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La mort de la mort N° 139. Les longévitistes les plus (re)connus. Octobre 2020

Moi, personnellement, si il y a des technologies qui permettent de prolonger ma vie, et que j’y ai accès, oui, je ferais le choix de les utiliser. Mais je pense aussi qu’il va justement aussi y avoir des questions individuelles parce qu’au nom de cette liberté, on va aussi créer des inégalités entre les êtres humains. (…) Il va y avoir un moment radical (par) la conjonction entre la thérapie génique  et la nanotechnologie (…) qui fait qu’on va avoir des traitements non seulement extrêmement performants pour traiter les maladies liées au vieillissement, mais aussi peut-être même pour stopper le vieillissement

Corinne Narassiguin, femme politique française, numéro 2 du Parti socialiste, notamment à propos des moyens envisageables pour que ces thérapies soient accessibles un jour à tous ceux qui le souhaitent.


Thème du mois : Les longévitistes les plus (re)connus


Évidemment, le choix ci-dessous est subjectif. C’est un tour d’horizon de quelques-uns des femmes et des hommes attachés à rendre possible une vie beaucoup plus longue et en meilleure santé. Ils se sont exprimés derrière les éprouvettes, dans leurs recherches académiques, mais aussi devant des caméras. La diversité de leurs approches illustre la difficulté et la richesse du travail dans ce domaine qui nous concerne tous.

Aubrey De Grey 

Aubrey de Grey, est un scientifique anglais, ancien informaticien à l’université de Cambridge et au départ autodidacte en biogérontologie. Il vit aujourd’hui en Californie.

Inspiré par la « théorie mitochondriale du vieillissement » émise par le Dr Denham Harman en 1972, il élabore le projet baptisé SENS (Strategies for Engineered Negligible Senescence) destiné à prévenir le déclin physique et mental lié au vieillissement.

Il propose de développer un moyen de régénérer les tissus cellulaires permettant de rajeunir et d’étendre l’espérance de vie humaine sans limitation de durée. Il aurait identifié sept causes du processus de vieillissement qui doivent être contrées afin de mener à bien ce projet.

Sur sa carrière passée d’informaticien (puis de bio-informaticien en génétique), Aubrey de Grey déclare :

Il y a des différences vraiment importantes entre le type de créativité d’un scientifique et celui d’un ingénieur technique. Cela signifie que je suis capable de penser de plusieurs manières très différentes, et de me retrouver avec des approches des choses qui sont différentes de la manière de penser d’un scientifique normal.

En 2007, il écrivit un livre, Ending Aging, avec Michael Rae, qui résume les enjeux scientifiques, politiques et sociaux du projet SENS. Il est le rédacteur en chef de la revue Rejuvenation Research. C’est aussi un génie multiple, capable à l’occasion de résoudre un problème mathématique resté sans solution pendant des décennies.

Irina Conboy

Irina Conboy est professeure à l’université de Californie, Berkeley, dans le département de bio-ingénierie. Sa découverte des effets rajeunissants du sang jeune par la parabiose dans un article fondateur publié dans Nature en 2005 a ouvert la voie à un domaine florissant de la biologie du rajeunissement. Son époux, Michael Conboy, travaille avec elle.

Une étude publiée en mai dans la revue Aging montre que des effets similaires d’inversion de l’âge peuvent être obtenus en diluant simplement le plasma sanguin de vieilles souris sans recours à du sang jeune.

Chez l’humain, la composition du plasma sanguin peut être modifiée par une procédure clinique appelée échange thérapeutique de plasma, ou plasmaphérèse, qui est actuellement approuvée par la Food and Drug Administration aux États-Unis pour le traitement de diverses maladies auto-immunes.

David Sinclair

David Sinclair est un biologiste australien qui est professeur de génétique et co-directeur du Paul F. Glenn Center for the Biology of Aging à la Harvard Medical School.

Il est connu pour ses recherches sur le vieillissement, il a été notamment nommé officier de l’Ordre d’Australie (AO) pour « services éminents rendus à la recherche médicale sur la biologie du vieillissement et de l’allongement de la durée de vie, en tant que généticien et universitaire, aux initiatives de biosécurité et en tant que défenseur de l’étude des sciences ».

Le Dr Sinclair est co-fondateur de plusieurs sociétés de biotechnologie (Sirtris, Ovascience, Genocea, Cohbar, MetroBiotech, ArcBio, Liberty Biosecurity) et siège au conseil d’administration de plusieurs autres. Il est également co-fondateur et co-rédacteur en chef de la revue Aging.

Il travaille notamment sur des substances appe­lées sirtuines, une classe d’en­zymes qui agissent comme des « agents de la circu­la­tion », mobi­li­sant un grand nombre de protéines afin de répa­rer et défendre les cellules.

Miroslav Radman

Miroslav Radman aime les paradoxes. Dans la même phrase, ce scientifique rigoureux, passionné d’art et chanteur dans une chorale, explique avoir créé, à Split, dans une ancienne caserne militaire croate, l’Institut méditerranéen des sciences de la vie (MedILS), qui fonctionne avec un esprit « collège » mais comme un jazz-band !

Ancien chercheur à Harvard, mais aussi à Zagreb et à Bruxelles, il a été récompensé de nombreux prix scientifiques, dont le Grand prix de l’Inserm. Il est professeur de biologie cellulaire à l’université Paris Descartes, et membre de l’Académie nationale des sciences. Il est par ailleurs auteur du “Code de l’immortalité”.

Ce célèbre biologiste-généticien cherche à révolutionner les études sur le vieillissement. Après avoir travaillé sur l’ADN et les gènes, mais aussi sur la bactérie extrémophile et hyper-résistante Deinococcus radiodurans, il décrypte nos bactéries et nos protéines réparatrices. Ouvrant une voie vers de nouvelles thérapies pour les maladies dégénératives et cancéreuses.

Steve Horvath

Steve Horvath est un chercheur, généticien et biostatisticien germano-américain spécialisé dans le vieillissement. Il est professeur à l’université de Californie à Los Angeles, connue pour avoir développé l’horloge de vieillissement qui porte son nom, qui est un biomarqueur moléculaire très précis du vieillissement, et pour avoir développé l’analyse de réseau de corrélation pondérée.

Selon lui: Une fois que nous saurons comment mesurer avec précision le vieillissement, nous pourrons l’étudier et le vaincre.

Il travaille sur tous les aspects du développement de biomarqueurs, en particulier les biomarqueurs génomiques du vieillissement. Il a développé un biomarqueur multi-tissus très précis du vieillissement connu sous le nom d’horloge épigénétique.

Nir Barzilai

Le docteur Nir Barzilai est directeur fondateur de l’Institute for Aging Research de l’Albert Einstein College of Medicine de New York.

Je pense que la prévention du vieillissement est vraiment une bonne chose. … et je pense que la vie va être très différente dans la prochaine décennie grâce à nos progrès.

À son agenda est inscrite depuis plusieurs années la mise au point d’un essai clinique unique au monde qui vise à montrer qu’une molécule peut retarder l’apparition de toutes les maladies dont l’incidence augmente avec l’âge. Son nom : la metformine, un médicament très connu qui diminue la résistance à l’insuline dans le traitement du diabète de type 2.

L’étude TAME (Targeting Aging with METformin) est financée par une association à but non lucratif, l’AFAR (American Federation for Aging Research). « Personne ne gagnera d’argent si ce médicament prouve son efficacité car la metformine est un générique qui coûte quelques centimes la dose seulement ».

