gelules dhea dans la main

Très connue du public, la DHEA a été l’hormone star de l’anti-vieillissement en 2000.

Elle a des effets mesurés scientifiquement mais n’est quand même pas la panacée anti-âge.

Alors, utile en anti-âge ou pas la Dhea ?

Article mis à jour le 22/02/2023

Que reste-t’il de cette hormone DHEA aujourd’hui ? Le Pr Etienne Beaulieu l’a découverte puis a démontré ses effets contre le vieillissement (étude DHEAge en 2000). Après que les médias l’aient largement mise en avant comme « pilule de jeunesse éternelle », est-elle tombée dans l’oubli ?

Pas vraiment, mais si l’on veut « rajeunir », il faudra l’inclure dans une approche globale : nutrition, hygiène de vie, activité physique, médecines naturelles, etc… comme toujours.

La DHEA : hormone ou précurseur hormonal ?

La DiHydroEpiAndrostènedione est produite naturellement par notre corps dans nos glandes surrénales. Elle est issue de la pregnénolone et c’est le précurseur d’hormones androgènes, de la testostérone, et d’oestrogènes.

Les effets de la DHEA

On a longtemps pensé qu’elle n’avait aucun effet direct sur l’organisme mais servait seulement à se transformer en hormones sexuelles (testostérone, oestradiol…). Elle aurait donc été un simple précurseur hormonal. Or, le Pr Beaulieu a démontré que la DHEA avait aussi sa propre action hormonale, même si ses effets restent plutôt modérés. Plusieurs études ont par ailleurs montré l’existence de récepteurs cellulaires spécifiques à la DHEA (NHRD1).

Début des années 2000, l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) a jugé les preuves d’efficacité de la DHEA insuffisantes et déconseillé son usage au vu des effets indésirables potentiels. La DHEA a, tout de même, été classée dans les substances dopantes pour les sportifs, en raison de son effet anabolisant sur les muscles. Ainsi jugée non efficace mais anabolisante sur les muscles, il y a là une belle contradiction…

L’étude « DHEAge » avait montré des effets intéressants, surtout chez les femmes de plus de soixante-dix ans : augmentation de la densité des os, augmentation de la libido, amélioration de l’état de la peau, et meilleure qualité de vie. Pour les hommes, la DHEA aurait une action légère contre les troubles de l’érection. Les effets varient beaucoup d’un sujet à l’autre, pour la même dose quotidienne apportée.

La baisse de DHEA en vieillissant

Comme beaucoup d’hormones, et comme toutes les hormones sexuelles, la production de DHEA diminue avec l’âge. A la soixantaine, les taux sanguins sont souvent bien plus bas qu’à 20 ans : parfois seulement moins de 20% de taux résiduel est retrouvé en dosant la sDHEA (sulfate de DHEA) dans le sang.

On sait aujourd’hui que la baisse de ce taux est très variable d’une personne à l’autre. Ceci explique peut-être la variabilité des résultats de l’étude DHEAge, certaines personnes nécessitant des doses plus élevées que les autres.

Les symptômes pouvant être liés à la baisse de DHEA

Ils ne sont pas spécifiques et correspondent plutôt à un manque d’activité des hormones sexuelles issues de la DHEA. Voici une liste non exhaustive des plus récurrents :

  • Perte d’intérêt sexuel, baisse libido
  • Yeux secs
  • Cheveux fins et sec
  • Peau trop sèche
  • Infections à répétition
  • Montées de chaleur
  • Perte de poils sur le pubis
  • Arthrite ou rhumatismes inflammatoires
  • Moindre tolérance au bruit
  • Tristesse en général
  • Manque de confiance en soi
  • Sensation de dépression, douleur morale
  • Ostéoporose – décalcification
  • Irritabilité
  • Peau dévitalisée
  • Rides fines sur la lèvre supérieure
  • Sécheresse des muqueuses…

Un symptôme isolé n’est pas vraiment significatif mais l’accumulation de plusieurs symptômes est parlante. De plus, relever ces symptômes et leur intensité, permet de confirmer (ou pas) des dosages sanguins. Enfin et surtout, cela permet une surveillance dans le temps, en fonction de leur évolution.

DHEA et cancers hormono-dépendants

S’agissant d’une hormone qui peut se transformer en œstrogènes ou en testostérone, il parait logique de s’abstenir chez les personnes atteintes de cancers hormono-dépendants, et chez les personnes à haut risque (utérus, ovaires, sein, prostate).

Cependant, ce risque n’a pas pu être prouvé alors que des études sur des prises quotidiennes pendant 2 ans ont été faites. Notons aussi que plusieurs études sur l’animal montreraient, au contraire, de possibles effets anticancéreux.

Effets indésirables et contre-indications de la DHEA

Elle est contre-indiquée chez les femmes enceintes, celles qui allaitent et chez les enfants.

Selon le Vidal, les effets indésirables pourraient être : fatigue, hypertension, maux de ventre, diabète ou acné et, chez les femmes parfois, une augmentation de la pilosité.

On peut se poser deux questions :

– s’il s’agit d’un précurseur hormonal inefficace, comment pourrait-il entraîner des troubles hormonaux androgéniques (pilosité, acné…) ?

– d’un autre côté, pourquoi une hormone naturellement présente dans notre corps pourrait-elle être dangereuse pour des gens qui en manquent, si l’on ne fait que rétablir des taux sanguins normaux ?

Aucun effet secondaire sérieux n’a, en fait, été rapporté dans la littérature mondiale.

