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Lettre d’information mensuelle de Heales. La mort de la mort N190. Février 2025. Impact des nanoparticules sur la santé


Pourquoi vouloir prolonger radicalement la vie ? Parce que tout ce qui a de la valeur demande du temps. Du temps pour écrire, lire, créer et peaufiner des œuvres qui nous apportent un sens profond. Du temps pour apprendre plusieurs langues, pour découvrir les multiples facettes de notre identité, pour réinventer la meilleure version de nous-mêmes. Du temps pour aimer et être aimé. Du temps pour élever des enfants, prendre soin de petits-enfants et jouer avec des arrière-petits-enfants — tout cela fait partie du développement progressif de l’amour. Yana D’Cortona, étudiante en médecine, 9 janvier 2025.


Thème du mois : L’impact des nanoparticules sur notre corps.


Les nanoparticules créées directement ou indirectement par les humains sont globalement de plus en plus nombreuses, même s’il y a des améliorations dans certains domaines. Ces particules sont invisibles à l’œil nu (1-100 nanomètres), omniprésentes dans notre environnement et s’infiltrent dans notre organisme par différentes voies dont la respiration, l’ingestion ou l’exposition cutanée. Leur taille infime leur permet de traverser les voies respiratoires, le système digestif et d’autres routes pour franchir les barrières biologiques (air-sang, hémato-encéphalique, placentaire) et atteindre le cerveau, où elles peuvent potentiellement interagir avec nos cellules. Ces interactions, encore mal comprises, soulèvent une question essentielle : comment ces particules infimes influencent-elles notre santé ?

De manière générale, il peut être, malheureusement, affirmé que beaucoup de nanoparticules accélèrent le vieillissement ou augmentent la probabilité de cancers. A ce jour, heureusement, les bénéfices des progrès médicaux continuent à l’emporter sur les effets des pollutions, mais des effets désastreux à moyen et à long terme de nanomatériaux (éventuellement combinés en « cocktails toxiques » ne sont pas exclus.  

Comment les nanoparticules entrent dans notre corps ?

Parmi les voix d’absorptions des nanoparticules, nous allons étudier ici deux principales voies :

  1. Respiration : Inhalation des nanoparticules en suspension dans l’air. Elles peuvent atteindre les poumons et le cerveau. 
  2. Ingestion :
    – Par l’alimentation : Ingestion de particules contenues dans les aliments et impact sur le système digestif.
    – Par hydratation : Consommation d’eau contenant des nanoparticules favorisant leur absorption par les organes vitaux.

Nanoparticules dans l’air : Inhalation et risques respiratoires

Les nanoparticules en suspension dans l’air proviennent de la pollution industrielle, des gaz d’échappement, des feux de forêt et de certaines activités domestiques. Lorsqu’elles sont inhalées, elles peuvent atteindre les poumons et passer dans la circulation sanguine.

Parmi elles, on peut retrouver : Les nanoparticules (Np) de dioxyde de titane (TiO₂) utilisées dans les peintures et cosmétiques (crèmes solaires) qui peuvent provoquer, lorsqu’elles sont générées en grande quantité, des inflammations pulmonaires. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a déclaré que les NP de TiO2 étaient « peut-être cancérogènes lorsqu’elles sont inhalées » et a souligné la nécessité de mieux comprendre leurs effets néfastes potentiels par différentes voies d’exposition chez l’homme. Des études ont montré qu’elles peuvent traverser la barrière placentaire et atteindre les organes fœtaux (foie, cerveau) chez la souris, entraînant des troubles du développement et des dommages neuronaux.

Les nanoparticules issues de la combustion des carburants fossiles, notamment la suie et le noir de carbone, sont omniprésentes dans notre environnement. La toxicité des particules de suies provient de ses caractéristiques physico-chimiques. Les particules de suies pénètrent profondément dans l’appareil respiratoire, et sont difficilement éliminées des alvéoles pulmonaires. Ces particules fines pénètrent profondément dans les voies respiratoires, augmentant le risque d’asthme et de maladies cardiovasculaires. En 2013, e CIRC a classé la suie comme agent cancérogène certain (Groupe 1) chez les professionnels du ramonage, en raison de son association avec des cancers de la peau et du poumon. 

Par ailleurs, on peut retrouver dans l’air des nanoparticules de métaux lourds tels que le plomb, le mercure et le cadmium, présentes dans les émissions industrielles. Les métaux lourds ne peuvent pas être dégradés ou attaqués par des bactéries. L’Agence de protection de l’environnement des États-Unis (USEPA) a classé le mercure, le cadmium et le plomb parmi les polluants les plus toxiques. L’exposition à ces métaux lourds peut entraîner des effets neurotoxiques, perturbant le système nerveux.
Par exemple, le plomb est reconnu pour ses effets neurotoxiques marquants, affectant le développement neurologique et la transmission neuronale. Le mercure, quant à lui, peut entraîner des troubles neurologiques graves tels que la maladie de Minamata. L’exposition par voie orale à de fortes doses de cadmium peut provoquer une grave irritation gastro-intestinale et d’importants effets sur les reins. L’exposition chronique par inhalation a été associée à des effets sur les poumons, notamment l’emphysème, ainsi que sur les reins. Il peut également causer une atteinte osseuse.


Une étude de cas montre l’impact des nanoparticules atmosphériques sur la mortalité au Canada : Une étude menée entre 2001 et 2016 au Canada a révélé que l’exposition prolongée au nanoparticules atmosphérique est associée à une augmentation significative du risque de mortalité non accidentelle (+7,3 %) et, plus particulièrement, de mortalité respiratoire (+17,4 %). À Montréal et Toronto, cette pollution entraînerait environ 1 100 décès supplémentaires par an. Ces résultats soulignent l’urgence d’intégrer les nanoparticules dans les politiques de régulation de la qualité de l’air afin de limiter leurs effets néfastes sur la santé publique.

Nanoparticules présentes dans la chaîne alimentaire. 


Les métaux lourds comme le mercure (Hg), le cadmium (Cd), le plomb (Pb), l’arsenic (As) et le chrome (Cr) sont présents dans l’environnement, due à des activités industrielles, agricoles ou urbaines. Ces activités mènent à leur incorporation dans les sols, les eaux et les sédiments, affectant ainsi les organismes vivants  dont les humains. À chaque niveau trophique, la concentration des métaux augmente. Par exemple, un poisson contaminé par du mercure sera mangé par un prédateur, qui accumulera encore plus de mercure dans son organisme. Ce phénomène est appelé la biomagnification. 

Principales sources alimentaires :

  • Poissons et fruits de mer : Contamination par le mercure, en particulier le méthylmercure, qui est neurotoxique. Une étude récente (2024) a révélé qu’une boîte de thon (espèce prédatrice) sur dix dépasse la limite de mercure autorisée en Europe, exposant les consommateurs à des risques sanitaires
  • Légumes et céréales : Absorption des métaux lourds via des sols pollués.
    Dans une étude réalisée au Canada en 2021, la présence d’arsenic a été détectée en forte concentration (jusqu’à 2,20 ppm) dans les poudres végétales (92 % des échantillons concernés). Les légumes-feuilles, comme le chou frisé, montraient également une contamination plus importante que les autres légumes en raison de leur forte capacité d’absorption des particules du sol.
  • Viande et produits laitiers : Accumulation par ingestion d’aliments contaminés par le bétail.