Cynthia Kenyon 

Cynthia Kenyon est une biologiste moléculaire américaine qui étudie la génétique du processus de vieillissement (gérontogenèse).

Kenyon a étudié la chimie et la biochimie et a fait ensuite son doctorat en 1981 au Massachusetts Institute of Technology.

A Cambridge, elle a étudié les gènes Hox, actifs dans la morphogenèse chez la drosophile. Elle a dirigé ensuite le centre Hillblom de l’UCSF de biologie du vieillissement à San Francisco.

Elle a notamment démontré qu’en agissant sur un seul gène (nommé daf-2) et en détruisant les cellules du système reproducteur, la durée de vie du nématode Caenorhabditis elegans pouvait être multipliée par 6, de moins de 3 semaines à 4 mois.

Madame Kenyon est actuellement employée par Google Calico, en tant que vice-présidente Aging research et chercheuse sur le vieillissement.

Brian Kennedy

Brian Kennedy est internationalement reconnu pour ses recherches sur la biologie du vieillissement et pour son travail visant à traduire les découvertes de la recherche en de nouveaux moyens de retarder, détecter et prévenir le vieillissement humain et les maladies qui y sont associées. Il travaille actuellement à Singapour. De 2010 à 2016, il a été le président et le directeur général du célèbre Institut Buck, où il est toujours professeur.

Notre travail sur de multiples modèles animaux montre que les processus qui entraînent le vieillissement sont conservés chez les espèces. L’étude de ces voies communes permet de développer des thérapies qui ralentiraient le processus de vieillissement, prévenant ainsi les maladies chroniques.

Jean-Marc Lemaître

Le biologiste Jean-Marc Lemaître est né le 14 octobre 1963. Enfant, il se plaît à observer les mares de sa région natale, la Picardie, pour y étudier les transformations des tritons et des têtards. Une passion qui le conduira à effectuer des études en biologie du développement. Chargé de recherches à l’Institut de Génomique fonctionnelle (Inserm/CNRS/Université de Montpellier), il tente de démontrer que le vieillissement est réversible.

Il y parvient en novembre 2011 et publie ses travaux sur le rajeunissement des cellules dans la revue américaine Genes and Development.

C’est une réussite clinique considérable  commente Jean-Marc Lemaître.  Si nous sommes capables de retarder le vieillissement des cellules, peut-être allons-nous alors parvenir à retarder le développement de certaines pathologies.

Maria Blasco

Le Dr Blasco est une biologiste moléculaire dont les principaux intérêts, depuis l’époque de ses études universitaires, sont le cancer et le vieillissement. Après avoir obtenu son doctorat au Centre de biologie moléculaire de Madrid, elle a déménagé à Cold Spring Harbor, New York, pour travailler comme chercheur post-doctoral dans le laboratoire du Dr Carol Greider, la même Carol Greider qui a co-découvert la télomérase avec Elizabeth Blackburn en 1995.

À l’époque, le lien entre le cancer, le vieillissement et la télomérase n’était qu’une simple hypothèse qui restait à prouver, et Blasco a entrepris de cloner le gène de la télomérase murine et de créer des souris knock-out pour la télomérase afin d’étudier les effets que le manque d’enzyme provoquerait chez les animaux.

George Church

Aussi barbu, surdoué et souvent aussi anticonformiste qu’Aubrey de Grey, George Church est un Américain, chimiste, généticien et ingénieur en biologie moléculaire, notamment connu pour un livre Regenesis, co-écrit avec Ed Regis, sous-titré « Comment la biologie synthétique va réinventer la nature et nous-mêmes » qui présente un futur où le génie génétique aurait amélioré la santé humaine et animale, accru notre intelligence, notre mémoire et allongé notre vie.

Il a repris une liste de 400 gènes iden­ti­fiés comme poten­tiel­le­ment respon­sables de la longé­vité chez l’homme et l’a rame­née à 45. Aujourd’­hui, il déve­loppe diffé­rentes tech­niques afin de cibler des combi­nai­sons de ces gènes.  Notre but prin­ci­pal est d’in­ver­ser le proces­sus du vieillis­se­ment, explique Church. Nous savons qu’en boule­ver­sant les règles, nous pouvons augmen­ter l’es­pé­rance de vie de deux ans et demi chez les rongeurs et de 200 ans chez les baleines boréales. 

Le séquençage des gènes, ajoute-t-il, est presque 3 millions de fois moins coûteux qu’il y a dix ans. Cela nous permet de recou­rir à la biolo­gie de synthèse et nous ne sommes plus restreints par les limites des êtres vivants. 

Les travaux de Church sont finan­cés en partie par l’Ins­ti­tut Wyss. Le scien­ti­fique a égale­ment reçu des fonds de la part de Google et de Peter Thiel.

Laura Deming

Laura Deming est biologiste et fondatrice de The Longevity Fund, la première société de capital-risque à se concentrer sur les entreprises qui travaillent à prolonger la durée de vie des êtres humains en bonne santé et à lutter contre les maladies liées au vieillissement grâce à la biotechnologie.

Elle a fait ses premières armes en biologie en Nouvelle-Zélande, où elle a fait ses études à la maison, puis est partie aux États-Unis pour travailler dans un laboratoire de biologie de l’UCSF à l’âge de 12 ans. À 14 ans, elle était déjà étudiante en physique au MIT.

Elle décrit ainsi la naissance de son engagement :

Je me souviens d’une fois où ma grand-mère est venue nous rendre visite. Je n’avais jamais fréquenté quelqu’un de plus de 60 ans auparavant. (…) Pour ma grand-mère, seulement se lever d’une chaise, c’était vraiment douloureux. (…) je me rappelle avoir demandé à mes parents quelle maladie était-ce. Ils m’ont dit : elle n’est pas atteinte d’une maladie, elle est vieille. Je leur ai demandé  quelle maladie c’était d’être vieux. Ils m’ont dit : « Oh, non, non, tu ne comprends pas, c’est un processus naturel. » Et en tant qu’enfant, vous vous dites : « C’est stupide. Pourquoi y a-t-il un processus naturel que nous devrions tous attraper, une maladie qui nous rend tellement abimés ? »

Alex Zhavoronkov

Alex Zhavoronkov, est le fondateur et le PDG de Deep Longevity, Inc, une entreprise mondiale qui développe une large gamme de biomarqueurs du vieillissement et de la longévité basés sur l’intelligence artificielle. Il est également le fondateur et le PDG d’Insilico Medicine, leader dans les technologies d’intelligence artificielle pour la découverte de médicaments et le développement de biomarqueurs.

Depuis 2015, il a inventé des technologies critiques dans le domaine des “réseaux adversaires générateurs” (GAN) et de l’apprentissage par renforcement (RL) pour la génération de nouvelles structures moléculaires ayant les propriétés souhaitées et la génération de données biologiques synthétiques et de données sur les patients. Il a également été le pionnier des applications des technologies d’apprentissage approfondi pour la prédiction de l’âge biologique humain à l’aide de multiples types de données, le transfert de l’apprentissage du vieillissement vers la maladie, l’identification des cibles et la modélisation des voies de signalisation.

Une liste certainement incomplète et quelques « coups de coeur »

Choisir c’est renoncer. Nous aurions pu écrire également à propos de bien d’autres chercheurs. Ils sont des milliers à lutter jour après jour pour réparer des ans l’irréparable outrage. Le brillant Greg Fahy et ses études sur le thymus,  Josh Mitteldorf et son Data-Beta Project d’étude des effets cumulés de thérapies de longévité, Michael Rose, qui travailla sur la notion de pléanthropie antagoniste, William Andrews, le spécialiste des télomères qui court également des ultra-marathons, la controversée Liz Parrish de BioViva qui a expérimenté sur elle-même des thérapies géniques, les spécialistes des (super)centenaires et de la démographie dont Jean-Marie Robine et le couple Gavrilov.