D’ailleurs, selon le rapport de l’AFSSAPS :

Dans une étude de toxicité chronique (chez le chien, 6 mois) il n’y a pas de signe toxique majeur en dehors de ceux attendus avec des dérivés stéroïdes hormonaux, apparaissant à des doses de l’ordre de 1500 mg/kg/j (soit plus de 30 fois les doses utilisées habituellement).
Ceci étant, il faudra toujours prendre la dose la plus faible possible pour obtenir un résultat sur le ressenti et le terrain hormonal. Inutile de surdoser.

Des effets confirmés à nouveau ?

Les médecins « anti-âge » ont une vision particulière des choses : ils pensent qu’en maintenant des fonctions hormonales à un niveau correct, on diminue les troubles liés au vieillissement et on améliore la vitalité générale.

Depuis le rapport français de l’Afssaps, de l’eau a coulé sous les ponts mais des chercheurs étrangers n’en sont pas restés là. Des milliers d’études existent (japonaises, chinoises, américaines, suisses…) montrant à nouveau des effets positifs de la DHEA lorsqu’on remonte ses niveaux :

  • augmentation de la force et de la masse musculaire,
  • augmentation de la densité osseuse,
  • amélioration de la sécheresse vaginale à la ménopause (par voie locale),
  • amélioration de la paroi artérielle,
  • augmentation de l’hormone de croissance (6 à 12%),
  • augmentation de la testostérone libre chez l’homme de la cinquantaine
  • diminution du risque de cataracte…

Ceci dit, il ne faut pas crier au miracle, et les effets sont souvent plus marqués après 70 ans.

gelules de dhea

En pratique, comment prendre de la DHEA ?

Certains médecins pensent que rétablir des taux de DHEA de la jeunesse ne peut qu’avoir des effets positifs sur les troubles liés au vieillissement. Aux USA, la DHEA est en vente libre, classée en complément alimentaire. En France, les autorités ont jugé que ce produit, même s’il ne montre pas de critères de dangerosité, a des effets très modérés sur les troubles de l’âge. Alors qu’on ne sait pas si un risque de favoriser les cancers hormonaux existe réellement, l’Afssaps ne justifie donc pas son usage.

Que penser ? L’avis de l’Afssaps étant fondé sur des incertitudes, est-il pertinent (en dehors du principe de précaution) ?

Comme toujours, il n’y a pas de réponse absolue. Prendre systématiquement de la DHEA en vieillissant ne semble pas justifié. En revanche, pourquoi se priver des améliorations qu’elle peut apporter à certains sur les troubles liés au vieillissement ? Cela peut valoir le coup d’essayer, notamment en cas de faiblesse des glandes surrénales. Le coût n’est pas prohibitif.

Dans tous les cas, prendre de la DHEA soi-même, sans dosage ou évaluation biologique et symptomatique préalable est une bêtise.

Une mesure des taux sanguins préalable est nécessaire à une bonne évaluation des doses à prendre (plusieurs mesures au même moment de la journée seront plus précises car les taux de DHEA peuvent facilement varier). Un avis médical est largement souhaitable. La prescription par médecin est d’ailleurs obligatoire en France.

Voici un tableau des taux de DHEA dits « normaux » en fonction de l’âge (attention : les unités de mesures peuvent changer selon les laboratoires, ici ng/ml) :

Age Variations sDHEA habituelles (ng/ml)
20 ans 2400
30-35 ans 1730
35-40 ans 1420
40-45 ans 1140
45-50 ans 910
50-60 ans 700
60-75 ans 520
> 75 ans 450

En pratique les valeurs précises ont peu d’intérêt. Il faut les corréler à la constitution de chaque personne et à son état de santé. Elles donnent une idée de l’imprégnation globale de DHEA et surtout, elles permettent de faire un suivi dans le temps, et d’éviter de traiter sans savoir. Le médecin, au vu des résultats d’analyse et des symptômes présentés par le sujet, décidera si un essai de traitement est souhaitable, puis il ajustera les doses en fonction des résultats.

Les doses standards sont généralement de 25 mg par jour pour les femmes et de 50 mg pour les hommes. A prendre le matin (quand sa production par le corps est normalement plus intense), et à moduler selon chaque cas, en fonction de l’évolution dans le temps. Il est souvent pertinent de commencer par des doses plus faibles et d’adapter ensuite selon les effets constatés.

La médecine anti-âge n’en est qu’à ses débuts, et nous en apprendrons certainement encore sur la DHEA dans l’avenir. Elle peut faire partie de notre arsenal pour améliorer l’avancée en âge si elle est employée à bon escient (surtout en cas de mauvaise fonction ou épuisement des glandes surrénales).

Ne perdons pas de vue cependant que, comme pour toute hormone, sa prise complète la production faite par notre corps. Il est toujours possible qu’en l’arrêtant, on revienne à des taux plus bas, au moins dans les premiers temps. Il faut donc savoir qu’il s’agit de traitements au long court (comme tout traitement hormonal) avant de l’utiliser, et à ne pas arrêter brutalement mais progressivement.

Enfin, la DHEA n’est pas, en soi, un traitement pour ralentir le vieillissement, et encore moins pour l’inverser. Néanmoins, elle fait partie, comme d’autres hormones, des nombreux moyens pour lutter contre les effets de l’âge. Cette lutte ne se conçoit selon moi que dans une approche globale, où il faudra discerner les personnes qui auront intérêt à y recourir, et où la correction de l’hygiène de vie est un préalable à ne pas oublier.

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Etude DHEAge . Pr E Beaulieu et Coll. 2000

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