Les nanoparticules d’oxyde de zinc (ZnO) et de cuivre (CuO) utilisées en agriculture, interviennent dans la perturbation du microbiote intestinal. En mangeant des aliments contaminés, nous absorbons ces particules qui peuvent s’accumuler dans nos organes vitaux (foie, reins, cerveau), provoquant des intoxications chroniques, des troubles digestifs et des maladies métaboliques.

Nanoparticules dans l’eau : Boissons et impact sur l’organisme

Les nanoparticules trouvées dans l’eau proviennent des déchets industriels, des microplastiques et des produits chimiques. Les nanoplastiques (PE, PP, PET) : présents dans l’eau du robinet et les eaux en bouteille, connus maintenant comme pouvant atteindre le système hormonal (Campanale et al., 2020). Les nanoparticules d’argent (AgNPs) : utilisées pour leurs propriétés antibactériennes dans certains filtres et emballages alimentaires, peuvent affecter le microbiote intestinal.Nanoparticules de métaux lourds (plomb, mercure, arsenic, cadmium) : présentes dans l’eau potable et certaines sources d’eau contaminées, peuvent s’accumuler dans notre organisme et entraîner des risques neurologiques et rénaux (Khan et al., 2019).

Effet génotoxique de certaines nanoparticules

Les nanoparticules (NPs) de cuivre, de zinc, d’argent et les quantum dots suscitent une attention particulière en raison de leurs effets génotoxiques potentiels, principalement liés à la génération d’espèces réactives de l’oxygène (ROS), responsables de dommages à l’ADN. Les ZnNPs, couramment présentes dans les crèmes solaires et les produits cosmétiques, peuvent libérer des ions Zn²⁺, induisant un stress oxydatif qui altère l’ADN. Des études in vitro ont confirmé leur génotoxicité en mettant en évidence des lésions à l’ADN. De même, les quantum dots, souvent composés de métaux lourds tels que le cadmium (Cd) ou le sélénium (Se), peuvent libérer des ions toxiques capables de générer un stress oxydatif et de provoquer des dommages génétiques.
Bien que les nanoparticules puissent représenter un risque pour la santé, elles offrent des solutions innovantes pour lutter contre le vieillissement cellulaire en ciblant ses mécanismes clés. 

Applications des nanoparticules en médecine : Nanotechnologie. 

Les nanoparticules ont également été étudiées pour leur impact positif sur la santé. En effet, elles peuvent réparer les dommages à l’ADN en délivrant des enzymes réparatrices, comme le montrent les nanoparticules d’or qui réduisent les mutations liées à l’âge. Elles agissent également contre le stress oxydatif grâce à des nanoparticules antioxydantes, telles que celles à base de dioxyde de cérium (CeO₂), qui protègent les cellules des radicaux libres. De plus, les nanoparticules peuvent éliminer les cellules sénescentes en transportant des médicaments sénolytiques, comme la quercétine, réduisant ainsi l’inflammation et les dommages tissulaires. Enfin, elles contribuent à la protection des télomères en délivrant des agents comme la télomérase, prolongeant la durée de vie des cellules. Ces applications positionnent les nanoparticules comme des outils prometteurs pour ralentir ou inverser le vieillissement cellulaire.


Conclusions et perspectives :

Les nanoparticules, en raison de leur petite taille et de leur capacité à pénétrer profondément dans notre organisme, présentent à la fois des risques pour la santé et des possibilités d’innovations thérapeutiques. Leur omniprésence dans l’environnement et leur présence dans l’air, l’eau et la chaîne alimentaire soulignent l’importance d’étudier et de comprendre leurs effets à long terme. 

Dans ce domaines comme dans d’autres, il est urgent et vital de :

  • Rendre accessible les données relatives aux densités de nanoparticules dans le corps humain et l’impact connu, négatif ou (malheureusement plus rarement) positif.
  • Référencer toute connaissance quant à des « effets cocktail » négatifs (ou malheureusement plus rarement) positifs.
  • Organiser chaque fois que possible pour des nanoparticules nouvelles ou de plus en plus utilisées des examens de longévité comparant la durée de vie de souris (ou autres animaux) avec et sans les substances concernées.
  • Obliger les entreprises développant des nanomatériaux à partager les données relatives aux effets de santé des substances, particulièrement celles pour lesquelles elles ont des brevets.    

En parallèle de l’étude des nanoparticules, il est également crucial d’examiner l’impact des microplastiques, une catégorie de particules plastiques de taille supérieure (< 5 mm), mais toujours préoccupante en raison de leur omniprésence dans notre environnement. Bien que leur impact direct sur la santé humaine soit encore moins documenté que celui des nanoparticules, les microplastiques suscitent des inquiétudes en raison de leur capacité à transporter des substances toxiques et à s’accumuler dans des zones spécifiques du corps, comme le système digestif et, plus grave encore, le cerveau . Ce sujet sera exploré plus en détail dans une prochaine newsletter.


Les mauvaises nouvelles du mois : Les Etats-Unis et la Santé.


Parmi le tsunami d’initiatives, la nouvelle administration américaine du président Trump a pris des décisions qui ont, au moins à court terme des effets généralement considérés comme négatifs pour la santé des américains de de la population mondiale:

Il en va ainsi notamment:

De la sortie de l’Organisation mondiale de la Santé. Les USA seront ainsi, avec le Liechtenstein, le seul État membre des Nations-Unies non membre de l’OMS. Il faut rappeler que:


Pour en savoir plus :

Lettre d’information mensuelle de Heales. La mort de la mort n° 189. Décembre 2024. Barrière hémato-encéphalique et vieillissement


La vérité est, bien sûr, que la mort ne devrait pas plus être considérée comme un élément acceptable de la vie que la variole ou la polio, deux maladies que nous avons réussi à maîtriser sans nous dénoncer comme prétentieux. Alan Harrington, L’immortaliste. Source.


Le thème de ce mois-ci : Barrière hémato-encéphalique et vieillissement


Qu’est-ce que la barrière hémato-encéphalique (BHE) ?

La BHE est une barrière hautement sélective formée par les cellules endothéliales des capillaires cérébraux, soutenues par des péricytes, des astrocytes et la matrice extracellulaire. Elle régule les échanges de substances entre la circulation sanguine et le cerveau, protégeant ce dernier des toxines, des agents pathogènes et des molécules inflammatoires, tout en laissant passer les nutriments et les gaz essentiels.

BHE et longévité

Avec l’âge, la BHE tend à devenir plus perméable, ce qui entraîne des problèmes de santé :

  • Augmentation de la neuroinflammation : Les fuites de la BHE permettent aux cellules immunitaires périphériques et aux molécules inflammatoires de pénétrer dans le cerveau, contribuant ainsi à une neuroinflammation chronique. 
  • Accumulation de toxines : l’altération de la BHE entraîne une réduction de la clairance des substances neurotoxiques telles que la bêta-amyloïde, impliquée dans les maladies neurodégénératives telles que la maladie d’Alzheimer. 
  • Réduction du transport des nutriments : L’efficacité du transport des nutriments et de l’oxygène diminue, ce qui affecte la fonction neuronale et le métabolisme énergétique. 
  • Stress oxydatif : Les dommages oxydatifs liés au vieillissement compromettent davantage l’intégrité de la BHE, exacerbant le déclin cognitif.

Le processus de vieillissement a un impact significatif sur la barrière hémato-encéphalique (BHE), entraînant un déclin fonctionnel qui contribue aux maladies neurodégénératives et aux troubles cognitifs. La sénescence des cellules endothéliales associée à l’âge perturbe les jonctions serrées et augmente la perméabilité de la BHE, ce qui permet aux substances nocives de s’infiltrer dans le cerveau et d’en compromettre l’intégrité. Les cellules endothéliales cérébrales (CEB) sénescentes présentent également des altérations phénotypiques, notamment une altération de la régulation des jonctions serrées, ce qui aggrave le dysfonctionnement de la BHE au cours du vieillissement.

En outre, le déclin de la BHE varie selon les régions du cerveau et les facteurs démographiques, des études montrant un déclin plus marqué chez les hommes que chez les femmes dans les régions pariétales et temporales dès les années 60, probablement en raison de mécanismes de protection fondés sur le sexe. Les modifications structurelles des composants de la BHE, tels que les astrocytes et les péricytes, compromettent encore davantage son homéostasie, reliant ces altérations aux voies des maladies neurodégénératives. L’augmentation de la perméabilité de la BHE due à des facteurs de risque vasculaire tels que l’hypertension est également en corrélation directe avec les lésions de la substance blanche et le déclin cognitif, ce qui souligne l’importance de la santé vasculaire dans l’atténuation de ces effets.

Le maintien de l’intégrité de la BHE est essentiel pour la santé cognitive et la longévité globale :

  • Réserve cognitive : La fonction intacte de la BHE favorise la santé neuronale, réduisant le risque de déclin cognitif lié à l’âge et de démence, déterminants majeurs de la qualité de vie chez les personnes âgées. 
  • Couplage neurovasculaire : Une fonction saine de la BHE favorise un couplage neurovasculaire optimal, essentiel à la plasticité cérébrale et aux mécanismes de réparation. 
  • Impact sur le vieillissement systémique : Le dysfonctionnement de la BHE peut entraîner une signalisation inflammatoire systémique, accélérant les processus de vieillissement dans d’autres systèmes organiques.

Plusieurs stratégies sont prometteuses pour maintenir l’intégrité de la BHE et favoriser la longévité :

L’exercice physique favorise la santé vasculaire, réduit l’inflammation et renforce l’intégrité de la BHE. Des études animales ont montré que l’exercice aérobie augmentait l’expression des protéines de la jonction serrée et réduisait le stress oxydatif. Le régime méditerranéen, riche en antioxydants, en acides gras oméga-3 et en polyphénols, réduit le stress oxydatif et l’inflammation, protégeant ainsi la BHE. Une restriction calorique modérée peut réduire la perméabilité de la BHE liée à l’âge en diminuant l’inflammation systémique. Les acides gras oméga-3 contenus dans l’huile de poisson renforcent l’intégrité de la BHE en réduisant l’inflammation et en favorisant la fonction des cellules endothéliales. Présents dans les baies, le thé vert et le chocolat noir, les flavonoïdes protègent contre le dysfonctionnement de la BHE grâce à leurs propriétés antioxydantes. Les vitamines E et C neutralisent les radicaux libres, protégeant ainsi les cellules endothéliales de la BHE des dommages oxydatifs.

L’axe cerveau-intestin et la barrière hémato-encéphalique (BHE) 

Il s’agit de systèmes intimement liés qui jouent un rôle crucial dans le maintien de la santé neurologique et gastro-intestinale. L’axe cerveau-intestin est un réseau de communication bidirectionnel impliquant le système nerveux central, le système nerveux entérique, le microbiote intestinal et les systèmes immunitaire et endocrinien. Cet axe permet au cerveau et à l’intestin de s’influencer mutuellement par le biais de voies neuronales, hormonales, immunitaires et microbiennes. La BHE, quant à elle, sert de barrière protectrice qui régule le transport de substances entre la circulation sanguine et le cerveau. Le système nerveux central est ainsi protégé des toxines, des agents pathogènes et des fluctuations de la chimie du sang, tout en conservant l’accès aux nutriments et aux molécules de signalisation.

Les perturbations de la connexion cerveau-intestin-BHE ont des conséquences importantes sur la santé et la maladie. Des affections telles que les maladies neurodégénératives (par exemple, les maladies d’Alzheimer et de Parkinson), les troubles mentaux (par exemple, la dépression et l’anxiété) et les maladies auto-immunes (par exemple, la sclérose en plaques) sont de plus en plus souvent liées à un tel dysfonctionnement. De même, la dysbiose intestinale peut exacerber ces conditions en modifiant la production de neurotransmetteurs, les réponses immunitaires et la signalisation métabolique.

Thérapeutiques émergentes

La BHE est constituée de cellules spécifiques. Pour protéger la barrière du vieillissement ou même la rajeunir, des traitements ciblant directement ces cellules peuvent être envisagés.

Sénolytiques : Une étude récente a examiné les biomarqueurs non invasifs et leurs réponses à une thérapie sénolytique combinant le dasatinib et la quercétine (D + Q) chez les souris PS19, un modèle de tauopathie largement utilisé. Cette étude a révélé  que le traitement D + Q favorisait un changement du phénotype microglial d’un état associé à la maladie à un état homéostatique, réduisant les caractéristiques de la sénescence. En outre, les souris PS19 traitées au D+Q ont montré une amélioration des performances cognitives dans un test de conditionnement de la peur par traçage, ce qui indique une amélioration de la mémoire associée aux indices.

Inhibiteurs de mTOR : Les résultats d’une étude récente identifient l’activité de mTOR comme un facteur clé de la rupture de la BHE dans la maladie d’Alzheimer (MA) et potentiellement dans les troubles cognitifs d’origine vasculaire. Ils suggèrent également que la rapamycine et les composés apparentés (rapalogs) pourraient servir d’agents thérapeutiques pour restaurer l’intégrité de la BHE dans ces conditions. Cette étude met en évidence la cible mammalienne/mécanique de la rapamycine en tant que régulateur critique de la dégradation de la BHE dans les modèles de la maladie d’Alzheimer et des troubles cognitifs vasculaires. Elle souligne le potentiel des médicaments ciblant la mTOR pour restaurer l’intégrité de la BHE et atténuer la progression de la maladie.

Le polypeptide activateur de l’adénylate cyclase hypophysaire (PACAP) est une molécule naturelle qui a des effets protecteurs et de soutien de la croissance sur les cellules cérébrales. Comme le PACAP et son récepteur, le PAC1, sont présents dans les régions du cerveau touchées par la maladie d’Alzheimer, cette étude examine si le PACAP pourrait être un traitement utile de la maladie d’Alzheimer. Une étude a testé la PACAP sur un modèle murin de la maladie d’Alzheimer en administrant cette molécule quotidiennement par le nez aux souris pendant une période prolongée. Ce traitement a favorisé un traitement plus sain de la protéine précurseur de l’amyloïde (APP), ce qui a réduit la production de protéines bêta-amyloïdes (Aβ) nocives. Il a également augmenté les niveaux de facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF), qui favorise la santé cérébrale, et de Bcl-2, une protéine qui prévient la mort cellulaire.

Autres barrières du corps humain

1. Barrières physiques

Elles constituent la première ligne de défense pour bloquer l’entrée de substances ou d’organismes nocifs.

  • La peau : Une couche externe résistante (stratum corneum) empêche l’entrée des agents pathogènes et minimise la perte d’eau. Elle agit comme un bouclier mécanique.
  • Membranes muqueuses : Elles tapissent les cavités du corps (par exemple, les voies respiratoires, digestives et urogénitales). Produisent du mucus pour piéger les microbes et les particules.
  • Les jonctions serrées : Elles se trouvent entre les cellules épithéliales de tissus tels que l’intestin et la barrière hémato-encéphalique, empêchant le passage de substances nocives.

2. Barrières chimiques

Il s’agit de substances produites par l’organisme pour neutraliser ou détruire les agents pathogènes.

  • Niveaux de pH : L’environnement acide de l’estomac (acide gastrique, pH ~1,5-3,5) tue les agents pathogènes ingérés. Le pH de la peau et du vagin (légèrement acide) empêche la croissance microbienne.
  • Enzymes : Les lysozymes présentes dans la salive, les larmes et le mucus décomposent les parois cellulaires bactériennes. Les enzymes digestives (par exemple, la pepsine dans l’estomac) dégradent les protéines microbiennes.
  • Peptides antimicrobiens : Les défensines et les cathélicidines perturbent les membranes microbiennes et inhibent la croissance des agents pathogènes.
  • Sueur et sébum : contiennent des composés antimicrobiens et créent un environnement inhospitalier pour les bactéries.

3. Barrières biologiques

Il s’agit d’organismes vivants ou de systèmes de l’organisme qui se protègent contre les agents pathogènes.

  • Microbiote (flore) : Les bactéries commensales de l’intestin, de la peau et d’autres zones rivalisent avec les pathogènes pour les ressources et l’espace. Elles produisent des substances (par exemple, de l’acide lactique) qui inhibent les microbes nuisibles.
  • Cellules immunitaires : Les phagocytes (par exemple, les macrophages, les neutrophiles) engloutissent et détruisent les agents pathogènes. Les cellules tueuses naturelles (NK) ciblent les cellules infectées ou anormales.

4. Barrières spécialisées

Certaines structures servent de mécanismes de protection avancés.

  • Barrière placentaire : Protège le fœtus en régulant les échanges de nutriments, de gaz et de déchets tout en empêchant le passage de substances nocives.
  • Barrière cornéenne : Elle protège l’œil et comprend une structure multicouche (épithélium, stroma et endothélium).

Toutes ces barrières, comme la BHE, perdent de leur efficacité avec l’âge. Cela se produit à des rythmes différents. Plus nous comprenons ce qui se passe, plus nous avons de chances de trouver de nouvelles thérapies. Et en 2025, nous avons encore beaucoup à découvrir sur la diversité des évolutions.


La bonne nouvelle du mois. Discussion ouverte sur l’édition (héréditaire) du génome.


Un article important sur la thérapie génique a été publié dans Nature : Nous devons parler de l’édition du génome humain. <<Dans quelques décennies, les technologies d’édition de gènes pourraient réduire la probabilité de maladies humaines courantes. Les sociétés doivent mettre à profit ce temps pour se préparer à leur arrivée. Les scientifiques connaissent des dizaines de milliers de variantes d’ADN associées à des maladies humaines. Prises isolément, la grande majorité de ces variantes ont des effets mineurs. Mais pris ensemble, les résultats peuvent être considérables>>.

Ce point de vue ouvre le débat sur d’éventuelles thérapies géniques pour les générations futures. Les maladies que nous pourrions guérir sont des maladies qui blessent et tuent principalement lorsque les gens vieillissent, puisque la mortalité des jeunes est aujourd’hui faible, particulièrement dans les pays les plus riches.


Pour plus d’informations

Lettre d’information mensuelle de Heales. La mort de la mort n° 188. Décembre 2024. La loi d’Eroom et la loi de Moore


« Ce n’est pas tant qu’il existe des arguments solides pour expliquer pourquoi la mort est une bonne chose, mais plutôt ce que j’appelle la philosophie palliative : la mort est inévitable, nous voulons des raisons convaincantes pour expliquer pourquoi c’est une bonne chose, alors nous les créons. En fait, nous dépensons des sommes considérables dans le monde entier pour les soins de santé et la recherche médicale. Ces dépenses représentent 10 % de l’activité économique mondiale. « La médecine moderne consiste à essayer de tenir la mort à distance. Mais nous n’avons pas encore reconnu ou accepté – en tant que société – que l’objectif final de la recherche médicale est d’éliminer complètement la maladie. Dr Ariel Zeleznikow-Johnston, neuroscientifique, The Guardian, 1er décembre 2024 (traduction).


Le thème de ce mois-ci :  La loi d’Eroom et la loi de Moore


Qu’est-ce que la loi de Moore (conjecture) ? Est-elle toujours valable ?

La loi de Moore a été formulée par Gordon Moore, cofondateur d’Intel, en 1965. Il postule que le nombre de transistors sur une puce électronique double environ tous les deux ans, entraînant une augmentation correspondante de la puissance de calcul et une diminution du coût relatif. Cette croissance exponentielle a été l’un des principaux moteurs de l’évolution rapide des technologies électroniques et informatiques au cours des dernières décennies. Le doublement constant des transistors a permis de créer des dispositifs informatiques plus petits, plus puissants et plus économiques, stimulant ainsi l’innovation et la productivité dans de nombreux secteurs. Toutefois, le maintien du rythme prévu par la loi de Moore est devenu de plus en plus difficile en raison de limitations physiques et économiques.

La loi de Moore n’est pas une loi. Il s’agit d’une observation qui est devenue une règle pour l’industrie. Elle a influencé la planification stratégique et les efforts de recherche et de développement au sein de l’industrie technologique, façonnant la direction et l’orientation de l’innovation.  Malgré les difficultés à maintenir son rythme, la loi de Moore reste une pierre angulaire du progrès technologique. Son impact sur l’évolution de l’informatique et de l’électronique reste profond, garantissant que les principes d’amélioration rapide et de réduction des coûts restent partie intégrante de l’avancement de l’industrie. La fin de la loi a été annoncée dans le passé et est toujours annoncée. Le concept général de croissance exponentielle des capacités technologiques est également populaire dans d’autres domaines. Certains longévistes l’ont utilisé pour annoncer des progrès « exponentiels » en matière de longévité. Par exemple, Ray Kurzwzeil, dans son ouvrage intitulé In the Age of Spiritual Machines (1999), a prédit que l’espérance de vie atteindrait environ 100 ans en 2019.  Malheureusement, jusqu’à présent, la tendance n’a pas du tout été la même pour la longévité. Quant au rythme des thérapies de soins de santé, nous constatons une évolution décevante.

Loi d’Eroom

La loi d’Eroom, nommée en inversant ironiquement le nom « Moore », est un concept de recherche et développement pharmaceutique (R&D) qui met en évidence l’inefficacité et le coût croissant de la découverte de médicaments (et thérapies) au fil du temps. Contrairement à la loi de Moore, qui observe l’amélioration exponentielle de la puissance informatique, la loi d’Eroom met en évidence une tendance selon laquelle le nombre de nouveaux médicaments approuvés par milliard de dollars dépensés en R&D a diminué de moitié environ tous les neuf ans depuis les années 1950. On estime aujourd’hui que le coût total de la création d’un nouveau médicament atteint le montant astronomique de 2 milliards de dollars.

La loi d’Eroom a été décrite par Jack W. Scannell et ses collègues dans un article paru en 2012 dans Science. Ils ont documenté le déclin de la productivité dans la recherche et le développement de médicaments en dépit des progrès technologiques et de l’augmentation des investissements. Si les investissements en R&D ont augmenté de manière exponentielle, les résultats en termes d’approbation de nouveaux médicaments n’ont pas suivi, ce qui a conduit à un déclin paradoxal de la productivité. Quelle en est la cause ?

  1. Le problème du « mieux que les Beatles » fait référence à la difficulté croissante de dépasser l’efficacité thérapeutique des médicaments existants. À mesure que des traitements plus efficaces sont mis au point, les nouveaux médicaments doivent présenter des améliorations significatives par rapport à ces références élevées, ce qui rend plus difficile la découverte de traitements véritablement nouveaux et supérieurs. On dit aussi que « les fruits des branches les plus basses sont les premiers à être cueillis ».
  2. Les exigences réglementaires sont devenues plus strictes au fil du temps, afin de garantir la sécurité et l’efficacité des médicaments. Si elles améliorent la sécurité des patients, elles augmentent également le temps, le coût et la complexité de la mise sur le marché d’un nouveau médicament. La demande d’essais cliniques approfondis et de surveillance post-commercialisation contribue à l’augmentation des coûts de R&D. Les entreprises pharmaceutiques augmentent souvent leurs budgets de R&D pour répondre à cette demande et à une baisse de la productivité, espérant que des investissements plus importants produiront de meilleurs résultats. Il y a également eu une évolution vers le criblage à haut débit et d’autres méthodes de force brute dans la découverte de médicaments. Cet accent mis sur la quantité plutôt que sur la qualité peut diluer les efforts et les ressources.
  3. Au fil du temps, les réglementations tendent à devenir plus strictes. Chaque problème de sécurité ou scandale donne lieu à de nouvelles réglementations, qui s’accumulent et alourdissent la charge qui pèse sur les processus de recherche et développement. Il existe une disproportion radicale entre l’attention portée aux conséquences négatives des essais de nouvelles thérapies et l’attention limitée portée aux vies perdues en raison de la lenteur de la recherche médicale. L’une des raisons est qu’une victime d’un essai clinique est généralement une personne en bonne santé et qu’elle bénéficie toujours d’une plus grande attention. Et la victime d’une erreur médicale est une personne bien définie alors que les victimes des non-découvertes resteront inconnues.
  4. Une autre raison provient du développement de la bureaucratie, de l’industrie à but lucratif et de la complexité juridique. Le temps consacré à la recherche dans les services de R&D diminue constamment. Si vous suivez les informations sur la recherche sur la longévité, vous verrez plus de demandes de nouveaux brevets que de demandes de nouvelles thérapies, plus d’annonces de création de start-ups que d’annonces de nouveaux médicaments, plus de demandes de nouveaux financements que d’offres de nouveaux postes de chercheurs… La situation la plus désastreuse est peut-être la multiplication des litiges et des opportunités pour les avocats. L’objectif est rarement de sauver des vies, mais presque toujours de prouver que quelqu’un doit payer quelqu’un d’autre pour une raison médicale. Tout ceci doit bien sûr aussi payer les avocats (et les services connexes de plus en plus nombreux) qui ont « démontré » la situation.

La loi d’Eroom a des implications importantes pour la recherche sur la longévité. La baisse de la productivité peut décourager les investissements publics et privés dans la recherche de thérapies innovantes.

Comment accélérer la découverte (et l’approbation) de nouvelles thérapies ? L’IA vaincra-t-elle la loi d’Eroom ?

La lutte contre la loi d’Eroom nécessite des stratégies à multiples facettes :

  • La rationalisation des processus réglementaires et l’adoption de cadres réglementaires adaptatifs peuvent contribuer à équilibrer la sécurité et l’innovation. 
  • L’exploitation de technologies avancées telles que l’intelligence artificielle, l’apprentissage automatique et le big data peut améliorer la précision des prédictions et rationaliser la découverte de médicaments. 
  • Il faut encourager les partenariats entre les universités, l’industrie et les organismes de réglementation afin de faciliter le partage des connaissances et de réduire la duplication des efforts. Cela comprend :
  1. la publication des résultats « négatifs »;
  2. moins de bureaucratie;
  3. moins de brevets et des résultats plus ouverts
  4. plus de chercheurs et moins d’avocats.

L’une des questions clés est bien sûr de savoir à quelle vitesse l’IA médicale accélérera la recherche sur la longévité en bonne santé. Cela dépend de la priorité accordée à l’IA pour la longévité humaine. Dans le domaine de l’intelligence artificielle (et de plus en plus de l’intelligence artificielle générale), nous vivons une époque fascinante, mais qui peut être dangereuse. L’IA sûre et la recherche médicale sur la longévité ne sont pas directement liées. Cependant, faire de la résilience en bonne santé un objectif commun pour le développement de l’IA fait partie d’un travail proactif en vue d’un monde meilleur et plus sécurisé.


Les nouvelles intéressantes du mois : Nominations interpellantes annoncées dans la nouvelle administration américaine


Il se peut que vous n’aimiez pas le nouveau président élu des États-Unis. Cependant, en matière de santé, sa présidence pourrait apporter des évolutions intéressantes. Le secrétaire à la santé annoncé, Robert Kennedy, est une personne très controversée dont les positions ne sont pas conformes aux vues scientifiques reconnues. Mais le numéro 2 choisi, futur secrétaire adjoint à la santé, sera Jim O’Neill. C’est un longéviste de longue date qui a été directeur général de l’organisation de longévité SENS Research Foundation. 

Plus importante encore est la nomination annoncée d’Elon Musk et de Vivek Ramaswamy. pour une simplification radicale des administrations par le biais d’un nouveau département de l’efficacité gouvernementale (DOGE). La Food and Drug Administration en fait partie. Musk et Ramaswamy ont des opinions radicales dans de nombreux domaines, y compris en matière de recherche scientifique. Il reste à voir si la tendance générale sera destructrice ou régénératrice.


Pour plus d’informations

Lettre d’information mensuelle de Heales. La mort de la mort n° 187. Novembre 2024. Les fluides de notre corps et le vieillissement.


Jean-Charles Samuelian-Werve, 38 ans, cofondateur et PDG (de la startup de néo-assurance Alan), affirme sans sourciller qu’il « veut révolutionner la santé, pour que tout le monde vive mieux, jusqu’à 100 ans ». Le Soir 4 novembre 2024


Le thème de ce mois-ci : Les fluides de notre corps et le vieillissement.


Notre corps est d’abord constitué d’eau, mais le pourcentage d’eau corporelle diminue avec l’âge. L’eau est bien sûr présente dans les fluides qui composent le corps. Le système hydrique humain, qui comprend le sang, la lymphe et d’autres fluides corporels, joue un rôle crucial dans le maintien de l’homéostasie et de la santé globale. Avec l’âge, ces systèmes subissent plusieurs changements qui ont un impact sur notre santé et notre bien-être. Voici un aperçu de la façon dont le temps qui passe affecte le système hydrique humain :

Hémostasie sanguine et coagulation

Risque accru de coagulation : le vieillissement est associé à des changements dans le système de coagulation sanguine, entraînant un risque accru de thrombose. Cela est dû à des niveaux plus élevés de facteurs de coagulation et à une diminution des anticoagulants naturels. Une étude montre que chez les personnes âgées, les facteurs de risque cardiovasculaire peuvent avoir des implications différentes de celles des jeunes adultes. Par exemple, un taux élevé de cholestérol total est lié à une plus grande longévité car il est associé à une mortalité plus faible due au cancer et aux infections.

Retard de cicatrisation : La cicatrisation des plaies est plus lente chez les personnes âgées en raison d’une hémostase altérée et d’une réponse cellulaire réduite. L’incidence des plaies chroniques augmente avec l’âge, ce qui affecte considérablement la qualité de vie des personnes âgées. Cependant, la biologie sous-jacente des plaies chroniques et les effets des changements liés à l’âge sur la cicatrisation des plaies ne sont pas bien compris. La plupart des recherches se sont appuyées sur des méthodes in vitro et divers modèles animaux, mais les résultats ne sont souvent pas transposables aux conditions de cicatrisation chez l’homme. L’une des raisons de cette situation est que les personnes âgées sont souvent exclues des essais cliniques randomisés, d’où la nécessité de disposer de davantage de données.

Circulation

Rigidité artérielle : Les artères deviennent plus rigides avec l’âge, ce qui augmente la pression artérielle et le risque de maladies cardiovasculaires. Les grosses artères subissent plusieurs changements constants. L’intérieur des artères s’élargit, les parois s’épaississent et les artères deviennent moins élastiques. Cela s’explique par le fait que les pulsations constantes du sang dans ces artères pendant de nombreuses années usent et endommagent les fibres élastiques des parois artérielles. En outre, les artères plus âgées ont tendance à accumuler plus de calcium et la paroi interne des artères (endothélium) ne fonctionne plus aussi bien. Ces changements accélèrent le passage du sang dans les artères, ce qui entraîne une augmentation de la pression artérielle systolique (le chiffre le plus élevé dans une mesure de la pression artérielle) et une plus grande différence entre la pression systolique et la pression diastolique (pression du pouls).

La capacité du cœur à pomper efficacement le sang diminue avec l’âge, entraînant une réduction du débit cardiaque et de la circulation. D’autres problèmes de santé tels que l’hypertension artérielle, le syndrome métabolique et le diabète aggravent ces changements liés à l’âge dans les artères. Le vieillissement des artères augmente le risque de maladies cardiovasculaires telles que l’athérosclérose (durcissement des artères), les maladies coronariennes, les accidents vasculaires cérébraux et l’insuffisance cardiaque. La prise en charge de l’hypertension artérielle et d’autres facteurs de risque peut contribuer à ralentir ou à réduire ces modifications des artères, améliorant ainsi la santé cardiaque globale.

Système lymphatique

L’altération de la réponse immunitaire entraîne une diminution de la production de lymphocytes : L’un des signes les plus notables du vieillissement du système immunitaire est la diminution significative du nombre de lymphocytes naïfs (globules blancs) dans le sang. Ce déclin se produit continuellement avec l’âge, principalement en raison de la réduction de la production thymique après la puberté et d’une maintenance périphérique inadéquate. Le flux lymphatique peut ralentir, réduisant l’efficacité de l’élimination des toxines et des déchets des tissus. Le vieillissement est un facteur de risque indépendant pour l’apparition de certaines maladies associées au système lymphatique. La sénescence lymphatique, qui contribue de manière importante à la détérioration et à la défaillance des organes, est associée à des altérations de la structure et de la fonction lymphatiques, à des réponses inflammatoires et immunitaires, ainsi qu’aux effets de l’exposition chronique à la lumière ultraviolette et au stress oxydatif. 

Autres fluides corporels

Œdème du liquide interstitiel : Le vieillissement peut entraîner une rétention de liquide et des œdèmes, en particulier dans les extrémités inférieures, en raison d’une mobilité réduite et de changements dans le fonctionnement des vaisseaux sanguins et lymphatiques. L’œdème, caractérisé par un liquide piégé dans les tissus de l’organisme et provoquant un gonflement, est fréquent chez les personnes âgées et peut avoir un impact significatif sur leur qualité de vie. Il affecte souvent les bras, les jambes, les mains et les pieds et peut être causé par des facteurs tels que l’inactivité physique, une consommation élevée de sel, une position assise prolongée, certains médicaments et des problèmes de santé sous-jacents tels qu’une maladie cardiaque, hépatique ou rénale. Il est essentiel de reconnaître les symptômes tels que les gonflements, les bouffissures, les douleurs articulaires et la diminution de la production d’urine. Les œdèmes peuvent entraîner de graves complications s’ils ne sont pas traités, notamment des infections et des caillots sanguins. Une prise en charge adéquate implique de s’attaquer aux causes sous-jacentes, d’adapter le régime alimentaire, de promouvoir l’activité physique et, éventuellement, de recourir à des traitements médicaux tels que les diurétiques. 

Dynamique du liquide céphalo-rachidien (LCR) : La production et la circulation du liquide céphalo-rachidien changent avec l’âge, ce qui peut affecter les fonctions cérébrales et contribuer à des affections telles que l’hydrocéphalie. Des études ont montré que le vieillissement augmente les niveaux de nombreuses protéines dans le liquide céphalorachidien (LCR). Avec l’âge, le renouvellement du LCR ralentit, ce qui entraîne une augmentation des niveaux de protéines due à des effets de concentration plutôt qu’à des maladies spécifiques. 

Nouvelles thérapies et nouveaux traitements possibles

Pendant des milliers d’années, les saignées ont été considérées comme un moyen de guérir de nombreuses maladies, si ce n’est la plupart. Pendant des décennies, nous avons également utilisé le système circulatoire pour injecter des médicaments et des produits dans le corps.

Les progrès récents dans la compréhension des défauts du système fluidique humain, y compris les problèmes lymphatiques et vasculaires, ont conduit à plusieurs thérapies prometteuses. Les thérapies favorisant l’angiogenèse et la lymphangiogenèse, comme celles ciblant le facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF), contribuent à améliorer le drainage des fluides. Les diurétiques avancés et les systèmes d’administration de médicaments basés sur la nanotechnologie améliorent l’efficacité du traitement et réduisent les effets secondaires.  La médecine régénérative, y compris l’ingénierie tissulaire et les biomatériaux, vise à restaurer la fonction du système liquidien. Les chaperons pharmacologiques et les chirurgies peu invasives, telles que l’anastomose lymphatico-veineuse (LVA), apportent des solutions supplémentaires.

La recherche la plus prometteuse concerne peut-être le drainage glymphatique du liquide céphalorachidien qui pourrait ralentir la maladie d’Alzheimer.

Ensemble, ces thérapies sont prometteuses pour une meilleure prise en charge des troubles du système hydrique. Les fluides étant omniprésents dans notre corps, de nouvelles thérapies pourraient améliorer la qualité de vie et la santé de l’ensemble du patient.


Les bonnes nouvelles du mois : Les progrès de l’Espace européen des données de santé et une déclaration pour le partage des données de santé


L’Union européenne est en train de créer un « Espace européen des données de santé » (EHDS) où les scientifiques pourront utiliser les données de santé pour la recherche. Ce travail est extrêmement utile, mais malheureusement extrêmement lent. Et seules les données réellement disponibles sauvent des vies ! À Bruxelles, les participants à l’Eurosymposium sur le vieillissement en bonne santé ont adopté une déclaration sur le partage des données de santé et l’utilisation de l’IA pour une longévité en bonne santé, insistant sur l’accélération des progrès.


Pour plus d’informations

Lettre d’information mensuelle de Heales. La mort de la mort n° 186. Octobre 2024. La durée de vie maximale des mammifères. Des décennies de stagnation.


Avec Francis Bacon et Gottfried Leibniz, Benjamin Franklin a été l’une des rares personnes de l’ère pré-moderne à envisager sérieusement l’allongement de la durée de vie. Ce n’est probablement pas une coïncidence si ces trois personnes comptent parmi les esprits les plus brillants et les plus polyvalents de l’histoire.  Liz Parish, PDG de Bioviva. Mai 2024.


Le thème de ce mois-ci : La durée de vie maximale des mammifères. Des décennies de stagnation.


Une triste introduction

Nous voyons ce qui est extraordinairement petit (1 million de fois plus petit qu’à l’œil nu).

Nous voyons ce qui est extraordinairement éloigné (des centaines de fois plus loin que l’œil nu).

Nous nous déplaçons extraordinairement vite (des centaines de fois plus vite qu’à pied).

Nous exploitons des quantités extraordinaires d’énergie (des centaines de fois plus que l’énergie humaine).

Nous avons aujourd’hui un accès instantané à plus de connaissances que tout ce qui a été écrit jusqu’au 20ᵉ siècle.

Mais nous ne vivons pas beaucoup plus longtemps qu’il y a 2 000 ans.

Donnez 100 millions de dollars et des souris âgées de 18 mois aux 100 meilleurs scientifiques spécialistes de la longévité. Donnez-leur la liberté de tester tout ce qu’ils savent favoriser la longévité. Revenez 30 mois plus tard. Toutes les souris seront mortes.

Trouvez les 100 centenaires masculins les plus sains du monde. Donnez-leur les meilleurs traitements disponibles aujourd’hui et les meilleurs médecins du monde. Revenez 20 ans plus tard. Il n’y aura aucun survivant

 En d’autres termes, la durée de vie maximale des mammifères est une limite que nous ne pouvons pas encore modifier en l’état actuel de nos connaissances scientifiques. Il existe un plafond de longévité, très probablement pour chaque espèce de mammifère, certainement pour les souris, les rats, les chiens, les chats, les chevaux et les humains.

Telle est la vérité dérangeante de la recherche sur la longévité aujourd’hui. Nous en savons plus que jamais sur la biologie. Nous pouvons sauver plus d’enfants de maladies et d’affections que jamais auparavant. Il y a plus de sexagénaires, de septuagénaires, d’octogénaires, de nonagénaires et même de centenaires que jamais. Mais pour les supercentenaires, les personnes qui vivent 110 ans et plus, il n’y a pas de progrès et peut-être même une certaine régression.

Quelle est la durée de vie maximale des souris et des rats ?

La durée de vie maximale des souris et des rats est d’environ 4 ans. Pendant des décennies, les scientifiques ont testé des traitements prometteurs pour prolonger la durée de vie des souris. Des centaines de thérapies ont été testées, mais aucune ne fait vraiment la différence.

En 2003, le prix de la souris Mathusalem (Mprize) a été créé pour accroître l’intérêt des scientifiques et du public pour la recherche sur la longévité. L’un des deux prix est destiné aux scientifiques qui ont battu le record du monde de la souris la plus âgée. Ce prix attribué en 2003 concernait une souris naine âgée de presque 5 ans (précisément 4 ans, 11 mois et 3 semaines) : Aucune souris n’a vécu plus longtemps depuis.

Nous pourrions espérer que les progrès de la recherche stimulent au moins les scientifiques à faire davantage d’expériences sur la longévité. Mais ce n’est pas le cas, de nombreuses expériences sur les souris et les rats sont réalisées sur des animaux âgés, mais une fois la thérapie testée pendant une certaine période, les animaux sont sacrifiés. 

Les raisons invoquées par les chercheurs sont les suivantes :

  • Pour connaître les résultats d’une thérapie, une autopsie est souvent nécessaire, ce qui rend impossible le maintien en vie de tous les animaux.
  • Si les scientifiques devaient attendre la mort naturelle des animaux, la publication des résultats serait retardée
  • En raison des lois de protection strictes concernant l’éthique animale, il peut être compliqué de garder des souris très âgées. La loi exige que l’animal ne souffre pas de manière prolongée. Ils doivent être euthanasiés s’ils souffrent trop, même si la souffrance n’est due qu’au vieillissement.
  • Lorsque de bons résultats physiologiques sont connus, les scientifiques ont tendance à considérer que cela prouve que la longévité sera meilleure (même s’il ne s’agit que d’un signal positif, et non d’une preuve).

Cela a pour conséquence que de nombreuses expériences visant à améliorer la longévité sont menées, de manière assez surprenante, sans mesurer la longévité.

Quelle est la durée de vie maximale des autres mammifères non humains ?

En ce qui concerne les autres mammifères, il arrive que certains animaux semblent vivre plus longtemps qu’auparavant, mais globalement, il n’y a pas d’augmentation significative, même si l’enregistrement des animaux de compagnie et probablement leur nombre augmentent. Le chien le plus âgé est mort à l’âge de 29 ans en 1939. Le chat le plus âgé est mort en 2005, à l’âge de 38 ans. Le cheval le plus âgé est mort à 62 ans en 1822. Bien entendu, les informations fiables à ce sujet sont moins nombreuses que pour les souris et les humains. Ce qui est sûr, c’est que même les propriétaires d’animaux de compagnie et les zoos qui investissent parfois d’énormes sommes d’argent pour maintenir les animaux en vie ne parviennent pas à battre des records avec une différence considérable par rapport aux records antérieurs.

Des organisations tentent de tester des thérapies sur des chiens et des chats. Malheureusement, peu d’expériences ont été réalisées et aucune n’a été couronnée de succès jusqu’à présent ( ).

La mesure de la longévité maximale desrats-taupes nus, un rongeur qui vit très longtemps, semble augmenter. Un spécimen a déjà vécu 39 ans ! Mais ce n’est pas grâce à une thérapie spécifique. En effet, ce n’est que relativement récemment que la durée de vie des animaux a été enregistrée comme suffisamment longue.

Quelle est la durée de vie maximale des femmes et des hommes ?

La femme la plus âgée de l’histoire est très probablement Jeanne Calment. Elle est décédée à l’âge de 122 ans en 1997. Aujourd’hui, la femme la plus âgée n’a « que » 116 ans (en octobre 2024). Cela signifie que le record de Jeanne Calment aura duré plus de 30 ans. En fait, on pourrait presque dire qu’il n’y a pas eu de progression depuis 2 millénaires. En effet, Terentia, la veuve de Cicéron, est morte à 103 ans en Italie, à l’époque où Auguste était empereur. Aujourd’hui, atteindre 103 ans est encore très rare.

L’homme le plus âgé de l’histoire est très probablement Jiroemon Kimura. Il est mort en 2013, à l’âge de 116 ans. L’homme le plus âgé aujourd’hui n’a « que » 112 ans. Cela signifie que l’âge atteint par Jiroemon se maintiendra pendant au moins 15 ans.

Ainsi, malheureusement, ceux qui parlent de progrès exponentiel en matière de longévité se trompent en ce qui concerne la durée de vie maximale. Il n’y a pas de progression. Pire, logiquement, puisque le nombre de centenaires augmente, le nombre de supercentenaires devrait augmenter aussi, même s’il n’y a pas de progrès de la médecine pour les personnes atteignant cet âge. En effet, si vous avez un supercentenaire pour 1000 centenaires et que le nombre de centenaires double en 30 ans, vous devriez avoir deux fois plus de supercentenaires.

Pas d’augmentation de la durée de vie maximale, pourquoi ?

Premièrement, il se peut que le nombre de supercentenaires ait été surestimé dans le passé. Dans les pays où l’enregistrement des naissances est médiocre, les erreurs sont plus nombreuses. Par exemple, il peut arriver qu’un enfant décède en bas âge et que les parents donnent le même prénom à un autre enfant plus tard sans enregistrer la seconde naissance. Il peut également arriver que des personnes ou leurs familles surestiment l’âge pour bénéficier d’une prestation (pension) ou pour des raisons de prestige social. Dans le passé, il y a eu de nombreuses déclarations de personnes atteignant un âge bien supérieur à 120 ans, voire à 200 ans. De nos jours, ces réclamations sont plus rares et disparaissent presque dans les pays qui disposent d’un bon système d’enregistrement des naissances.

Une explication beaucoup plus sombre est la pollution, en particulier la pollution de l’air ou de l’eau, qui peut aller des villes polluées et des zones industrielles jusqu’à l’Antarctique. L’exposition à de petites quantités de pollution combinée (« cocktails toxiques ») pendant des décennies pourrait accélérer progressivement la sénescence. Mais pourquoi ce phénomène serait-il plus marqué chez les supercentenaires que chez les personnes plus âgées ?

Une autre explication possible est avancée par des scientifiques qui considèrent la vieillesse non pas comme résultant d’une cause unique, mais de nombreuses causes. Celles-ci pourraient inclure les 9 marqueurs du vieillissement initialement listés dans un article fondateur de Carlos López-Otín, Maria Blasco et al. (récemment augmentés). Cela pourrait aussi être les 7 causes du vieillissement déterminées par Aubrey de Grey et les stratégies pour une sénescence négligeable par ingénierie (SENS). On pourrait dire que la durée de vie maximale pour chaque cause atteint un maximum de 120 ans. Ainsi, la longévité humaine pourrait avoir atteint sa limite supérieure si nous ne disposons pas de thérapies capables d’arrêter simultanément toutes les causes de décès. 

Comment briser le plafond de verre ?

Ce ne sera très probablement pas facile. Nous avons besoin de progrès radicaux. Cela signifie que :

  •     L’utilisation de l’intelligence artificielle doit se concentrer sur tout ce qui concerne la résilience de l’homme derrière ses limites biologiques actuelles. C’est important pour une longévité saine. C’est aussi l’un des moyens d’atténuer les risques liés à l’IA. Plus nous l’utiliserons pour nous sauver nous-mêmes, moins nous l’utiliserons pour d’autres objectifs. Remarque importante : l’atténuation des risques de cette manière n’est qu’une petite partie de la question des risques liés à l’IA, mais ce n’est pas le thème de cette lettre d’information.
  •     Tester de nouvelles thérapies aussi rapidement que possible
  • Tester les nouvelles thérapies aussi rapidement que possible avec des volontaires âgés, voire très âgés et bien informés.
  •   De meilleurs comités d’éthique et moins de bureaucratie bloquante. Pour ceux qui respectent le droit à la santé, aujourd’hui la principale cause de souffrance et de décès est de plus en plus les maladies liées à l’âge. Nous devons faire mieux pour le bien commun.
  • Les organisations publiques, en particulier les organisations internationales comme l’Organisation mondiale de la santé, doivent investir beaucoup plus dans la longévité.
  •   Nous devons faire comprendre à la société que « le vieillissement est inévitable, mais que la sénescence ne l’est pas ». Nous avons des difficultés à lutter contre le vieillissement pour des raisons psychologiques. Nous acceptons la mort et n’essayons pas de la vaincre parce que nous n’avons pas le choix. Mais nous avons moins de chances d’avoir un jour le choix si nous n’essayons pas. Un proverbe dit : Ils ne savaient pas que c’était (censé être) impossible, alors ils l’ont fait !

La bonne et la mauvaise nouvelle du mois : Expérience sur des souris démontrant un effet de la combinaison sur les thérapies, mais pas assez d’argent pour poursuivre.


L’expérience sur 1000 souris organisée par la Longevity Escape Velocity Foundation est presque terminée. Les résultats partiels rendus publics montrent que la combinaison de 4 thérapies donne de bons résultats mais avec des différences entre les mâles et les femelles.

Il y aura une phase 2 de l’expérience avec 4 nouvelles thérapies et un meilleur traitement grâce aux leçons de la première expérience. Malheureusement, il n’y a pas encore assez d’argent. Didier Coeurnelle, co-président du conseil d’administration de Heales, apporte jusqu’à 200 000 € de dons pour démarrer l’expérience, mais il en faut plus. Pourquoi les milliardaires et les organismes publics ne soutiennent-ils pas ce projet ? Il y a de nombreuses raisons, et vous pouvez faire partie de la solution.


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