avant l’arrivée d’Internet. Mais ici aussi, alors que la fiabilité peut être une question de vie ou de mort pour les patients les plus âgés ou pour ceux souffrant de certaines maladies à déclenchement brusque, le niveau de performance reste malheureusement faible.

Il est – négativement – fascinant de constater qu’il n’existe à ce jour aucun capteur connecté largement reconnu comme efficace qui pourrait avertir à distance lorsqu’une personne a des troubles importants de santé. Il faut que la personne âgée « appelle à l’aide ». Aujourd’hui, le réseau (et surtout Google) peut deviner où vous allez, vous rappeler vos rendez-vous, vous avertir du départ de votre avion, compter vos pas, déterminer l’endroit où vous êtes à quelques dizaines de centimètres près. Mais les créateurs d’objets connectés restent à ce jour incapables de créer un bracelet (ou un autre dispositif) détectant efficacement « tout seul » et sans risque d’erreur ou de fausse alerte des problèmes sérieux de santé.

Les perspectives

A terme, des dispositifs de mesure pourraient être portés par tous ceux qui le souhaitent pour mesurer l’activité, la respiration, les battements cardiaques et prévenir lorsque des problèmes se posent. Il est aussi envisageable d’avoir des capteurs ailleurs, par exemple dans les cuvettes des WC. Ce n’est pas la plus poétique des analyses médicales, mais cela serait une source considérable d’information concernant l’alimentation et de nombreuses affections.

Enfin, il est concevable d’avoir des capteurs à l’intérieur du corps qui pourraient détecter par exemple des agrégats graisseux dangereux, des virus, des signes de maladies cardiovasculaires, des cellules cancéreuses… Au fur et à mesure des progressions en matière de miniaturisation et de transmission, l’efficacité augmente et le caractère invasif diminue.

Dans un monde qui ferait de la santé, de la prévention et de la recherche médicale une priorité, il est imaginable que ces informations ne seraient pas uniquement utiles aux patients mais qu’elles seraient également, sauf opposition expresse des intéressés, rassemblées et analysées après anonymisation.

Les risques

Aujourd’hui, la plupart de ces technologies sont encore d’une fragilité et d’une imprécision importantes. Le degré de redondance et la précision doivent être considérablement renforcés et des mécanismes de contrôle équivalents à ceux des autres domaines médicaux sont nécessaires pour une utilité optimale pour les citoyens. Mais au-delà de ces questions qui ne nécessitent « que » du travail médical et informatique, il y a la question de la sécurité vis-à-vis de personnes mal intentionnées. Les plus grands experts informatiques ne se fient pas uniquement à l’informatique pour leur webcam, ils ajoutent aussi un bout de sparadrap pour empêcher physiquement tout « hacker » de regarder.

Une action similaire ne sera pas toujours possible dans le domaine de la santé, particulièrement pour des capteurs internes. Il faudra donc des recherches poussées au niveau informatique et également au niveau législatif et réglementaire.

Demain, un téléphone intelligent, sanitaire et solidaire ?

Nous nous servons quotidiennement de nos smartphones pour des buts innombrables, mais pas assez pour ceux de santé, moins encore en termes collectifs. Nous sommes des milliards à avoir accepté une perte d’anonymat et une prise de risques vis-à-vis des réseaux sociaux, mais nous sommes beaucoup plus réticents pour partager nos données de santé. Pourtant, la majorité d’entre nous serait d’accord de partager des données pour sauver d’autres vies, certainement si l’anonymat est garanti et probablement même si cela comportait des inconvénients mineurs. La création d’un environnement culturel, social, médical… favorable à ces mises en commun de données pourrait être un des moteurs de la recherche collective pour une vie en bonne santé beaucoup plus longue.

Les bonnes nouvelles du mois. Succès de la Raadfest. Longévité accrue en Belgique.

La Raadfest (Revolution against Aging and Death) a rassemblé début août à San Diego des centaines de personnes. Pendant près de 4 jours, plusieurs des plus grands spécialistes mondiaux du vieillissement et aussi de nombreux activistes de la longévité, se sont rencontrés.

C’était un show à l’américaine, pas uniquement avec des gens totalement sérieux. Mais il y avait un enthousiasme qui faisait plaisir à voir et une volonté affichée de partager des informations illustrée notamment par un site internet « Society for the Rescue of Our Elders » (Société pour le sauvetage de nos personnes âgées).

Et dans la vraie vie, en Belgique comme ailleurs, la durée de vie continue de globalement progresser. Après une légère baisse en 2015, en 2016, elle progresse de 0,4 année. La direction statistique du SPF (ministère fédéral belge) Economie écrit Les  tables  trisannuelles  permettent  également  d’observer  que  l’espérance  de  vie  à  la  naissance augmente  pour  passer  de  77,38  ans  en  1996-1998  à  81,08  ans  dans  la  table  de  2014-2016,  sans  subir  aucune baisse (sur base trisannuelle) dans l’intervalle.


Pour en savoir plus: