La loi est stricte vis-à-vis de la rapamycine et de la metformine, en exigeant une prescription. En comparaison, l’alcool et le tabac ne nécessitent pas de prescription ni de surveillance médicale. Le tabagisme n’a aucun avantage pour la santé et réduit considérablement la durée de vie, accélérant toutes les maladies. Alors que le tabagisme provoque le cancer, la rapamycine le prévient, y compris le cancer du poumon causé par la fumée. N’est-il pas alors paradoxal que l’alcool et le tabac soient vendus sans ordonnance, alors que la rapamycine et la metformine ne le sont pas ? The Goal of Geroscience is Life Extension. Mikhail V. Blagosklonny Février 2021. (Traduction)
Thème du mois : La sarcopénie et la longévité
Qu’est-ce que la sarcopénie?
Avec l’avancée en âge, presque tout ce qui constitue les composants d’un être humain ou d’un autre vertébré perd progressivement de son efficacité : système digestif, cardiaque, neurologique, immunitaire, squelette, peau… Les muscles ne font pas exception à la règle.
La sarcopénie (ou dystrophie musculaire liée à l’âge) est la diminution progressive liée à l’âge de la masse et de la force musculaire, associée à une baisse des performances physiques.
En 1989, le terme «sarcopénie» a été défini par Irwin Rosenberg, chercheur et directeur intérimaire du laboratoire “neuroscience et vieillissement” de l’Université de Tufts aux Etats-Unis, pour désigner la diminution de la masse musculaire au cours du vieillissement.
À partir de quel âge?
Dès l’âge de 30 ans, le tissu musculaire subit une dégénérescence progressive de l’ordre de 3 à 8% par décennie. Dès l’âge de 50 ans, la perte de la quantité, mais aussi de la force des muscles s’accélère. À 70 ans, la moitié de la masse musculaire est perdue au profit du tissu adipeux. La perte de masse musculaire affecte toutes les personnes âgées, y compris celles en bonne santé et celles ayant gardé une activité sportive.
Les causes et les conséquences de la sarcopénie?
Plusieurs causes, interdépendantes, sont impliquées dans le développement et dans la progression de la sarcopénie. Celles-ci contribuent à la perte de masse et de force musculaires :
- Une dénervation ainsi qu’une perte de la fonctionnalité des unités motrices entraînerait une moindre constructibilité des fibres musculaires.
- L’effet des hormones anaboliques est fortement perturbé au cours du vieillissement. Soit la concentration en hormones circulantes est réduite, soit la sensibilité du muscle à l’action de certaines hormones telle que l’insuline apparaît diminuée.
- Les protéines alimentaires ne sont plus utilisées efficacement par l’organisme. Par conséquent, les apports nutritionnels de l’alimentation habituelle sont inadaptés aux besoins de l’organisme vieillissant.
Selon l’âge et le degré d’atteinte, les risques et les conséquences de la sarcopénie sont très variables :
- Baisse progressive de la force musculaire
- Fatigabilité entraînant une diminution de l’activité physique
- Faiblesse
- Risque accru de chute et de fractures
- Augmentation du risque de dépendance et de perte de la qualité de vie.
Est-il possible de ralentir la sarcopénie ?
Certaines stratégies nutritionnelles alliées à une activité physique suffisante le permettent.
La nutrition pulsée : “elle consiste à apporter 80 % des apports protéiques journaliers recommandés sur un seul repas. Cette technique permet de saturer partiellement l’extraction splanchnique (c’est-à-dire une rétention des acides aminés alimentaires par l’intestin et le foie pour leurs besoins propres) afin d’obtenir une meilleure biodisponibilité des acides aminés pour la stimulation de la synthèse protéique musculaire postprandiale” (source : Wikipédia).
La citrulline (le seul acide aminé à ne pas être capté par le foie) et la leucine ont tous les deux un pouvoir stimulant dans la synthèse protéique musculaire par son action sur la voie mTor. Elles représentent donc de bonnes stratégies pour lutter contre la sarcopénie.
De plus, pour diminuer la perte musculaire comme pour le bon fonctionnement du reste du métabolisme, il faut associer une activité physique suffisante avec la stratégie nutritionnelle.
Où en est la recherche scientifique sur la sarcopénie ?
En décembre 2021, des cellules musculaires humaines cultivées en laboratoire ont été lancées dans l’espace dans le cadre d’une expérience menée par l’Université de Liverpool.
Cette étude, appelée MicroAge, a pour objectif de surveiller la croissance des cellules musculaires en microgravité et d’aider à comprendre les raisons pour lesquelles le corps s’affaiblit avec l’âge.
À la fin de l’expérience, en janvier 2022, les muscles seront congelés et ramenés sur Terre où les scientifiques entreprendront une analyse plus approfondie.
La relation entre la sarcopénie et les maladies cardiovasculaires
La sarcopénie et les maladies cardiovasculaires sont toutes deux accélérées par l’inflammation chronique du vieillissement, mais l’apparition d’une faiblesse physique résultant de la sarcopénie peut également contribuer aux maladies cardiovasculaires par le biais d’une activité physique réduite.
Les changements dans la masse maigre sont des déterminants critiques communs dans la pathophysiologie et la progression des maladies cardiovasculaires (MCV). La sarcopénie peut induire des MCV par des voies pathogènes communes telles que la malnutrition, l’inactivité physique, la résistance à l’insuline et l’inflammation ; ces mécanismes interagissent.
La sarcopénie et les MCV sont très répandues chez les personnes âgées et partagent une pathogenèse et des interactions communes. La compréhension de leur relation n’en est encore qu’à ses débuts, et davantage de données cliniques et expérimentales sont nécessaires.
Un grand nombre d’études ont montré que la progression des MCV et le déclin de la fonction musculaire aggravent l’état des patients. En dépistant la sarcopénie à un stade précoce, en mettant en place des méthodes de détection et d’évaluation efficaces, il est possible de retarder efficacement la progression de la maladie.
La sarcopénie et les thérapies géniques
En 2015, Elizabeth Parrish a suivi une thérapie génique — controversée — à la télomérase et à la follistatine dans le cadre de la création de la startup BioViva. En ce qui concerne la follistatine, l’objectif est la suppression directe de la myostatine ou l’amélioration de la follistatine pour supprimer la myostatine. Cela a pour effet d’augmenter la masse musculaire et de réduire les tissus adipeux, tout en adaptant le fonctionnement du métabolisme à un mode de fonctionnement plus sain.
Ces injections consistent en un inhibiteur de la myostatine pour protéger contre la perte de masse musculaire avec l’âge.
Après un examen et des tests plus approfondis, la comparaison des données de Parrish avant la thérapie et après la thérapie a révélé des changements positifs supplémentaires.
Et demain ?
Comme écrit en début de cette lettre, avec l’âge, presque tout ce qui constitue les composants organiques d’un être humain ou d’un autre vertébré perd progressivement de son efficacité. Mais le rythme des pertes varie beaucoup selon les tissus: de 1 à 1000, de quelques semaines, à quelques siècles. Le futur, grâce aux progrès des connaissances déjà en cours, peut consister à faire au moins aussi bien, durable et… musclé que les espèces à la longévité la plus élevée.
Les bonnes nouvelles du mois
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) gère la Classification internationale des maladies (CIM); en anglais International Classification of Diseases (ICD), qui fait l’objet de révisions régulières.
La CIM-11 est officiellement entrée en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2022 (même si la mise en œuvre de la CIM-11 pourrait ne pas commencer avant plusieurs années.
Contrairement aux versions précédentes, la CIM-11 permet diverses interprétations synonymiques, y compris celles qui peuvent être très utiles pour un clinicien traitant des personnes âgées, telles que « vieillissement », « sénescence », « état sénile », « fragilité » et « dysfonctionnement sénile », qui font référence à un état de santé. La classification nouvelle inclut le code « lié au vieillissement » dans la catégorie étiologie ou causalité pour cibler les processus pathogènes du vieillissement.
Certains ont proposé d’exclure le code « vieillesse » de la dernière version de la classification internationale des maladies, la CIM-11, au motif que le fait d’assimiler la vieillesse à une maladie pourrait avoir pour conséquence négative de traiter l’âge civil comme une maladie.
Pourtant, loin de discriminer les droits des personnes âgées et d’encourager la négligence à l’égard de leurs soins de santé curatifs ou préventifs, les codes CIM-11 pour la vieillesse et la causalité liée au vieillissement font exactement le contraire : ils attirent l’attention du public et des professionnels sur les problèmes de santé spécifiques des personnes âgées et appellent à l’action pour améliorer la prévention et les traitements qui leurs sont spécifiques.
Pour en savoir plus :