Il y en a encore bien d’autres moins connus : les centaines de collaborateurs des scientifiques déjà cités, Sven Bulterijs, coprésident de Heales qui chaque mois réalise une revue des nouvelles de la longévité, Ilia Stambler, le meilleur historien des sciences de la longévité auteur du monumental Longevity A History of Life-Extensionism in the Twentieth Century, Kevin Perrott et son organisation Open Cures, Alexandra Stolzing qui s’efforce de rajeunir des souris avec conviction et discrétion, Guilhem Velve Casquillas, créateur du site LongLongLife et de multiples entreprises, la russe Maria Konovalenko, scientifique, activiste et photogénique travaillant, comme beaucoup d’autres dans la Silicon Valley, Laurent Simons, l’enfant belge surdoué qui a 9 ans voulait faire vivre ses grands-parents pour toujours, 


La bonne nouvelle du mois : Eurosymposium on Healthy Ageing 2020


La 5ème édition de l’Eurosymposium a eu lieu en ligne le 1er Octobre 2020 à l’occasion de la journée internationale des personnes âgées. 

Cet événement a réuni des scientifiques émérites pour traiter du sujet des biomarqueurs de la longévité ainsi que des tests cliniques.

Les vidéos, séparées par intervenant, sont disponibles sur Youtube.

Suite à cette conférence, une déclaration a été adoptée pour faciliter la recherche sur les biomarqueurs et les tests cliniques. En voici un extrait (traduit) :

Il devrait y avoir une obligation pour les comités d’éthique de décider dans un délai raisonnable des tests diagnostiques sur les biomarqueurs du vieillissement et de la recherche clinique de thérapies géroprotectrices (pas plus d’un mois, à moins de fournir une justification du retard). Décider plus rapidement ne doit pas signifier être moins prudent, au contraire. (…)

En améliorant l’évaluation des biomarqueurs cliniques du vieillissement et en testant de nouvelles thérapies géroprotectrices, il pourrait être possible de réduire radicalement les processus dégénératifs du vieillissement, et donc d’accroître les avantages sanitaires et économiques de la société qui vieillit rapidement. Nous devons atténuer les processus de sénescence dès que possible pour sauver le plus grand nombre de vies possible.


Pour en savoir plus :

Source de l’image: réalisé par la rédaction.

La mort de la mort. Partage de données de santé et longévité N° 138 Septembre 2020

Je fais un rêve qu’un jour les humains s’uniront et diront : Nous tenons cette vérité comme évidente que ce qui sert au droit à la santé est un bien commun.

Je fais un rêve qu’un jour les données médicales, les données de recherche pour la santé et la longévité seront accessibles à tous et permettront une vie plus longue, solidaire et en belle santé.

Je fais un rêve que ceux qui étaient atteints de maladies et ceux qui étaient submergés par la bureaucratie, les réglementations et les intérêts financiers ou psychologiques se retrouveront soeurs et frères pour être tous ensemble plus résilients, plus heureux et fiers de s’entraider.

Je fais un rêve que l’enfer des connaissances privatisées et dispersées se transformera en éden de partage des savoirs pour permettre une vie en bonne santé beaucoup plus longue pour tous.

Texte inspiré de « I have a dream » de Martin Luther King.


Thème du mois : Partage de données de santé et longévité


Nos données de santé 

Parmi toutes les informations personnelles conservées de manière informatique, mais aussi encore bien souvent sous format papier, les informations relatives à la santé et à l’ensemble de nos données biologiques sont parmi les plus nombreuses, les plus sensibles et les plus utiles.

Depuis le début de l’histoire de la médecine, les soins de santé sont prodigués grâce à des connaissances collectives, des expériences individuelles, des croyances souvent inexactes et la connaissance de l’état du patient.

Ce n’est que relativement récemment que les données des patients sont devenues une part importante du champ des connaissances, non plus seulement pour le traitement des personnes elles-mêmes, mais aussi pour la recherche médicale.

Comment partager les données de santé ?

Depuis la fin du 20ᵉ siècle, le souci de protéger la vie privée va croissant. Au départ, les dispositions prises avaient pour objectif et pour résultat d’empêcher des abus. Aujourd’hui, la combinaison des réglementations et des pratiques relatives aux données médicales et plus largement l’ensemble des réglementations et pratiques concernant la vie privée des citoyens a pour conséquence que :

  • Le citoyen n’a pas accès à ses propres données médicales de manière simple.
  • Le citoyen n’a pas la possibilité de participer à des expérimentations médicales et de partager les connaissances de manière scientifique, même s’il souhaite le faire par intérêt personnel ou collectif, même s’il a donné son consentement informé explicite.
  • Les chercheurs n’ont pas accès aux données détaillées relatives à la santé de la plupart des citoyens.
  • Les données médicales font souvent l’objet de transactions commerciales opaques.
  • Le développement de recherches utilisant l’intelligence artificielle et les « données massives en matière médicale » est ralenti. Ce développement est souvent aussi faussé car les données sont partielles, commercialisées et comportent potentiellement plus d’inexactitudes.

Il est parfaitement normal que le citoyen soit protégé d’utilisations illégales de données privées susceptibles de lui nuire. Mais la protection devrait s’arrêter là. Il est immoral, et il devrait être illégal, que les données utiles à la santé publique soient soustraites aux chercheurs, lorsque cette mise à disposition ne comporte pas d’inconvénients pour les personnes dont émanent les données.

Dans un monde idéal, le fait que les données médicales puissent avoir de la valeur pour la recherche ne devrait pas donner lieu à des transactions financières si ce n’est par rapport au coût des opérations nécessaires à la mise à disposition de ces données.

La situation actuelle n’assure d’ailleurs pas la protection de la vie privée. Elle interdit quasi totalement, en fait et en droit, le partage efficace des données.  Pour tout ce qui concerne la médecine classique, le dossier médical, les rapports avec nos institutions de santé, nos informations pharmaceutiques, … nous n’y avons qu’un accès restreint et temporaire. L’absence de mise en commun pour prévenir et réduire dans le futur l’impact des maladies est particulièrement regrettable pour les informations concernant les personnes âgées (indicateurs de maladies neurologiques, détections de chutes, …).

Quelques organisations privées et publiques partageant des données

Les nouveaux outils, comme le traitement en masse des données de santé et l’intelligence artificielle vont permettre d’importants progrès dans l’accompagnement des patients, l’évaluation et le choix des traitements et la gestion du système de santé. C’est pourquoi de nombreux acteurs investissent dans ce domaine. 

  • Health data hub (HDH) est une plateforme de partage des données de santé lancée en décembre 2019 en France.  Son objectif est de favoriser l’utilisation et la multiplication des possibilités d’exploitation des données de santé, en particulier dans les domaines de la recherche, de l’appui au personnel de santé, du pilotage du système de santé, du suivi et de l’information des patients. Le HDH permet le développement de nouvelles techniques, notamment celles liées aux méthodes d’IA. Il a aussi un rôle de promotion de l’innovation dans l’utilisation des données de santé.
  • Un projet similaire existe en Allemagne : the German Medical Informatics Initiatives (MII). Les projets français et allemands partagent les mêmes objectifs mais sont différents en termes de méthodologies. Le projet HDH est basé sur une approche descendante et se concentre sur une infrastructure de calcul partagée, fournissant des outils et des services pour accélérer les projets entre les producteurs et les utilisateurs de données. Le projet MII est basé sur une approche ascendante et s’appuie sur quatre consortiums comprenant des hôpitaux universitaires, des universités et des partenaires privés.
  • Apple mise beaucoup sur les fonctionnalités liées à la santé et au bien-être avec son Apple Watch. Le dernier modèle peut notamment mesurer la fréquence cardiaque, avertir de chutes, effectuer un électrocardiogramme (ECG) grâce à un capteur optique. Malheureusement, tant la firme à la pomme que des firmes offrant des services similaires ne partagent pas les informations.
  • La Fondation X-Prize promeut l’intégration des données sur les soins de santé. Faire tomber les barrières à l’accès aux données tout en respectant les principes de confidentialité et de sécurité est un défi immense et une opportunité formidable. Des données normalisées, agrégées et granulaires sur les patients, pouvant être partagées entre les systèmes, constituent la base de soins de santé peu coûteux et de haute qualité, notamment en permettant aux systèmes de santé de première ligne de fonctionner de manière optimale et efficace. En outre, ces données sont essentielles pour que les algorithmes d’IA puissent fournir des informations.

Favoriser les utilisations pour la santé, empêcher les utilisations illégitimes

Votre assureur, votre banquier, l’État savent bien des choses sur vous. Google, Facebook, votre employeur et votre voisin aussi. Ils ne s’en servent en principe pas dans des buts illégitimes. 

Ce qu’il faut d’abord, c’est interdire l’utilisation illégitime des informations ainsi que des sanctions effectives en cas d’usage nuisible des données de santé (comme de toute autre donnée d’ailleurs)  Il faut empêcher que les données sur le sexe, les origines, l’état de santé, etc., puissent être utilisées par des entreprises privées ou publiques pour pratiquer des discriminations. Il ne doit pas être admis de vendre, de fournir des services ou même de contacter des personnes de manière différenciée dans d’autres cadres que la recherche scientifique et les soins de santé. Une utilisation illégitime doit être sévèrement interdite. Une violation de l’interdiction doit être sanctionnée par des mesures comprenant notamment l’indemnisation totale des victimes et la prévention de la récidive.

Un aspect important des données de santé considérées comme un bien commun, et non comme un bien privé, est qu’il s’agirait de dispositions auxquelles il ne pourrait être dérogé. Il n’y aurait pas de clause possible permettant de vendre, louer, échanger, … les données de santé. Cette interdiction concernerait tant les données des patients d’une institution de santé que les données propres d’un individu.
 

Bien sûr, il faudrait éviter que les données médicales individuelles soient accessibles aux simples curieux. Pour tout ce qui n’est pas directement nécessaire à la recherche scientifique, un système d’anonymisation (ou de pseudonymisation) devrait être réalisé.

Conclusion : partager pour progresser en longévité et en résilience

Réellement mettre en commun les données de santé est aujourd’hui tout à fait possible techniquement. Le cadre juridique et logistique serait relativement aisé à mettre sur pied.

Imaginez un monde où les données de santé ne peuvent être utilisées commercialement, mais seulement pour votre santé et celle d’autruit. Imaginez un monde où la mise en commun des données médicales serait systématique, instantanée et utilisable par l’intelligence artificielle. Votre médecin et vous sauriez en quelques secondes, quels médicaments prennent les gens de votre âge, de votre région, ayant vos caractéristiques médicales, quel est le meilleur traitement compte tenu des connaissances recueillies partout dans le monde.

Imaginez ce qui devrait être la logique élémentaire suivie. Tout comme vous pouvez trouver aisément sur internet ce qu’a fait votre femme politique ou votre chanteur préféré en juillet 2007, vous pourriez d’un clic trouver le médicament que vous aviez pris il y a 3 ans, l’analyse de sang, les vaccinations, que vous aviez fait effectuer il y a 15 ans, la comparaison avec d’autres populations, vos allergies, prédispositions, …

Imaginez que toutes ces données permettent demain des recherches de santé collectives beaucoup plus performantes, des expérimentations cliniques plus sûres et plus rapides. 

Imaginez une vie beaucoup plus longue et en meilleure santé pour tous ceux qui le souhaitent.


La bonne nouvelle du mois : Vers une restauration de la fertilité des femmes ménopausées


Une étude pilote, menée entre 2017 et 2019 à la clinique de fertilité Genesis à Athènes en Grèce, a permis à des femmes ménopausées de donner la vie. Aux termes de cette expérience menée sur 30 femmes qui n’avaient pas eu leurs règles depuis plus d’un an, 80 % d’entre elles ont vu leur taux d’hormones s’améliorer et ont retrouvé un cycle menstruel régulier. Parmi elles, quatre sont tombées enceintes, trois ont eu des enfants. La fertilité aurait été restaurée à l’aide de transfusions sanguines par la méthode PRP (Platelet-Rich Plasma) ovarienne.

Nous avons abordé dans des lettres précédentes les effets réjuvénateurs potentiels des transfusions. D’autres recherches sont en cours afin de confirmer que ce traitement de fertilité est viable. Le professeur Pantos supervise quatre essais cliniques randomisés, contrôlés par placebo, et deux autres essais sont menés par le professeur Emre Seli à l’école de médecine de Yale.


Pour en savoir plus :

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La mort de la mort Surpopulation et longévité N° 137 Août 2020

La bataille pour nourrir toute l’humanité est terminée. Dans les années 1970, des centaines de millions de personnes mourront de faim malgré les programmes de secours lancés aujourd’hui. À cette date, rien ne pourra empêcher une augmentation substantielle du taux de mortalité dans le monde…

Voilà la chute certaine de l’espérance de vie suite à la surpopulation que Paul Ehrlich, auteur de l’ouvrage « The Population Bomb« , paru en 1968 et vendu à des millions d’exemplaires, annonçait. Un demi-siècle plus tard, la taille de la population mondiale a plus que doublé. Même si des centaines de millions de personnes souffrent encore de la faim, jamais nous n’avons eu autant de nourriture par personne. Et concernant le taux de mortalité, l’espérance de vie globale a progressé de plus de 15 ans.


Thème du mois : Surpopulation et longévité


Déclin vers 2064

Il est temps pour certains pessimistes de mettre de côté leurs images de malheur sur la surpopulation. Selon une étude récente publiée dans la revue scientifique The Lancet, la population mondiale atteindra son maximum vers 2064, à 9,7 milliards d’individus, et entamera alors un déclin pour redescendre à 8,8 milliards de terriens à la fin du siècle.

Dans les années 60, chaque femme avait encore en moyenne 4,5 enfants, aujourd’hui ce chiffre est inférieur à 2,5. Ce chiffre n’est pas beaucoup plus élevé que le taux de remplacement de 2,1 : le nombre dont vous avez besoin pour maintenir une population.

Comme l’écrit le médecin suédois Hans Rosling dans son livre Factfulness : Lorsque les parents voient que les enfants restent en vie, que les enfants ne sont plus nécessaires au travail et que les femmes reçoivent une éducation et ont accès aux contraceptifs, les deux sexes, dans toutes les cultures et religions, commencent à rêver d’enfants moins nombreux, mais bien éduqués.

En 1950, 25 bébés naissaient pour chaque personne qui soufflait 80 bougies. Aujourd’hui, ce chiffre est d’environ sept. Si l’évolution actuelle se poursuit, en 2100, pour chaque personne de plus de 80 ans, il n’y aura qu’un seul bébé. C’est une révolution invisible, une pyramide des âges inversée, jamais vue auparavant dans l’histoire. Il est temps d’y réfléchir, au lieu de se complaire avec des images désuètes ressassant une soi-disant inévitable explosion de la population mondiale.

En 2100, 183 pays n’auraient pas les taux de fécondité nécessaires pour maintenir la population actuelle

Nous sommes aujourd’hui environ 7,8 milliards d’habitants. Les démographes savaient déjà que notre population devrait diminuer d’ici quelques décennies, mais cette nouvelle étude prédit que ça se produira encore plus vite que nous ne le pensions.

Les Nations unies ont également supposé que les pays qui tombent en-dessous du taux de remplacement se stabiliseront autour de 1,75 enfant par femme, mais selon The Lancet, cette estimation est basée sur un échantillon sélectif. Dans des pays tels que la Thaïlande, la Corée du Sud et la Grèce, nous constatons que la baisse se poursuit à moins d’un enfant et demi par femme. Et cela fait une grande différence à long terme.

Bien sûr, un monde d’environ 10 milliards d’habitants reste un défi, surtout si nous voulons que tout le monde profite du niveau de prospérité occidental (un milliard de personnes n’ont même pas encore accès à l’électricité). Mais  avec la science et la technologie modernes, c’est certainement surmontable. Plus de gens signifie même, à bien des égards, une bonne nouvelle.

A priori, il semble plausible que, plus il y a de gens, moins il reste de ressources pour tout le monde. Or, d’un point de vue économique, ce n’est pas toujours vrai. Plus de personnes signifie souvent moins de pénurie. Parce que de nombreux cerveaux, regroupés de manière dense, trouvent des idées plus intelligentes et se spécialisent davantage. L’indice d’abondance Simon, du nom de l’économiste et penseur Julian Simon, montre que les matières premières deviennent plus abondantes et moins chères à mesure que la population mondiale augmente. Cela semble fou et contre-intuitif, mais c’est souvent le cas avec les connaissances scientifiques.

Attention cependant, ceci n’est envisageable, à terme, que dans un monde où les progrès technologiques permettent d’utiliser principalement des énergies et matières premières renouvelables. C’est techniquement possible, mais cela nécessite une volonté politique, sociale et économique encore insuffisante aujourd’hui.

Il faut aussi tempérer l’image d’un monde surpeuplé. La surface de la planète  fait environ 500 millions de kilomètres carrés dont 150 millions de terres émergées. Un pays comme le Bangladesh est autosuffisant en matière d’alimentation avec plus de 160 millions d’habitants (un quarantième de la population mondiale sur 1 millième de la surface des terres émergées).

Selon les projections effectuées, d’ici 2100, 183 des 195 pays n’auraient pas les taux de fécondité nécessaires pour maintenir la population actuelle, avec une projection de 2,1 naissances par femme, ont déclaré des chercheurs de l’Institut de métrologie et d’évaluation de la santé de l’École de médecine de l’Université de Washington. Quelque 23 pays – dont le Japon, la Thaïlande, l’Italie et l’Espagne – verraient leur population diminuer de plus de 50 %.

Cependant, la population de l’Afrique subsaharienne pourrait tripler, ce qui permettrait à un peu moins de la moitié de la population mondiale d’être africaine d’ici la fin du siècle.

Le monde, depuis les années 1960, s’est vraiment focalisé sur la soi-disant explosion démographique, a déclaré le Dr Christopher Murray, qui a dirigé la recherche, à CNN. Soudain, nous assistons maintenant à ce genre de tournant où il est très clair que nous passons rapidement de la question du trop grand nombre à celle du trop petit nombre.

Les plus de 80 ans seront plus nombreux que les moins de 5 ans

L’étude prévoit également des changements majeurs dans la structure des âges au niveau mondial à mesure que la fécondité diminue et que l’espérance de vie augmente. On estime qu’en 2100, 2,37 milliards de personnes auront plus de 65 ans dans le monde, contre 1,7 milliard de moins de 20 ans.

Le nombre de personnes âgées de plus de 80 ans dans le monde pourrait être multiplié par six, passant de 141 millions à 866 millions. Dans le même temps, le nombre d’enfants de moins de cinq ans devrait diminuer de plus de 40 %, passant de 681 millions en 2017 à 401 millions en 2100. L’enfance pourrait devenir rare.

Et la longévité en bonne santé dans tout cela ?

Il faut d’abord rappeler, comme cela a été fait dès 2012 dans une lettre « la mort de la mort« , qu’il y a une corrélation forte entre l’espérance de vie et la fécondité. Dans les régions du monde ou les femmes et les hommes vivent plus longtemps (et sont mieux éduqués et plus aisés), la natalité diminue et la population tend à décroître. Lorsque l’espérance de vie croît, la natalité diminue et la croissance de la population est moindre (ou négative).

Première bonne nouvelle donc, la longévité est un facteur stabilisant pour la population. Pour le dire d’une manière qui apparaîtra provocatrice : pour être moins nombreux, vivons plus longtemps !

Deuxième bonne nouvelle : là où les gens vivent plus longtemps, ils tendent à être plus prudents. Si un jour, la durée de vie devient potentiellement beaucoup plus longue, bien au-delà du siècle, les citoyens seront naturellement bien plus prudents, investiront plus pour leur avenir et ne souhaiteront, ni pour eux-mêmes, ni pour les autres, une planète surpeuplée.

Il y a cependant une moins bonne nouvelle. Jusqu’à aujourd’hui, pour les populations au-delà de 80 ou 90 ans, nous ne parvenons toujours pas à des progrès importants en matière de santé. Comme déjà exposé dans des lettres précédentes, pour ce qui est de la durée de vie maximale, nos progrès sont insuffisants, particulièrement pour la longévité en bonne santé.

Donc, dans l’état actuel, la surpopulation, nous ne la risquons pas, au contraire. Mais bien un monde avec une population fragile nombreuse. C’est une des nombreuses raisons pour lesquelles les recherches pour une vie beaucoup plus longue en bonne santé sont fondamentales, pas seulement dans l’intérêt individuel, mais aussi dans l’intérêt collectif.


Les bonnes nouvelles du mois : La maladie d’Alzheimer recule en Europe et aux États-Unis. Du plasma et de l’albumine pour diminuer l’impact de la maladie d’Alzheimer. Une enzyme prévient la perte de mémoire chez les souris.


Le risque de développer une maladie d’Alzheimer ou une autre forme de dégénérescence neuronale à un âge donné s’est réduit de 13 % en dix ans, rapporte une importante étude menée aux États-Unis et dans plusieurs pays européens.

Attention, cette bonne nouvelle est relative. Du fait de l’augmentation de l’espérance de vie, le nombre de personnes ayant la maladie d’Alzheimer augmente quand même. En d’autres termes, le pourcentage de personnes atteintes dans une tranche d’âge diminue, le nombre absolu de personnes atteintes continue d’augmenter.

Dans le domaine de la recherche proprement dite contre la maladie d’Alzheimer,  un essai clinique pour enlever les facteurs vieillissants du sang (en injectant de l’albumine et de l’immunoglobuline), donne de bons résultats. Cette étude est randomisée et réalisée en double-aveugle. Elle reste néanmoins à confirmer d’autant qu’elle est financée par une société produisant de l’albumine et de l’immunoglobuline a des fins thérapeutiques.

Dans un article à paraître dans la revue Acta Neuropathologica, Lars et Arne Ittner, chercheurs spécialisés dans l’étude de la démence à l’Université Macquarie, détaillent comment l’activation d’une enzyme clef (p38gamma) dans le cerveau peut prévenir le type de perte de mémoire associé aux formes avancées de la maladie d’Alzheimer, et même l’inverser. Une avancée importante testée sur des souris, à confirmer sur les humains.


Pour en savoir plus :

Source de l’image.

Sang et réjuvénation. N°136 Juillet 2020.

L’homme a surmonté le pouvoir de la sélection naturelle. Il ne s’adapte plus aux conditions de l’environnement extérieur, mais crée autour de lui un environnement artificiel et bénéfique, en remodelant la nature. Il n’a pas besoin de la mort comme facteur accélérant l’amélioration de l’humanité de génération en génération (…). 

Il n’y a aucune interdiction théorique à soulever la possibilité de l’immortalité. Je suis profondément convaincu que, tôt ou tard, l’ère de la longévité arrivera. (…) Comme dans toute tâche, il faut des enthousiastes pour cela, malheureusement ils sont très peu nombreux. Nous sommes gênés par la conviction profonde que la mort est inévitable et que la lutte contre elle est futile. C’est une sorte de barrière psychologique qu’il faut surmonter.

Vasily Feofilovich Kuprevich, microbiologiste (1897-1969). Cité par Ilia Stambler dans A History of Life-Extensionism In Twentieth Century. 2014.


Thème du mois : Sang et réjuvénation


Un peu d’histoire

Depuis des millénaires, le sang est un des éléments du corps avec la plus forte représentation symbolique, représentant notamment la vie, l’hérédité (liens du sang), la fidélité (échange de sang) et les mécanismes de réjuvénation.

Considéré comme l’un des gestes les plus anciens de la médecine, la saignée provient probablement de l’Égypte ancienne, mais aussi des plus anciennes traditions de l’Inde et du monde arabe.

En Grèce, Érasistrate, au troisième siècle avant JC, enseignait que les maladies découlent d’une surabondance de sang : la pléthore.

Au deuxième siècle de notre ère, Galien professait que la bonne santé nécessite un équilibre parfait des quatre «humeurs» : le sang, le flegme, la bile jaune et la bile noire. Ses écrits et ses enseignements ont fait de la saignée une technique courante dans tout l’empire romain.

Dans l’Europe médiévale, la saignée est devenue le traitement de base pour toutes les maladies, en particulier, la peste,  la variole, l’épilepsie et la goutte.

La technique était alors d’entailler les veines ou des artères dans l’avant-bras ou du cou, en utilisant un outil spécial avec une lame aiguë.

La saignée, comme procédure médicale, est devenue un peu moins angoissante au 18ème siècle : les médecins utilisaient des lancettes à ressort et un instrument appelé scarificateur, comportant plusieurs lames faisant des coupes parallèles.

Sang jeune 

Et si l’élixir de jouvence coulait dans nos veines ? Du moins chez ceux d’entre nous qui n’en ont pas encore asséché la source : les jeunes. L’hypothèse, qui semble tout droit sortie d’un film de vampires, est étudiée de plus en plus sérieusement depuis que des expériences ont montré que le sang extrait d’un organisme dans la force de l’âge peut régénérer les corps affaiblis par le poids des années. Au point que, pour lutter contre les nombreuses maladies associées à la vieillesse, de premiers essais de transfusion de patients viennent de démarrer.

Un article récent signé notamment par Harold Katcher et Steve Horvath concerne des rats âgés de 2 ans qui ont reçu un plasma sanguin de jeunes rats. Leurs indicateurs physiologiques durant le test étaient quasiment devenus ceux de rats de 6 mois. Cela semble prometteur mais cette étude est controversée du fait notamment qu’il ne teste pas la longévité et que l’échantillon de rats n’est pas suffisant pour en tirer des conclusions fiables. Cette étude n’a d’ailleurs pas encore été validée par la communauté scientifique.

Il y a 15 ans déjà, cette piste surprenante dans la quête de la jeunesse éternelle ou du moins prolongée s’est ouverte avec les expériences réalisées par Irina et Michael Conboy et leurs collègues de l’université de Stanford. Nous nous demandions pourquoi les organes vieillissent tous plus ou moins à la même vitesse, et nous avons pensé que le sang qui les relie pouvait être une explication, raconte Michael Conboy.

Pour le vérifier, son équipe a relié temporairement le réseau vasculaire de souris jeunes à celui de souris âgées, comme s’il s’agissait de siamois, une opération chirurgicale complexe, nommée parabiose. Et ils ont constaté que les muscles et le foie des plus vieilles se régénéraient plus efficacement, tandis que l’inverse se produisait chez les souris jeunes.

Selon les résultats publiés par une équipe internationale dirigée par Tony Wyss-Coray, de l’université de Stanford, le sang jeune pourrait stimuler la fabrication de nouveaux neurones chez les souris âgées. Tandis qu’une équipe anglo-américaine, codirigée par Amy Wagers observait un effet régénérant au niveau de la moelle épinière.

Mais d’où viendraient ces pouvoirs « alchimiques » du sang des jeunes ? Les scientifiques tentent depuis plusieurs années d’identifier les molécules favorisant cette régénération. Des expériences d’injection de quelques-unes d’entre elles ont déjà donné des résultats prometteurs, et les pistes de recherche ne manquent pas.

D’où viendraient, à l’inverse, les molécules à l’action opposée qui, avec les années, les remplacent progressivement dans le sang ? On peut imaginer que certains tissus ou organes, en vieillissant, « infectent » les autres en produisant de plus en plus de molécules néfastes, qui vont voyager dans le sang, avance le neurologue Tony Wyss-Coray. Reste à identifier lesquels.

Le chercheur partage l’espoir, avec de nombreux confrères, qu’inhiber l’action de ces molécules liées au vieillissement, et renforcer celle des molécules régénératrices présentes dans le sang jeune, pourra ralentir le vieillissement.

En attendant ce Graal du prolongement de la vie, l’objectif est déjà de prévenir ou de soigner les nombreuses maladies chroniques favorisées par l’âge (pathologies cardio-vasculaires ou neurodégénératives, fragilité osseuse et musculaire…), mais aussi de favoriser la régénération des organes après un accident ou une opération chirurgicale.

Et les premiers essais sur l’homme ont déjà commencé. Dès 2014, Tony Wyss-Coray a fondé une start-up, Alkahest, qui a depuis procédé à des transfusions hebdomadaires de quelques décilitres de plasma, donné par des individus de moins de 30 ans, et acheté aux banques de sang lorsqu’elles avaient du surplus, à 18 patients atteints d’Alzheimer.

En 2019, l’équipe de Wyss-Coray a publié dans Nature medecine à propos d’une protéine, la VCAM1, qui augmente avec le vieillissement et semble avoir un impact important sur le cerveau. Les mesures biologiques et cognitives ont indiqué que bloquer la VCAM1 empêchait non seulement le vieux plasma d’endommager le cerveau des jeunes souris, mais pourrait même inverser les déficits chez les souris âgées.

Du plasma sanguin dilué

Une nouvelle étude, menée par  Irina et Michael Conboy de l’université Berkeley, a révélé une nouvelle voie intéressante dans les efforts pour lutter contre les effets du vieillissement. Les recherches de l’équipe ont montré comment la dilution du plasma sanguin de souris plus âgées peut avoir un fort effet de rajeunissement sur les tissus et les organes, en réduisant la concentration de protéines inflammatoires qui augmentent avec l’âge.

La moitié du plasma des souris a été échangée contre une solution composée d’eau salée et d’albumine. Ceci a amélioré considérablement la santé des souris âgées. Les effets de rajeunissement sur le cerveau, le foie et les muscles étaient les mêmes ou plus importants que lors des premières expériences en 2005. La procédure n’a eu aucun effet néfaste ou positif sur la santé des jeunes souris.

En utilisant l’analyse protéomique pour étudier le plasma sanguin et son contenu en protéines, l’équipe a découvert que le processus agit comme un « bouton de réinitialisation moléculaire ». Après l’échange, l’équipe a observé des concentrations plus faibles de protéines pro-inflammatoires tandis que les protéines bénéfiques, notamment celles qui favorisent la vascularisation, étaient capables de prospérer.

Il y a deux interprétations principales de nos expériences originales (de 2005), explique Irina Conboy. La première est que, dans les expériences de jonction des souris, le rajeunissement était dû à du sang jeune et à des protéines jeunes ou à des facteurs qui diminuent avec l’âge, mais une alternative tout aussi possible est que, avec l’âge, vous avez une augmentation de certaines protéines dans le sang qui deviennent nuisibles, et celles-ci ont été supprimées ou neutralisées par les jeunes partenaires. Comme le montre notre expérience (récente), la deuxième interprétation s’avère exacte. Le sang jeune ou les facteurs correspondants ne sont pas nécessaires pour l’effet de rajeunissement ; la dilution du vieux sang est suffisante (source).

Des candidats médicamenteux

Certaines de ces protéines présentent un intérêt particulier et, à l’avenir, nous pourrions les considérer comme des candidats thérapeutiques et médicamenteux supplémentaires, déclare Michael Conboy. Mais je mettrais en garde les gens trop optimistes. Il est très peu probable que le vieillissement puisse être inversé par des modifications d’une seule protéine. Dans notre expérience, nous avons découvert que nous pouvions faire une procédure relativement simple et approuvée par la FDA, et qu’elle modifiait simultanément les niveaux de nombreuses protéines dans le bon sens (source).

Voici donc qui est extrêmement prometteur. Malheureusement, seuls des marqueurs de vieillissement ont été mesurés. Aucune vérification de progrès pour la longévité n’a été effectuée puisque les souris étaient sacrifiées une fois l’expérience terminée. Il se pourrait très bien que les effets soient seulement temporaires voire négatifs sur le long terme.

Une expérimentation sur des humains et en double-aveugle serait cependant déjà prévue. C’est très positif si cela se passe rapidement et avec des volontaires bien informés. Nous saurions ainsi rapidement s’il y a un effet aussi positif pour les humains que pour les souris. Nous saurions après quelques mois si l’effet positif est durable. Si c’est le cas, cela sera une avancée énorme pour la longévité.


La bonne nouvelle du mois : De plus en plus de conférences internationales pour la longévité en ligne


Suite à la pandémie de Covid-19, un effet collatéral positif est une diffusion plus large, plus rapide et souvent gratuite, d’évènements concernant la longévité. Ainsi la Life Extension Advocacy Foundation (LEAF – Lifespan.io) diffuse de nombreuses conférences, notamment par sa chaîne YouTube.

À noter pour les non-anglophones qu’il est possible d’utiliser la traduction automatisée pour le sous-titrage. C’est encore imparfait, mais, généralement, déjà compréhensible. Un progrès technologique utile pour bien des usages dont le partage d’informations pour une vie plus longue.


Pour en savoir plus :

Pistes thérapeutiques : Covid-19 et vieillissement. N°135 Juin 2020

Nous connaissons bien l’augmentation de l’espérance de vie, mais elle est surtout apparue sous la forme de stratégies de sauvetage, comme la vaccination. Les vaccinations contre la polio et la variole ont sauvé des centaines de millions de vies, ou, pour le dire autrement, ont permis à des centaines de millions de personnes de vivre, alors qu’autrement elles seraient mortes. La vaccination est un exercice d’augmentation volontaire de l’espérance de vie – mais personne ne s’oppose avec horreur à son énorme effet sur l’espérance de vie.

John Harris, bioéthicien (citation peut-être trop optimiste vu la virulence de certaines campagnes « anti-vaccination »), avril 2020 (source de la traduction)


Thème du mois : Traitements Covid-19 et lutte contre le vieillissement


L’émergence du coronavirus SARS-CoV-2 en décembre 2019 a laissé bon nombre de médecins dans l’expectative. Face à ce virus inconnu, ils ont souvent dû se débrouiller avec les moyens du bord pour soigner leurs patients, quitte à tester des médicaments et des traitements non homologués. Une méta-étude, menée par l’université de Pennsylvanie (États-Unis) et publiée dans la revue Infectious Diseases and Therapy, a dénombré l’ensemble des traitements administrés aux premiers patients atteints du Covid-19. Ils ont ainsi calculé que 115 médicaments et remèdes différents avaient été prescrits à 9.152 patients. Mais l’étude met en évidence les tâtonnements des équipes médicales pour trouver le remède adéquat.

Cette lettre vise à faire un point, pour des non-spécialistes du sujet, de la situation au 20 juin 2020 des recherches les plus prometteuses ainsi que quelques liens avec des recherches relatives au vieillissement. Certaines pistes ne seront cependant pas explorées (par exemple les moyens de renforcer le système immunitaire dont la vitamine D).

  • Les vaccins 

Les recherches autour du coronavirus battent tous les records, 140 recherches sont recensées par l’OMS au 18 juin 2020 : le développement de recherches pour un vaccin nécessite habituellement bien plus de temps. Bien que plusieurs laboratoires soient sur des pistes sérieuses, la « mise en rayon » n’est toutefois pas pour demain !

Les vaccins à ARN messager

La vaccination via ARN messager prend la tête de la course au vaccin contre le virus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19.  C’est un vaccin de ce type qui a été le premier à passer à l’étape de l’essai clinique.

Aux États-Unis, la phase II de l’essai du vaccin mRNA-1273 a débuté le 29 mai, a indiqué l’entreprise de biotechnologies américaine Moderna Therapeutics dans un communiqué. Si elle se révèle concluante, la phase III de l’essai pourrait commencer dès juillet.

Les deux premiers essais européens sur l’homme ont eu lieu le 23 avril au Royaume-Uni et en Allemagne. Le vaccin ChAdOx 1 développé par l’université d’Oxford sera testé sur 800 patients, rapporte la BBC. Le vaccin BNT162 mis au point par la société allemande BioNTech a également obtenu le feu vert pour être testé sur 200 volontaires.

La technologie de recombinaison de l’ADN

Le groupe pharmaceutique français Sanofi s’est associé au ministère américain de la Santé pour développer lui aussi un candidat vaccin, en utilisant une « technologie de recombinaison de l’ADN ».

Elle consiste à combiner l’ADN du virus avec l’ADN d’un virus inoffensif afin de créer une nouvelle entité cellulaire à même de provoquer une réponse immunitaire. Les antigènes créés par cette opération peuvent ensuite être reproduits à grande échelle.

David Loew, vice-président exécutif de Sanofi Pasteur, estimait en février pouvoir disposer d’un candidat vaccin « dans moins de six mois » et potentiellement entrer en essai clinique « dans environ un an à un an et demi ».

L’avantage pour le vieillissement d’avoir des vaccins pour le Covid-19 est comme pour le vaccin contre la grippe, d’immuniser les personnes plus âgées pour les protéger d’une future contamination.

Un vaccin global contre le vieillissement est bien sûr actuellement inimaginable d’un point de vue scientifique. Certaines vaccinations globales favorables à la longévité sont par contre envisageables. Il est ainsi imaginable d’étendre la vaccination pour des maladies comme par exemple l’herpès. L’herpès est souvent asymptomatique, « souterrain ». Il touche la majorité des humains et la grande majorité des personnes âgées. Une vaccination pourrait permettre un gain modéré de vie en bonne santé aux personnes préservées de cette affection.

  • Les antiviraux et les anti-inflammatoires

La chloroquine, un antipaludique controversé

Une étude chinoise, publiée par la revue BioScience Trends le 18 février 2020 fut la première à affirmer l’efficacité de la chloroquine, un médicament utilisé contre paludisme, dans le traitement du Coronavirus SARS-CoV-2 et sa maladie Covid-19.

Le professeur Didier Raoult, qui teste la chloroquine à l’Institut hospitalo-universitaire de Marseille, a affirmé que son effet contre le coronavirus était spectaculaire avec la disparition du virus en six jours auprès des trois quarts des patients. Mais plusieurs experts appellent à la prudence en l’absence d’études plus poussées et en raison de ses effets indésirables qui peuvent être graves, notamment en cas de surdosage.

En mai, une étude du Lancet qui relevait les potentiels dangers de la chloroquine, a été rapidement rétractée. Un récent essai clinique randomisé en double-aveugle en défaveur d’un usage prophylactique de la chloroquine est paru dans le New England Medical Journal.

Cette affaire a été un superbe cas d’école pour présenter les sciences médicales. Il a été utile de pointer du doigt les nombreuses erreurs méthodologiques. Cependant, le débat est très vite devenu un conflit entre les anti-chloroquine d’un côté et les pro-chloroquine de l’autre. Pourtant la démarche scientifique n’est ni pro, ni anti. Elle valorise le doute, la prise de recul et se préoccupe peu de notre désir d’efficacité envers une thérapeutique, elle a vocation à trancher le réel, pas à nous bercer d’illusions rassurantes.

Les tests cliniques, notamment en double aveugle, auraient dû être une priorité absolue, mieux coordonnés et plus rapides. Force est de constater que la mobilisation énorme concernant la lutte contre la maladie n’a pas suffisamment permis cela.

Le remdésivir, premier traitement efficace sur le marché ?

Le remdésivir, mis au point par le laboratoire américain Gilead, « agit directement sur le virus pour empêcher sa multiplication », il a été testé dans le passé pour Ebola.

« Il n’y a pour l’instant qu’un seul médicament dont nous pensons qu’il pourrait avoir une réelle efficacité. Et c’est le remdésivir », annonçait en mars Bruce Aylward, un responsable de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’Agence européenne des médicaments (EMA) a annoncé lundi 8 juin avoir reçu une demande d’autorisation de mise sur le marché conditionnelle  de l’antiviral dans l’Union européenne.

La recherche sur les antiviraux liés au Covid a entrainé une accélération de l’ensemble des recherches relatives à cette catégorie de médicaments. Il n’y a cependant à ce jour pas d’application concernant la longévité des personnes âgées non atteintes d’une maladie virale.

Dexaméthasone

Il a été démontré en juin qu’un stéroïde, le dexaméthasone, par son effet anti-inflammatoire, réduisait assez fortement (jusqu’à 25 %) les décès des patients les plus atteints.

  • Plasma et anticorps

Lorsqu’on transfuse du plasma convalescent, et donc que l’on transfuse du sang d’un patient guéri vers un patient encore malade, on espère générer un « transfert d’immunité passive ». On insère les anticorps créés pour lutter contre l’infection chez une personne encore infectée afin qu’ils puissent agir immédiatement contre la maladie. Ce transfert peut provoquer une réaction de défense plus rapide encore qu’avec un vaccin. En revanche, puisqu’ils n’ont pas été produits directement par le corps du malade, les anticorps transférés ne perdureront pas et ne permettront pas une immunité à long terme. Néanmoins cela accélère la guérison et, dans le cas du Covid-19, l’espoir est d’éviter que la maladie ne s’aggrave.

La recherche médicale explore différentes pistes pour lutter contre le Covid-19. Parmi elles, transfuser le sang — et plus précisément le plasma — de patients guéris chez des patients encore malades est une sérieuse possibilité. L’Établissement Français du Sang (EFS) a démarré le 7 avril un essai clinique basé sur ce principe. Aux États-Unis, le groupe de recherche National COVID-19 Convalescent Plasma Project est également mobilisé sur de telles expérimentations.

L’avantage pour les personnes âgées est de pallier le manque de défense de leur système immunitaire en leur apportant une dose d’anticorps présents dans le plasma de personnes guéries. De manière plus large, le remplacement du sang par d’autres substances dans un organisme âgé fait partie des pistes extrêmement prometteuses en matière de longévité. Un développement tout récent est examiné à la fin de cette lettre (voir : La bonne nouvelle du mois).

Regeneron développe un traitement à la fois curatif et préventif

Le laboratoire Regeneron a développé l’année dernière un médicament, administré par voie intraveineuse, connu sous le nom « d’anticorps monoclonaux », qui a permis d’améliorer de manière significative le taux de survie de patients touchés par le virus Ebola. Le médicament pourrait fonctionner en l’administrant à des personnes avant qu’elles soient exposées ou après, même si les effets ne seraient que temporaires car les anticorps ne feront pas partie de la mémoire du système immunitaire des individus.

  • Cellules souches

Des chercheurs chinois et américains ont joint leurs forces pour tester l’efficacité de cellules-souches contre le coronavirus. L’étude a été publiée en avril 2020.

Les cellules souche semblent contribuer au rajeunissement et à la régénération des autres cellules. Elles font ceci de nombreuses manières tels que réduire l’inflammation, sécréter les substances qui protègent les cellules, réduire la mort cellulaire, fournir des effets antioxydants, et amplifier la réaction du système immunitaire.

En 2011, des chercheurs français ont réussi à redonner leur jeunesse à des cellules de donneurs âgés de plus de 100 ans en les reprogrammant au stade de cellules souches, ils démontrent ainsi que le processus du vieillissement des cellules est réversible. L’accélération des recherches sur les cellules-souches pour le Covid-19 pourra être utile également dans le cadre de la lutte contre la sénescence.


La bonne nouvelle du mois : Remplacer le sang de souris âgées par de l’eau salée et de l’albumine les « rajeunit » considérablement 


Dans la lettre mensuelle du mois de mai, nous faisions référence à un article scientifique concernant un « élixir » injecté dans le sang qui « rajeunirait » des rats.

Il y a quelques jours, un autre article très prometteur est paru dans la revue Aging concernant un mécanisme proche. Des chercheurs, dont un couple de scientifiques spécialisés dans ce type d’études, Irina et Michael Conboy, ont remplacé la moitié du sang de souris âgées par une solution d’eau salée et d’albumine. Le résultat a été spectaculaire. Cette dilution a des effets de rajeunissement sur le cerveau, le foie et les muscles.

Parmi les aspects extrêmement prometteurs de cette étude :

  • le produit donné est connu et ne coûte quasiment rien,
  • le traitement est d’une grande simplicité,
  • le traitement ne pose pas les problèmes éthiques qui se poseraient pour des transfusions sanguines de sang.

Cependant, comme pour l’expérimentation décrite le mois passé, il reste une question fondamentale non examinée Est-ce que réellement les souris « rajeunies » pourraient vivre plus longtemps ou bien est-ce que l’effet serait temporaire, voire même négatif à long terme ?

Si l’effet est durable (en renouvelant le cas échéant les transferts), un avenir spectaculaire de la réjuvénation s’annonce.


Pour en savoir plus :

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